Au chapitre santé du programme d’Emmanuel Macron, l’un des objectifs prioritaires que devra porter Agnès Buzyn, nouvelle ministre de la Santé est l’efficience des systèmes de santé. Le plan d’investissement de 5 milliards d’euros pour la santé promis par le président élu doit ainsi en partie bénéficier au développement des technologies dans l’administration, à l’hôpital et dans le secteur médico-social. Comment rendre les systèmes de santé plus efficients aujourd’hui en France ?
A la poursuite du décloisonnement du territoire
Sur le volet efficience du système de santé, Emmanuel Macron a souligné sa volonté de décloisonner le système, en soutenant « les initiatives et les expérimentations des professionnels de santé, médicaux, paramédicaux, hospitaliers et libéraux, afin de renforcer la coordination des soins et de mieux accompagner les malades dans leur parcours. » On est bien là, dans la continuité des actions entreprises par le gouvernement précédent avec le décret publié en 2016 portant sur les fonctions d’appui pour la coordination des parcours de santé complexes, qui ouvre la voie au décloisonnement. En effet, ce plan comporte le développement du numérique entre la ville et les établissements de santé ainsi que l’aide à l’organisation territoriale des soins, afin de favoriser les parcours de santé pertinents et le maintien à domicile. Selon le président élu, le vrai sujet porte sur « l’intelligence locale versus la centralisation », se montrant convaincu que les défis posés au système de santé seront mieux surmontés avec « une collectivité soignante responsabilisée […] avec une autonomie de moyens », à la différence de l’approche traditionnelle qui consiste à appliquer « une solution unique » (autrement dit quels que soient le territoire et ses caractéristiques).
Les territoires offrent une richesse de services de qualité mais travaillent sans beaucoup communiquer. Le système de santé est aujourd’hui centré sur les épisodes aigus alors que 70% des budgets sont consacrés à la maladie chronique. Le territoire est organisé autour des canaux de financement ou des dispositifs plutôt qu’autour de l’usager. L’intégration des différents niveaux de soins (sanitaire, médico-social et social) et l’ouverture de la santé vers le territoire permettraient alors d’utiliser le parcours le plus adapté pour le patient, d’éviter les ruptures dans le parcours et d’économiser les ressources publiques qui pourraient être mieux investies. Il faut mettre le patient au cœur du système, intégrer les réseaux sanitaires, sociaux et médico-sociaux, pour adopter un parcours de vie avec une approche holistique et éviter que le patient soit l’intégrateur du système. La mise en place d’une plateforme permettrait intégrer les différents réseaux et construire des véritables parcours de vie centrés sur le patient en respectant et en valorisant le travail des professionnels.
Une coordination de soins pour un gain de temps et d’argent
Pourtant, dans l’agglomération de Bologne en Italie (un million d’habitants avec plus de 100.000 dossiers usager et 150.000 dossiers ville-hôpital), les CCAS (Centre communal d’action sociale) et les départements économisent 57% de leur temps. Les onze hôpitaux sont intégrés avec le territoire (tous les SSR, les soixante communes, SSIAD, SAAD, EHPAD) : les ruptures dans les parcours de sortie ont été éliminées et le temps d’attente a été réduit à deux jours pour la sortie des hôpitaux vers les SSR pour 57% des patients (3-4 jours pour 87% des patients). Alors pourquoi pas en France ?
Dans les départements français, il y a une véritable rupture de la prise en charge des usagers. Dans une étude de 2016 de Nuance.fr, les professionnels de santé consacrent 40% de leur temps à la documentation médicale, soit plus de quatre heures par jour pour produire, traiter et rechercher les informations médicales. On peut compter en moyenne 20 logiciels différents sans véritable lien ni communication entre les différents professionnels que ce soit le médecin traitant, l’assistante sociale ou encore le psychologue dans les CSAS, les Services Départementaux, les Réseaux de Santé, et les CLIC.
Ainsi l’idée serait de favoriser la synergie des connaissances des équipes pluridisciplinaires sur le terrain, avec les solutions de coordination, de partage, de mutualisation, d’expertise et de dématérialisation, centralisées sur une même plateforme interopérable pour améliorer l’efficience des systèmes de santé. De cette manière, les ressources humaines et économiques en viendront à être optimisées.