CES 2025 : au-delà des gadgets, une nouvelle dynamique B2B

Connu pour révéler les innovations les plus futuristes, parfois gadgets, le CES de Las Vegas, qui se déroule du 7 au 10 janvier, n’en reste pas moins un rendez-vous incontournable pour les entreprises. Une mue vers le B2B lui confère une position unique sur le marché des salons de l’innovation, attirant des professionnels en quête de solutions innovantes et de partenariats stratégiques. 

 

« Comme depuis cinq ans, c’est encore l’année de l’intelligence artificielle (IA) », lance Matthieu Deboeuf-Rouchon, responsable du Centre d’Excellence Innovation de Capgemini Engineering en France. En effet, l’IA sera omniprésente dans les innovations : objets du quotidien, ordinateurs, appareils embarqués. Elle occupera également une place importante dans celles destinées aux visiteurs professionnels, de plus en plus nombreux à Las Vegas chaque année. Une évolution que le CES (Consumer Electronics Show), ouvert ce mardi 7 janvier à Las Vegas (États-Unis), a lentement opérée depuis sa création en 1967, à l’ère des premiers téléviseurs. 

 

Le B2B en tête 

 

« Aujourd’hui, la part du B2B est majoritaire sur le salon », indique Florent Roulier, directeur avant-vente et manager de l’innovation au sein du cabinet de conseil technologique Niji. Selon les chiffres de l’entreprise, 42 % des visiteurs s’intéressent au B2B, contre 20 % au B2C. Les autres portent leur intérêt sur les deux aspects. « Avec l’arrivée d’Internet à la fin du siècle, cela a pris une dimension très importante dans le salon au fil des années », explique Matthieu Deboeuf-Rouchon, avant de souligner la tendance de fond du CES : comment nourrir une intelligence d’entreprise. « Cette dynamique nouvelle est aujourd’hui dans l’ADN du salon. » 

 

« Cette professionnalisation du salon attire maintenant des directeurs de l’innovation, ce qui intéresse le CES », assure Sasha Dunas. Mais le salon est également une aubaine pour ces directeurs des grandes entreprises à travers le monde. « Beaucoup viennent y faire leurs courses », poursuit Sasha Dunas. « Ils viennent sentir le marché et observer les tendances qui se confirment ou s’annoncent », ajoute-t-il, évoquant l’attente très forte des visiteurs professionnels autour des nouvelles possibilités offertes par l’intelligence artificielle. 

 

Le CES donne le « la » 

 

Sa position dans le calendrier offre au CES une caisse de résonance que ses concurrents, comme le Gitex de Dubaï en avril ou VivaTech à Paris en juin, n’ont pas. « Il donne le « la » sur les grandes tendances qui vont rythmer l’année », souligne Sasha Dunas. Mais la puissance du CES repose également sur son rayonnement médiatique. Près de 4 000 journalistes sont accrédités pour relayer les tendances à travers le monde. « Beaucoup d’entreprises participent pour bénéficier de cette visibilité », indique Florent Roulier. « Le salon est pensé de cette manière et garantit une bonne couverture médiatique. » 

 

Une couverture inégalée par les autres événements tech de l’année, que les grandes entreprises exploitent pleinement. À l’écart des allées bondées, des scènes équipées d’écrans géants permettent de présenter des innovations lors de keynotes souvent spectaculaires. « Les grandes entreprises réservent leurs annonces les plus retentissantes pour le CES de Las Vegas », explique Florent Roulier. Cependant, ce rayonnement médiatique n’est pas la principale raison de leur venue. Selon Matthieu Deboeuf-Rouchon, il représente 40 % des motivations, contre 60 % pour la recherche de partenariats. 

 

« Une énergie de dingue » 

 

« C’est le moment où tous les industriels de la tech se réunissent », souligne-t-il. « Cela ouvre un champ des possibles important. » À Las Vegas, environ 60 % des participants ou visiteurs viennent des États-Unis. « C’est naturellement le lieu idéal pour s’adresser au marché américain », confirme Florent Roulier. Mais pas uniquement. « On y trouve également des marchés peu explorés », poursuit-il. En effet, des exposants d’Amérique du Sud, du Moyen-Orient, d’Afrique ou des dragons asiatiques (Hong Kong, Corée du Sud, Taïwan et Singapour) font également le déplacement. « C’est le salon des États-Unis et de leurs alliés », souligne Florent Roulier, précisant que les acteurs chinois présents sont généralement de moindre envergure. 

 

« Si l’on souhaite étendre ses réseaux en Europe, c’est également le bon endroit », ajoute-t-il. Cela peut surprendre, mais l’Europe est largement représentée. Le décalage horaire de 8 heures avec Londres et de 9 heures avec Paris permet aux visiteurs européens de profiter pleinement du salon pendant que leurs collègues en Europe ont terminé leur journée de travail. « Ce moment est précieux pour réseauter », explique Matthieu Deboeuf-Rouchon. « Les partenariats initiés ici se concrétisent souvent sur le long terme. » 

 

Contrairement à des événements européens comme VivaTech, où les visiteurs ne restent parfois qu’une journée, à Las Vegas, la présence sur place dépasse rarement deux ou trois jours. « C’est la force de l’événement », affirme Sasha Dunas de Mission Innotech. « Les participants travaillent sur le salon la journée et se retrouvent le soir », offrant des journées particulièrement longues. « Ce sont des journées de 18 heures », confirme Matthieu Deboeuf-Rouchon. « Il y a une énergie incroyable qui se dégage de ce salon », ajoute-t-il. Selon lui, de nombreuses relations professionnelles essentielles à son quotidien ont été initiées au CES. Un événement qui met en lumière les tendances numériques, technologiques et virtuelles de notre époque, mais qui, paradoxalement, selon Matthieu Deboeuf-Rouchon, « reste un salon profondément humain ».