Interview issue de notre guide « Nouveau monde du travail : quelles priorités pour les DRH ?» disponible en téléchargement
Après 14 ans passés chez l’équipementier automobile Valeo, Gino Balderacchi est devenu directeur des ressources humaines de Kingfisher France il y a trois ans. Le groupe, connu en France pour ses marques Castorama et Brico Dépôt avec 92 magasins, 123 dépôts et 21 000 salariés pour 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires, est « entré radicalement dans le phygital » depuis deux ans, avec de nombreuses conséquences RH.
Vous lancez en ce début d’année 2022 un programme d’acculturation et de transformation digitale en e-learning. D’où est venue l’impulsion ?
Gino Balderacchi : Nous avons vécu un bouleversement incroyable en très peu de temps : la crise de 2020 a multiplié par deux, voire par trois, notre activité en ligne (drive, click & collect…). En deux ans, notre part de vente en ligne est passée de 2 à 8 %. Nous sommes entrés radicalement dans le phygital, avec des parcours d’achat bien plus complexes qu’auparavant et de nouvelles attentes clients en matière d’expériences multicanales.
Pour être en mesure de dialoguer avec nos clients, nous devons former nos équipes. C’est le principe de symétrie des attentions.
Dans une approche de « test & learn », nous lançons sept modules consacrés à la culture digitale. Il s’agira par exemple d’exposer à nos collaborateurs la façon dont nos concurrents se positionnent sur le digital, de les acculturer aux enjeux de l’e-réputation et du social média… Le programme complet comporte 20 modules sur deux ans.
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Avez-vous construit ce programme en partenariat avec d’autres directions ?
G. B. : Oui, nous l’avons coconstruit en tandem avec Romain Roulleau, notre directeur marketing, digital et clients. C’était important que nous travaillions ensemble, pour nous faire l’idée la plus précise possible des souhaits de nos clients, de ce que doit être le « marketing de demain ». On ne peut pas imaginer exercer dans le retail sans disposer d’un socle de connaissances digitales très fortes.
Nous allons, dans un premier temps, inscrire 3000 de nos 21 000 salariés à ce programme, qui est accessible à 100 % en e-learning. Nous souhaitons qu’il soit intégré dans le package de formation de nos vendeurs et managers. Fin 2022, nous souhaitons que l’ensemble des collègues aient suivi ce programme d’acculturation et de transformation digitale.
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Vous évoquez un binôme efficace avec le marketing. Avez-vous d’autres « alliés » dans l’entreprise ?
G. B. : Des binômes se créent pour chaque transformation de l’entreprise qui nécessite l’intervention des RH. Par exemple, quand nous avons décidé de décentraliser vers les enseignes certaines activités qui autrefois avaient été centralisées (la qualité, le sourcing et les MDD notamment), j’ai travaillé en binôme avec le directeur commercial. De même, quand nous avons lancé à Lille cette année un nouveau concept de magasin de proximité baptisé « Casto » (moins de 400 m2).
Je veille aussi à ce que dans ma propre équipe, le binôme recruteur et opérationnel soit bien articulé !
Quels chantiers prioritaires placeriez-vous sur le podium, après la formation au digital ?
G. B. : Nous travaillons beaucoup sur la diversité et l’inclusion. Nous faisons partie d’un groupe anglo-saxon dans lequel cette dimension est nettement plus sensible qu’en France. Parmi nos opérations en cours, nous avons lancé le programme « Women Leaders » qui s’inscrit dans le plan « #ENSEMBLE… Une chance pour tous », dédié à l’inclusion. Nos ambitions étaient d’atteindre 40 % de femmes cadres dans nos enseignes d’ici 2025 : nous y sommes presque, avec 38,8 % actuellement. Et nous voulons également passer le seuil de 30 % de femmes dans le top management. Nous accueillons par ailleurs beaucoup de jeunes en stage et en apprentissage, à l’image de notre clientèle, qui tend à se rajeunir.
[bctt tweet= »« 3000 salariés pour commencer, 21 000 attendus à terme. Ce programme d’acculturation et de transformation digitale a été coconstruit par le DRH et le directeur marketing, digital et clients. » » username= »Alliancy_lemag »]Un autre chantier d’envergure : faire évoluer les métiers de la logistique ainsi que les postes d’hôtesse/hôte de caisse, dont le quotidien a profondément changé. Nous voulons les accompagner vers la vente. Ces deux métiers en annoncent beaucoup d’autres. La vague suivante, ce sera la « vente projet ». Il s’agira d’accompagner le client, avec un seul interlocuteur dédié, sur l’intégralité du chantier de sa nouvelle cuisine, par exemple. On passe d’une culture produit à une culture projet.