Pour la grande distribution, perdre le combat de l’alimentaire, ce sera définitivement perdre la guerre ! A l’image de ce qu’ont réussi Amazon et Alibaba dans le non-alimentaire, les acteurs de la distribution alimentaire cette fois ne veulent pas rater le coche de l’omni-canal et signent de nombreux partenariats stratégiques… au grand bonheur des géants de la tech. Tour d’horizon.
| A lire aussi : Alliancy lance un appel à contributions pour intervenir dans notre hors-série rédactionnel « Innover dans le retail », à paraître fin avril 2019.
Article mis à jour le 5 septembre 2018.
©OlivierVigerie/Carrefour
Le 11 juin, Carrefour a annoncé son alliance avec Google (également allié de Walmart aux Etats-Unis pour contrer Amazon) en vue de développer de nouveaux modèles de distribution et de nouvelles expériences d'achat pour les consommateurs français, notamment basés sur la voix. Ce partenariat prévoit le déploiement de l'offre du Français sur une nouvelle interface du site de Google Shopping et sur l'Assistant Google en France à partir de début 2019 ; la création d'un « Lab Carrefour-Google » pour imaginer de nouvelles expériences consommateurs avec de l’IA notamment, et l'accélération de la digitalisation du groupe Carrefour avec la formation de 1 000 collaborateurs de Carrefour. Le distributeur est le premier dans l’Hexagone à s’allier à Google (depuis Leclerc l’a fait également) qui, de son côté, s’associe pour la première fois à un retailer sur le frais. Pour rappel, Carrefour, dans son dernier plan stratégique, table sur un investissement massif dans le digital, à hauteur de 2,8 milliards d’euros d’ici à 2022, avec notamment le lancement dès cette année d’une plate-forme marchande unique en France (Carrefour.fr). Le groupe vise 5 milliards d’euros de ventes dans l’e-commerce alimentaire d’ici 2022.
Dans le groupe français de distribution Casino, les enseignes de la marque haut de gamme Monoprix (entre 5 000 et 10 000 références par magasin) seront disponibles d’ici à la fin de l’année pour les clients de Prime Now, le service de livraison rapide d’Amazon (via l’application et sur le site web du service par l’intermédiaire d’un magasin virtuel dédié). Si les analystes saluent l’accord (certains tablent même sur une vente de Monoprix au géant américain), d’autres hurlent au loup dans la bergerie… Affaire à suivre donc pour cette alliance entre un distributeur alimentaire et un géant de la technologie. Monoprix, qui avait déjà signé en novembre 2017 un partenariat avec le britannique Ocado, fait clairement ici un choix « multiplateformes ». De son côté, Amazon apprendra tout ce dont il a besoin pour entrer sur le marché... « Grâce à cet accord unique, le Groupe Casino renforce sa stratégie de distribution omnicanal », a déclaré Jean-Charles Naouri, son directeur général, dans le communiqué.
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Si Amazon continue d’étendre son empire, certains ont bien l’intention de réagir, comme le leader japonais de l’e-commerce Rakuten (PriceMinister en France) et le géant américain de la distribution Wallmart qui annoncent une coopération dans les liseuses et la livraison de denrées alimentaires. Ensemble, ils veulent bâtir un e-commerçant alimentaire de poids au Japon autour de la chaîne de supermarchés Seiyu GK, propriété du géant de Bentonville, et l’une des premières dans le pays. Dans la société commune qu’ils créeront courant du second semestre 2018, le numéro 1 mondial de la distribution s’appropriera notamment l’expertise de Rakuten dans l'intelligence artificielle pour personnaliser les demandes des consommateurs afin de mieux contrer Amazon. Pour les mêmes raisons, il s’était déjà allié avec Google dans le commerce en ligne en septembre 2017. En juin 2018, le groupe a aussi annoncé en France deux partenariats, avec Boulanger sur des produits neufs et avec Easycash sur les biens d'occasion dans l’idée d’installer un Click&Collect pointant vers chacun de ses magasins franchisés.
Après Monoprix ou Auchan, c’est E. Leclerc qui lance son assistant vocal « mémo courses » avec Google Home. Objectif : permettre aux clients de l’enseigne d’ajouter des produits simplement à leur liste de courses, et de retrouver celle-ci sur leur site leclerc.drive.
Pour démarrer son mémo course, l'utilisateur titulaire d'un compte E.Leclerc doit simplement prononcer les mots suivants : « OK Google ! Je veux parler à E. Leclerc », en s'adressant à une enceinte Google Home ou à l'application Google Assistant, disponible sur smartphone (sans besoin de télécharger l’application vocale de Leclerc). Il peut dès lors dicter à l'assistant vocal les produits dont il a besoin (tomates, dentifrice, eau…) et ceux-ci sont automatiquement ajoutés à son Mémo Courses.
Cette solution est une première pierre à l'édifice du commerce que veut mettre en place le distributeur autour de la voix, prochaine étape de la révolution numérique selon le communiqué. Ainsi, l'enseigne teste et envisage déjà d’autres évolutions pour son assistant vocal. Prochaine étape : la constitution de son panier « Drive E. Leclerc » par la voix sera proposé sur Google Home début 2019. Les produits édictés par le consommateur seront transformés en références produits, sur la base de son historique d'achat s’il existe.
Alors, « E. Leclerc n'ouvre-t-il pas la boîte de Pandore ?, écrit Michel-Edouard Leclerc sur son blog. Google va-t-il savoir ce que je commande ? »... Et de répondre : « Il n'y a pas d'échange de datas entre Google et Leclerc. Seule notre enseigne saura ce que vous voulez commander. »
Les magasins Fnac-Darty et leurs sites web se sont dotés d’espaces dédiés à l'Assistant Google et son écosystème. En échange, l’entreprise de la Silicon Valley propose le « Bouton Darty » sur son outil d’assistance vocale et accorde aux deux marques des opérations promotionnelles lors des lancements à venir. Cette alliance permet au groupe français de s’engager dans le commerce vocal et d’offrir la possibilité à ses clients de choisir leurs produits via l’application de l'Assistant Google avant de les payer avec leur compte magasin. Le groupe est l'un des premiers partenaires du géant américain pour le déploiement de la fonction permettant les transactions avec l'Assistant Google. Fnac-Darty a par ailleurs noué l’année dernière un partenariat avec Carrefour sur la vente de produits électroniques, leur permettant notamment de négocier ensemble avec les différents fournisseurs.
En novembre 2017, coup de tonnerre : le géant de l’e-commerce chinois Alibaba monte au capital du retailer chinois Sun Art à hauteur de 36,16 % soit presqu’autant que les parts détenus par Auchan. Le groupe nordiste peut alors capitaliser sur cette nouvelle alliance de taille, afin de chercher à répondre aux éternelles problématiques de transformation omni-canal du commerce. Ainsi, dès 2018, les premières expérimentations pour une meilleure convergence « phygitale » sont annoncées : les clients d’Alibaba, qui utilisent l’application d’échanges entre particuliers Taobao pourront dorénavant détecter et être livrés par les hypermarchés situés à moins de 3 km de chez eux. Dans l’analyse d’Auchan, ce rayon représente 600 millions de clients potentiels supplémentaires. En parallèle, le groupe français prévoit le déploiement rapide d’offres de livraison de produits frais en moins d’une heure, mais aussi le renforcement d’Auchan Minute, ses mini-points de vente totalement automatisés.
Leroy Merlin, Auchan Retail et Boulanger veulent peser dans la domotique. Les trois enseignes, membres du groupe Mulliez, se sont alliés pour mettre en avant dans leurs 927 points de vente l’application et la box Enki, créée en avril 2017 par Leroy Merlin et destinée à la gestion des objets connectés dans la maison. Des équipements de marques et de protocoles différents pourront fonctionner ensemble selon différents scénarii établis par l’habitant. Enki regroupe actuellement 137 produits de 20 marques – des ampoules Philips aux stores électriques Somfy – et prévoit d’agréger 200 références issues de 35 marques d’ici à la fin de l’année. Les trois partenaires ont constitué une équipe commune de 60 personnes et envisagent d’ouvrir Enki à d’autres secteurs, comme la santé et l’alimentaire, et de proposer de nouveaux services digitaux, tels que le gardiennage ou la connexion des objets aux sites de vente en ligne des enseignes pour renouveler les consommables (ampoules, lessive ou sac d’aspirateur) afin de se rapprocher des consommateurs. Par cette alliance, ils comptent aussi se positionner face à Google et ses assistants intelligents...
On disait Carrefour prêt à quitter la Chine, après trois ans de recul des ventes de ses 500 magasins dans l’Empire du milieu. Le groupe, dirigé depuis l’été 2017 par Alexandre Bompard, a finalement décidé de prendre à revers les prévisions : le nouveau plan stratégique dévoilé en 2018 inclut une alliance avec Tencent, champion chinois des services internet, mobiles et des réseaux sociaux (WeChat). L’alliance intègre également Yonghui une chaîne chinoise de 300 supermarchés. Elle prévoit le partage et l’analyse de données, un travail sur la digitalisation des points de vente ou encore une accélération sur le paiement mobile. Tencent, très présent dans le commerce en ligne, se renforce ainsi dans le commerce physique. Carrefour se voit pour sa part mieux équipé pour faire face à l’autre grande alliance du secteur : celle regroupant le leader de l’e-commerce Alibaba, le retailer chinois Sun Art et… Auchan. L’alliance compte avancer vite, elle a déjà d’annoncé l’ouverture du premier store high tech « Carrefour-Le Marché » à Shanghai (d’autres suivront). Outre via des caisses classiques, on peut y effectuer le paiement par reconnaissance faciale ou en scannant directement via le mini-programme Carrefour dans WeChat, le réseau social le plus populaire en Chine.
En novembre 2017, coup de tonnerre : le géant de l’e-commerce chinois Alibaba monte au capital du retailer chinois Sun Art à hauteur de 36,16 % soit presqu’autant que les parts détenus par Auchan. Le groupe nordiste peut alors capitaliser sur cette nouvelle alliance de taille, afin de chercher à répondre aux éternelles problématiques de transformation omni-canal du commerce. Ainsi, dès 2018, les premières expérimentations pour une meilleure convergence « phygitale » sont annoncées : les clients d’Alibaba, qui utilisent l’application d’échanges entre particuliers Taobao pourront dorénavant détecter et être livrés par les hypermarchés situés à moins de 3 km de chez eux. Dans l’analyse d’Auchan, ce rayon représente 600 millions de clients potentiels supplémentaires. En parallèle, le groupe français prévoit le déploiement rapide d’offres de livraison de produits frais en moins d’une heure, mais aussi le renforcement d’Auchan Minute, ses mini-points de vente totalement automatisés.
Après le groupe Casino et Conforama, après Auchan et Boulanger, c’est à Carrefour et au groupe Fnac-Darty de nouer une alliance dans le non-alimentaire. Ensemble, ils annoncent la signature d'un accord de partenariat portant sur une coopération à l'achat sur les produits électroménagers et électroniques grand public en France. Leur objectif est de pouvoir négocier sur des volumes plus importants d’achat afin de faire baisser les prix et d’être finalement plus compétitifs pour leurs clients respectifs. Carrefour réfléchirait même à confier certains espaces photo/ciné/son au groupe spécialisé... qui serait de fait plus à même de conseiller les clients sur ces catégories de produits de plus en plus techniques. Plus récemment, Fnac-Darty et le groupe allemand Media Markt (magasins Saturn) ont aussi annoncé avoir noué une alliance stratégique européenne, centrée sur les achats, les relations avec leurs fournisseurs et l'innovation…
Auchan Retail, groupe Casino, Metro et le groupe Schiever ont annoncé leur coopération en matière d’achats en France et à l’international. L’ensemble des centrales ainsi créées (appelé Horizon) formera la première centrale d’achats de France et la deuxième centrale d’achats la plus importante au monde derrière celle de l’américain Walmart. Horizon devrait disposer d’une structure opérationnelle pour les négociations annuelles 2019.
En France, Horizon interviendra dans trois domaines : les achats avec les grands fournisseurs de marques nationales ; les appels d’offres pour leurs frais généraux et leurs marques de distributeurs basiques non différenciantes ; et le développement de filières communes avec le monde agricole dans la droite ligne des engagements pris lors des Etats Généraux de l’Alimentation.
De son côté, Carrefour vient de finaliser son rapprochement avec son homologue britannique Tesco, N°1 outre-Manche. Opérationnel en octobre, cet accord couvrira les relations stratégiques avec les fournisseurs et l'achat en commun pour leurs produits de marques propres et de biens non marchands.
En juin, le groupe britannique a dévoilé un partenariat stratégique avec Microsoft. Ses magasins intègreront désormais les technologies d'intelligence artificielle développées par la firme de Redmond. « Nous voulons être à l'avant-garde de l'expérience client en utilisant la puissance de la technologie. Travailler avec Microsoft pour comprendre tout le potentiel de la technologie et de l'intelligence artificielle pour améliorer l'expérience en magasin pour nos clients et l'efficacité de nos opérations plus larges pourrait changer la donne pour M&S - et pour la distribution », a déclaré Steve Rowe, PDG de l’enseigne.
Le distributeur britannique vient également d’annoncer la création d'une coentreprise avec Founders Factory en vue d’investir et développer des start-up dans son domaine. Partenaire exclusif de Founders Factory au Royaume-Uni, Marks & Spencer sera actionnaire majoritaire de la coentreprise, sachant que le digital sera au coeur de leurs décisions d’investir ou non dans de jeunes pousses prometteuses.
L'union entre le spécialiste de la vente de chaussures en ligne Sarenza et Monoprix permettra une complémentarité en termes d'offres. De même, pour Spartoo qui vient de racheter André. D’un côté comme de l’autre, la vente en ligne boostera le trafic en magasins… Une façon de faciliter la vie des clients et de donner plus de visibilité à leurs offres respectives. « Nous allons digitaliser les points de vente avec des tablettes numériques pour permettre au vendeur d’aider le client à trouver une taille ou une marque sur Spartoo, puis de se faire livrer à domicile ou en magasin André. Enfin, nous investirons dans la qualité des produits et dans le réseau informatique, et nous moderniserons une cinquantaine de boutiques durant les cinq prochaines années », reconnaissait récemment Boris Saragaglia, P-DG du leader européen de la vente de chaussures en ligne, basé à Grenoble (Isère) dans le Dauphiné Libéré.
De son côté, Monoprix veut passer, grâce à l’acquisition de Sarenza, de 2 % de son chiffre d'affaires mode/beauté/maison réalisé en ligne, à entre 10 et 15 %. Pour Stéphane Treppoz, patron de Sarenza, « L'avenir est aux acteurs qui ont des offres larges et qui sont capables de faire de l'omni-canal ». Dans les faits, les clients des enseignes pourront acheter sur le site de l'une et de l'autre les produits des deux et être livrés soit en magasin, soit à domicile. Dans la même veine, Carrefour et Showroomprivé (deuxième acteur européen de la vente privée en ligne) ont annoncé un accord stratégique, portant sur l’acquisition par le 1er d’environ 17 % du capital de Showroomprivé auprès de Conforama (groupe Steinhoff), en vue de développer une offre omni-canal, couvrant des aspects commerciaux, marketing, logistiques et data.