Discours d’Emmanuel Macron à la Sorbonne, percée annoncée du Rassemblement National, inscription de dernière minute sur les listes électorales, ou encore Giorgia Meloni, première ministre italienne, en tête de liste pour son parti… La presse commence à faire la part belle aux actualités concernant les élections européennes. La campagne officielle ne commencera que le 27 mai, après la clôture du dépôt des listes dix jours plus tôt, mais les temps de parole des candidats et de leurs partis sont, eux, décomptés depuis le 15 avril. Les sujets politiques vont donc s’imposer de plus en plus dans le quotidien, jusqu’au vote du dimanche 9 juin.
Force est cependant de constater que le numérique n’est pas vraiment en tête des priorités des thèmes discutés dans cette séquence. Dans son discours, le président de la République a appelé jusqu’à 1000 milliards d’investissements publics et privés supplémentaires par an pour financer les industries européennes clés, tout en poussant à changer les règles de la concurrence pour créer des leaders mondiaux de l’intelligence artificielle et du quantique. Mais les parties les plus discutées de son discours auront été les sujets de maîtrise des frontières ou encore sa critique des positions nationalistes. Et c’est bien dommage !
En effet, quand on aborde les enjeux qui transforment le plus la société et l’économie européenne, le numérique est incontournable. Des impacts de l’intelligence artificielle sur le monde du travail jusqu’aux luttes d’influence et de désinformation, en passant par les préoccupations en termes de dépendances géopolitiques… la réalité est que la partie ne se joue pas (seulement) au niveau de l’Hexagone.
Avec son marché de 450 millions de consommateurs, plus que les États-Unis, et sa capacité à contraindre et inspirer des usages dans le monde entier par des réglementations autant décriées qu’applaudies, l’Europe est le bon niveau de l’échelle pour peser sur l’avenir du numérique. Mais il est encore trop rare d’entendre le personnel politique s’exprimer avec précision sur les défis complexes qui se posent à notre écosystème, et cela d’autant plus quand la campagne est phagocytée par les luttes politiques nationales. Ce qui n’empêche pas d’avoir de l’espoir.
En la matière, l’initiative du collectif Convergence Numérique, de demander aux représentants des différentes listes candidates de venir pitcher et répondre à des questions sur des sujets experts, et devant des journalistes, est hautement louable. Tous les partis ne se sont pas prêtés à l’exercice, ce qui est en soi un bon indicateur du manque d’intimité de certains sur les problématiques du numérique. Pour autant, on ne peut qu’espérer que ce format de rencontre, même si l’exercice a ses limites, puisse être reconduit, démultiplié et, surtout, organisé sans qu’il y ait besoin d’une échéance électorale comme les Européennes. Un moyen de forcer un plus grand nombre de politiques à véritablement se saisir de l’avenir du numérique avec profondeur, ce qui manque encore cruellement.