Truffle FinTech Incubator, le premier incubateur privé dédié aux Fintech, a été inauguré en juin dernier à Paris par Truffle Capital. Son directeur général et cofondateur en charge du portefeuille des technologies de l’information, Bernard-Louis Roques, nous livre sa vision du marché et les raisons de cette création.
Alliancy, le mag. Que pensez-vous des entreprises françaises de la Fintech ?
Bernard-Louis Roques. Nous avons constitué cet incubateur parce que nous croyons que les dés ne sont pas jetés. Bien qu’étant basés à Paris et non à New York ou à Londres, nous pouvons construire des sociétés s’adressant non seulement à des marchés déjà identifiés, mais aussi capables d’innover et de s’imposer sur des marchés non encore identifiés. Hormis dans certains secteurs B to B très spécialisés (places de marché où Paris n’est pas la mieux placée, il n’y a aucune raison de considérer qu’il en soit de même dans la Fintech en général.
La plupart des start-up françaises de la Fintech se plaignent d’un manque d’investisseurs spécialisés…
L’avantage relatif des places comme Londres, New York et même San Francisco est effectivement une source plus importante de financement. Il n’y a sans doute pas assez de capitalrisque en France. Nous avons tous les instruments pour le faire – je pense notamment aux FCPI –, mais ils ne sont pas assez développés. Il en faudrait le double pour concurrencer la place de Londres. La politique industrielle du risque devrait inclure l’instrument de financement en le mettant en valeur. La fiscalité joue. Par exemple, les FCPI ne sont pas avantagés par rapport aux instruments sur le cinéma et l’outremer, notamment dans les plafonds fiscaux. Or, ils devraient figurer dans les meilleurs instruments fiscaux pour drainer l’épargne et favoriser le développement du capital-risque. Cela peut s’avérer dangereux si la place de Paris n’intervient pas rapidement de ce côté-là. Une société française dont les investisseurs significatifs sont basés à New York ou dans la Silicon Valley a de fortes probabilités de délocaliser son centre de décision.
Pourquoi avoir lancé un incubateur dédié aux Fintech ?
Cet incubateur représente une partie de la stratégie d’investissement de Truffle. L’ensemble des sociétés que nous avons lancées dans ce domaine étaient au départ des idées qui se sont concrétisées. Nous sommes partis dans de nombreux cas de zéro (ou presque zéro) pour construire des sociétés innovantes ayant vocation à prendre des parts de marché. Dans un marché globalement neuf tout en étant régulé, ce modèle d’incubation a un sens. Une entreprise Fintech, aussi petite soit-elle, a une composante régulation très importante. Il nous est apparu nécessaire de créer un environnement favorable au développement de ces sociétés pour une fertilisation croisée à la fois dans les expériences, dans les compétences, mais aussi dans le réseau de connaissances, l’attractivité par rapport à un réseau de partenaires.
Vous avez créé le premier incubateur privé du secteur. D’autres suivront-ils ?
Oui. Certains dès la fin de l’année 2015. Nous souhaitons qu’un nombre important d’incubateurs dédiés à la Fintech voit le jour pour faciliter le développement et l’innovation. La France étant un pays très centralisé, Paris a vocation à devenir un pôle qui compte en Europe.
Quels sont vos critères de sélection ?
Pour que l’incubateur fonctionne, il faut des échanges dans la confiance. C’est la raison pour laquelle nous recrutons des sociétés non concurrentes et complémentaires. Le fait que Truffle soit actionnaire de trois* des quatre entreprises hébergées* est aussi un facteur de confiance, l’actionnaire commun se portant garant de la cohérence d’affaires et de valeurs entre les sociétés.
Que leur apportez-vous ?
En occupant systématiquement un à deux postes de leur conseil d’administration, nous apportons notre vision stratégique et financière. Nous les aidons dans la constitution des dossiers réglementaires et mettons à leur disposition des ressources internes pour implémenter certaines décisions stratégiques, notamment des moyens de marketing digital mutualisés.
Vous intéressez-vous à d’autres segments de la Fintech ?
Nous suivons de près tout ce qui touche aux services aux investisseurs, essentiellement basés sur le big data.
*Paytop (moyens de paiement) ; Credit.fr (financement participatif pour les TPE et PME) ; Smile&Pay (opérateur de transactions de paiement par carte bancaire).
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