L’IA générative va-t-elle renvoyer les DSI sur les bancs de l’école ?

[SERIE What’s Next CIO IT-Métier] Face à l’engouement généralisé pour le pendant génératif de l’intelligence artificielle, les professionnels de l’IT doivent parvenir à accompagner les métiers dans leur façon d’appréhender ce qui s’apparente à une révolution. Un défi de taille qui risque d’obliger un grand nombre d’entre eux à se replonger dans les manuels.

>> Un article What’s Next, CIO ? L’observatoire des tendances stratégiques et opérationnelles des DSI

Qu’ils supervisent les systèmes d’information, la data ou la cybersécurité (DSI, CDO ou RSSI), 75 % des responsables numériques admettent un certain retard quant à l’adoption de l’IA générative. C’est ce qui ressort, entre autres, de l’enquête Global Technology & Data Leaders Survey 2024, réalisée par le cabinet Wavestone auprès de 600 leaders technologiques en Europe, en Amérique du Nord et en Asie. Beaucoup d’entre eux n’auraient pas les bases nécessaires à l’identification des opportunités, mais également des risques liés à l’exploitation de cette nouvelle forme d’intelligence.

WNCIO2Cela s’explique bien souvent par une difficulté à trouver le point d’entrée : par où aborder le problème  et comment ? Pour Chadi Hantouche, consultant associé chargé de l’étude Wavestone, « il faut déjà partir du principe que le sujet n’est pas une affaire de technologie. Le débat n’est pas autour du “LLM ou SLM [grand ou petit modèle de langage]” qui, lui, fera l’objet de discussions complexes entre experts. Non, tout est question d’usage ! » En règle générale, quand une direction métier fait une analyse d’opportunités, elle se tourne très rapidement vers sa DSI. « Et il va falloir être en mesure de répondre, car les métiers l’utiliseront, qu’on le veuille ou non ! Il est donc recommandé de se pencher sur une solution pour éviter les dérives de type shadow IT », précise Chadi Hantouche.

[bctt tweet= »75 % des responsables numériques admettent un certain retard quant à l’adoption de l’IA générative. » username= »Alliancy_lemag »]

Des cours du soir pour se mettre à jour

Plus qu’une technologie donc, l’IA générative est en passe de transformer durablement les organisations de plusieurs façons : d’une part, au travers d’enjeux de productivité et d’efficience ; d’autre part, via un bouleversement  des modèles d’entreprise avec des changements de paradigmes importants. Cela va des services clients, avec des conseillers augmentés en mesure de mieux renseigner leurs interlocuteurs, aux professionnels du cinéma, où l’IA générative réalise à la demande les décors des studios d’Hollywood. « Notre rôle est d’accompagner nos métiers et de leur fournir des solutions répondant à ces questions d’efficience, de productivité et d’évolution des modèles économiques », convient Lionel Chaine, DSI de Bpifrance.

Alors, à la question, les DSI vont-ils devoir retourner sur les bancs de l’école, pour lui, la réponse est oui : « J’ai suivi un cursus du soir de trois mois, de 19 à 21 heures, à l’École normale supérieure, pour balayer la problématique à 360°. Cette formation était ouverte à tous types de cadres dirigeants et cherchait, avant tout, à donner des éléments logiques. La technique n’était pas le centre des préoccupations. Nous avons observé ce que fait l’IA, ce qu’elle ne fait pas, ce qu’elle va faire et ce qu’elle ne fera pas. Nous avons également évoqué les principaux acteurs, discuté de la pertinence d’un modèle open source et traité des sujets sur les droits de la propriété intellectuelle. »

Des lectures en continu pour se tenir à la page

Pour les DSI, il ne faudra pour autant pas perdre de vue certains enjeux technologiques, eux, pour le coup, et comprendre les différentes implications imposées par l’usage de l’IA générative. « Beaucoup trop pensent encore pouvoir se dispenser de traiter la qualité des données, ce qui est complètement faux. C’est même l’inverse : c’est une condition sine qua non pour la qualité des résultats délivrés par l’IA générative », assure Chadi Hantouche. La partie infrastructure est également un sujet important, notamment sur la question des GPU (processeurs graphiques). Faut-il en avoir, ou pas ? Doit-on  les louer ? Comment cela va-t-il évoluer ? Pourquoi NVIDIA est-il si prégnant sur ce domaine avec ses processeurs et son middleware de programmation CUDA qui permet d’entraîner les modèles ?

« Plus que  de renvoyer les professionnels de l’IT sur les bancs de l’école, je pense qu’ils vont devoir adopter une posture de formation continue, faute de ne plus être rapidement à la page », ajoute Chadi Hantouche. Et ça, le DSI de Bpifrance l’a bien compris et passe à peu près une heure par semaine à se documenter : « Les évolutions vont très vite. Au-delà d’embarquer les métiers dans des versions pilotées et maîtrisées par la DSI pour s’assurer que les données stratégiques ne se retrouvent pas dehors, il nous faut les accompagner pour appréhender l’  embarquée dans la plupart des solutions SaaS. Je pense, par exemple, à Copilot de Microsoft ou Gemini de Google. En plus de devoir aider les collaborateurs à “prompter” convenablement, il nous faut accompagner nos éditeurs et nos contrats autour de ce sujet. »