Accessibilité numérique et outils éducatifs : coup de chapeau au Tribunal administratif de Paris

Notre chroniqueur Eric Barbry revient sur une récente (et rare) décision de justice concernant l’accessibilité numérique. Pour lui, les progrès qu’elle implique sont malheureusement contrebalancés par au moins un défaut majeur.

Rares sont les décisions qui portent sur l’accessibilité et le numérique. On ne peut donc que se féliciter de la décision rendue par le Tribunal administratif de Paris le 21 mai dernier.

Le Tribunal satisfait les demandes de l’association Accompagner, promouvoir, intégrer les déficients visuels, visant à :

  • Annuler la décision implicite de refus de la secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées de mettre en œuvre la procédure contradictoire prévue par l’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées et l’article 8 du décret n° 2019-768 du 24 juillet 2019 relatif à l’accessibilité aux personnes handicapées des services de communication concernant l’outil Pronote ; (NDA – Aujourd’hui il s’agit de l’article 47-1 de la loi) ;
  • Enjoindre à l’ARCOM d’engager et de mener à son terme la procédure contradictoire de contrôle et de sanction prévue par l’article 47-1 de la loi du 11 février 2005.

En résumé l’article 47 fixe les obligations relatives à l’accessibilité et les obligations d’information. Les mesures sont détaillées dans le décret de 2019

Cet article s’applique aux acteurs suivants :

1° personnes morales de droit public ;

2° personnes morales de droit privé délégataires d’une mission de service public, ainsi que celles créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial et dont :

  • Soit l’activité est financée majoritairement par une ou plusieurs personnes mentionnées aux 1° et 3° de l’article 47 ;
  • Soit la gestion est soumise à leur contrôle ;
  • Soit plus de la moitié des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance sont désignés par elles ;

3° personnes morales de droit privé constituées par une ou plusieurs des personnes mentionnées aux 1° et 2° pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial ;

4° entreprises dont le chiffre d’affaires excède un seuil défini par le décret en Conseil d’Etat.

Au cas particulier de Pronote, le Tribunal estime qu’il s’agit de l’interface, sous la forme d’une application web ou d’une application mobile, de communication entre un certain nombre d’établissements scolaires, environ 10 000 selon l’association requérante, et les parents, élèves et enseignants. Et qu’il s’agit donc d’un « service de communication au public en ligne de ces établissements publics » Pronote est l’interface, sous la forme d’une application web ou d’une application mobile, de communication entre un certain nombre d’établissements scolaires, environ 10 000 selon l’association requérante, et les parents, élèves et enseignants. Il s’agit donc d’un service de communication au public en ligne de ces établissements publics au sens de l’article 47 de la loi du 11 février 2005 et il doit donc respecter les obligations prévues par cet article.

Un référentiel riche – Le référentiel normatif ou règlementaire est inversement proportionné au nombre de services numériques accessibles :

  • Directives du « web content accessibility guidelines » (WCAG) ou en français les règles pour l’accessibilité des contenus du web sont des lignes directrices à suivre définies par le « World Wide Web Consortium » (W3C) ;
  • Directive (UE) 2016/2102 relative à l’accessibilité des sites internet et des applications mobiles des organismes du secteur public du 26 octobre 2016 ;
  • Digital Services Act (DSA) (article 36 bis) ;
  • Digital Markets Act (DMA) article 8.

Le référentiel légal français se décompose selon les textes suivants :

référentiel légal français

Une conclusion mitigée du fait de sanctions ridicules

Vous me connaissez généralement un coup de chapeau s’accompagne souvent chez moi d’un coup de gueule. En effet on ne peut que regretter le niveau des sanctions en cas de non-respect de l’article 47.

Dans la cadre de la procédure devant l’Arcom, qui vise à permettre à l’autorité de constater d’éventuels manquement aux obligations légales, les sanctions possibles sont limitées à un montant maximum de 50 000 € pour le non-respect de l’obligation d’accessibilité mentionnée au I de l’article 47 et 25 000 € pour celui des obligations mentionnées aux III et IV du même article (déclaration en ligne et schéma pluriannuel).

Même si l’on ne peut pas comparer règles relatives à l’accessibilité d’autres règlement comme le RGPD ces sanctions apparaissent ridicules…

Il faut pourtant rappeler que dans son rapport de 2023, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques estime entre 2,6 à 7,6 millions de personnes handicapées ou dépendantes de 15 ans ou plus en 2021, selon la mesure retenue.

En résumé : Accessibilité, élève en progrès mais peut mieux faire !