Le Datalab et les PoC appartiennent au passé à la Matmut depuis la création en 2021 d’une direction de la Data autonome et conçue pour industrialiser. Pour assurer la proximité business, la mutuelle s’appuie sur des relais Data. Interview de son CDO, Olivier Monnier.
“J’étais PoCophile. Je suis devenu PoCophobe”, déclarait l’année dernière le Chief Data Officer de la Matmut, Olivier Monnier. Ce changement, il l’incarne au sein de la direction Data, créée avec son arrivée au sein de la mutuelle en 2021.
Auparavant, l’entreprise disposait d’un datalab à la DSI. “Nous avons complètement changé de paradigme”, confie-t-il lors de l’émission Data4Business. Le Lab et ses expérimentations ont en effet cédé le pas à une direction “où on délivre des sujets jusqu’à l’industrialisation.”
Une direction autonome avec un sponsoring fort
Avec le soutien de la direction générale de la Matmut, le Data Office a été fondé avec pour ambition “de vraiment prendre la pleine puissance de l’IA et de la data.” Olivier Monnier dirige donc une entité rattachée au Comex et indépendante de l’IT.
Ce rattachement direct constitue une force pour son CDO. “Cela permet de fluidifier un peu les prises de décision”, observe-t-il. Autonomie et sponsoring favorisent en outre les discussions directes avec les métiers, en partenariat avec l’IT.
Pour ces métiers, la direction délivre donc différents cas d’usage, et à des niveaux de maturité hétérogènes. Parmi ceux-ci, des projets “relativement classique” dont des scores d’appétence ou d’attrition.
“Nous lançons aussi beaucoup de sujets plus innovants, notamment sur une thématique assez commune à toutes les mutuelles et les assureurs, et qui touche les risques climatiques. Pour cela, nous allons chercher des données qui n’étaient pas utilisées jusqu’à présent”, déclare le CDO.
Et en matière d’innovation, si la Matmut étudie encore à distance le potentiel de l’IA générative, elle s’investit en revanche dans un domaine de pointe qu’est l’informatique quantique. Quelle que soit la nature du projet, l’objectif visé dès le départ est celui de son industrialisation.
Remontée des projets grâce aux relais Data
Pour identifier les besoins, la direction Data soigne sa proximité avec les métiers. “Nous les impliquons, pour ne pas dire on les responsabilise. La roadmap data à la Matmut ne part pas du haut pour être exécutée par le bas.”
“Non, elle est proposée par les opérationnels. Dans chaque direction, nous disposons d’un ou plusieurs relais data qui vont nous apporter les cas d’usage. Ils sont véritablement amenés par le métier avant d’être examinés en comité”, poursuit Olivier Monnier.
Pour l’évaluation des use cases, trois questions doivent être résolues. Pourquoi ? Quel est le risque à faire ? Quelle valeur pour l’entreprise ou ses sociétaires ? Une approche aux résultats jugés satisfaisants.
“Ce mode de fonctionnement est acquis. Nous avons réellement changé le paradigme et la façon de penser des métiers en moins d’un an et demi”, se félicite le CDO. En ce qui concerne l’organisation, le modèle mis en œuvre n’est pas figé.
“Quand nous avons créé la direction, la maturité de l’entreprise n’était pas suffisamment forte pour aller sur un mode décentralisé. Nous avons donc centralisé. Cela veut dire que les développements et data science et l’industrialisation étaient faits entièrement dans ma direction”, justifie-t-il.
Une organisation hybride tirée par la maturité
Désormais, la Matmut s’oriente vers un modèle hybride, avec certaines directions disposant de compétences en data science dans leurs propres équipes. C’est par exemple le cas du marketing, doté de ses ressources.
“Nos collègues du marketing développent leurs propres algorithmes, supervisés par nos data scientist de la direction Data, qui se transforme en centre d’excellence (…) Tous les prototypes seront industrialisés de façon centralisée chez nous”, détaille-t-il.
Sur la gouvernance, le CDO ambitionne également de s’orienter vers un modèle hybride avec de l’ownership des métiers. La gouvernance reste cependant “le ventre mou” d’une direction encore jeune.
“C’est le point faible chez nous pour de multiples raisons. Nous avons une vision qui est plus orientée sur la qualité de données et un peu plus sur la qualité de données d’un point de vue réglementaire. Aujourd’hui, nous nous ouvrons à une gouvernance de données un peu plus métier. Nous sommes en train de poser les fondations.”
D’autres priorités sont aussi sur la table du CDO, dont celle de la rétention des talents de la Data et de leur progression dans l’entreprise. La seconde : structurer et stabiliser l’infrastructure data. Un volet mené en collaboration avec l’IT.