Malgré les freins en Europe, Mistral AI veut rester français 

C’est face à la commission des affaires économiques du Sénat, qu’Arthur Mensch a renouvelé fin mai sa volonté de maintenir la gouvernance de Mistral AI en France. Pourtant, le co-fondateur de la start-up a averti sur l’ensemble des freins européens, notamment liés au financement. 

Rester français, c’est bien l’intention de la jeune start-up Mistral AI. Pourtant, Arthur Mensch, co-fondateur de cette pépite tricolore de l’intelligence artificielle (IA) générative, soulève, devant la commission des affaires économiques du Sénat, les différents freins qui existent en Europe, alors que l’entreprise vient d’ouvrir une filiale aux États-Unis. “75% du capital est français, le comité stratégique est sous contrôle des fondateurs. D’un point de vue de la gouvernance, nous sommes complètement français”, souligne Arthur Mensch, mercredi 22 mai, au lendemain d’un sommet sur l’IA organisé à l’Élysée à l’initiative du président Emmanuel Macron. 

Une plus grande prise de risque outre-Atlantique 

En pleine croissance depuis sa création en 2023, Mistral AI a trouvé, outre-Atlantique, les moyens d’y répondre. “C’était nécessaire de s’allier à des fonds américains”, indiquent les co-fondateurs devant les sénateurs de la commission des affaires économiques. Ils mettent en avant les prises de risque qui y sont faites. “Les fonds américains comprennent mieux la technologie que les fonds européens et font des chèques bien plus importants à des stades plus précoces des entreprises”. Selon lui, les fonds européens n’ont pas de vision suffisamment long terme. “On nous a dit que c’était trop tôt”, confie-t-il.

Il assure : “Tant qu’il n’existera pas de fonds stratégiques de plusieurs dizaines voire centaines de milliards d’euros qui puissent investir avec des retours dans 20 ou 30 ans, il n’existera pas de fonds de croissance”. Ainsi, il estime que les entreprises à forte croissance se dirigeront toujours vers les États-Unis. “C’est une des sources de décrochage de l’Europe par rapport aux États-Unis », estime Arthur Mensch. Pourtant, il estime que les investissements n’en sont encore qu’à leurs débuts concernant l’IA. Il compare à l’évolution du réseau internet : “Entre 1990 et aujourd’hui, ce sont près de 2300 milliards qui ont été investis pour l’internet”. 

Selon lui, pour l’IA, les financements nécessaires seront bien plus élevés. “Il y a un consensus qui indique que les besoins seront de l’ordre de plusieurs milliers de milliards d’euros. Si on ne fait rien, ça va être porté par les US”, avertit Arthur Mensch devant la commission des affaires économiques du Sénat, qui pointe également le droit du travail français. Dans l’Hexagone, un préavis de trois mois existe lorsqu’un employé veut quitter son entreprise. “C’est une des catastrophes économiques françaises. Il faut déprotéger les grandes entreprises qui veulent conserver leurs employés”, assure-t-il. Selon Arthur Mensch, cette loi empêche les jeunes entreprises de recruter rapidement et de croître rapidement. “On grossit plus vite aux USA pour cette raison”. 

Une diffusion inégalitaire de l’IA, le risque le plus important

Devant la commission des affaires économiques du Sénat, Arthur Mensch a averti sur ce qui est selon lui, le plus grand risque, l’accaparement de ces technologies par les acteurs puissants : 

« Il faut faire en sorte que les bénéfices de l’IA se transmettent à toute la population avec une coordination mondiale. Il faut que ce soit fait de la manière la moins inégalitaire possible. C’est pour nous le risque majeur. Si c’est mal fait, il va y avoir une forme de capture par les gros acteurs et on risque d’enrichir les plus riches et appauvrir les plus pauvres. Ce n’est pas ce que nous voulons aujourd’hui. Répondre à cet enjeu est une opportunité intéressante. Pas la nôtre, mais c’est celle de la France de recentrer le débat parce qu’historiquement, il est difficile d’avoir des gouvernances mondiales. »