La filiale de la Caisse des Dépôts, qui assure la conservation de documents électroniques à valeur probatoire afin de permettre aux organisations publiques et privées, de faire face à leurs obligations, dépassera les 2 milliards d’archives en cette fin d’année. Des résultats qui confortent sa position de leader sur ce marché. Entretien avec Charles du Boullay, son président.
Alliancy. Où en est CDC Arkhinéo depuis sa création en 2001 ?
Charles du Boullay. CDC Arkhinéo, tiers de confiance archiveur et filiale à 100 % de la Caisse des dépôts, termine l’année 2018 en ayant dépassé les 2 milliards de documents archivés sur sa plateforme pour des entreprises publiques comme privées [banque, assurance, distribution, électronique, audiovisuel, aéronautique, automobile, etc. NDLR]. La société franchit également le cap du Peta-octet (1 million de Go) de documents confiés. Mais il aura fallu du chemin avant d’arriver à ces chiffres car la signature électronique était compliquée à utiliser. Depuis, il y a eu des collectivités et des prestataires audacieux… Tout a évolué, y compris autour de l’archivage de ces documents. Ainsi, notre croissance démontre à quel point l’archivage électronique est reconnu aujourd’hui comme faisant partie intégrante de la stratégie de transformation numérique de nos clients. C’est pourquoi nous espérons atteindre les 5 milliards d’archives en 2020.
Au départ, quelles étaient les ambitions de CDC Arkhinéo ?
Charles du Boullay. Il y en a trois qui perdurent : la durée de conservation (le prestataire s’engage comme pour le papier) ; l’intégrité du document (avec l’assurance de disposer du document d’origine avec ses éléments de preuve récupérables) et, enfin, la disponibilité en ligne de l’information en temps réel, car l’un des grands enjeux de la dématérialisation, c’est le partage de l’information.
Et vous archivez tous types de documents ?
Charles du Boullay. Ce sont en effet des archives variées, comme des bulletins de salaires, des factures, des contrats de vente de services/produits, des contrats de travail, des souscriptions de produits d’épargne, des enregistrements de conversations téléphoniques, des états comptables, des contrats de crédit à la consommation, des documents soumis au contrôle de légalité, des marchés publics, etc.
Quelles sont vos relations avec les collectivités territoriales ?
Charles du Boullay. L’archivage arrive en bout de chaîne dans un processus de dématérialisation. Auparavant, il y a des applications métiers (RH, comptabilité, contrôle de légalité, signature en ligne…) qui permettent cette dématérialisation fournies par divers prestataires. Ce sont donc eux nos interlocuteurs directs à qui l’on permet de proposer la fonction d’archivage aux collectivités et aux entreprises en plus de leurs solutions. Aujourd’hui, tous ces processus se déploient en mode SaaS dans 99 % des cas, hors la défense par exemple et quelques rares autres cas.
Quels sont les flux concernés ?
Charles du Boullay. En ce qui concerne le fonctionnement interne des collectivités, le premier flux que les collectivités ont commencé à dématérialiser a été autour du contrôle de légalité, soit la capacité à rendre dématérialiser le compte-rendu d’un conseil municipal par exemple. Le deuxième flux le plus important concerne la comptabilité publique avec Hélios, qui impose de ne plus envoyer de papier à Bercy. Sur ces deux flux, il n’y a plus de chemin à parcourir, c’est fait à 99 %.
Ensuite, il faut le dire, on ne dématérialise pas pour une problématique de développement durable, même si cela peut être pris en compte évidemment, mais d’abord pour des gains de productivité. Concernant les autres flux concernés par la dématérialisation, il y a également tout ce qui touche à la convocation aux assemblées des différents conseils. Là, le chemin à parcourir est encore long pour différentes raisons, de coût, de facilité d’usage…. Et si c’est fait, ce n’est pas toujours conforme aux exigences de la loi. Il reste aussi beaucoup d’effort à faire sur la vie de la collectivité, comme avec le parapheur électronique par exemple ou sur les sujets de la mobilité des élus…
De quoi dépend la vitesse de dématérialisation dans les collectivités ?
Charles du Boullay. D’abord, de la volonté du maire, de son adjoint ou de certains élus car il faut clairement un porteur de projet. Ensuite, vient la taille de la collectivité. Plus elle est grosse, plus la problématique de la gestion du papier pèse lourd et a un impact sur son budget… La collectivité, en fonction de sa taille, aura également davantage de moyens pour dématérialiser, avec des équipes dédiées qui porteront cette politique du changement. Le troisième critère, mais au final, on peut les mettre tous au même niveau, c’est l’ergonomie des solutions et leur coût. Il faut que ce soit facile à utiliser, c’est ce qui a pu poser problème par le passé. Aujourd’hui, elles le sont. Tout cela conduit à produire des documents numériques à valeur probatoire qu’il faut conserver sur le long terme et c’est là où CDC Arkhinéo joue un rôle en assurant à ses clients d’être totalement conformes aux exigences de droit public ou de droit privé en cas de litiges.
Et en ce qui concerne le fonctionnement externe des collectivités, où en est-on ?
Charles du Boullay. En effet, nous avons longuement évoqué les flux internes, mais là où les flux sont les plus conséquents c’est dans la relation avec le citoyen, sur la dématérialisation des démarches administratives que l’on peut commencer à faire. Et dans ce domaine, si l’administration centrale a bien avancé sur ce sujet comme avec les impôts par exemple, dans les collectivités, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir, même si on peut citer de nombreux exemples réalisés ou en cours dans quelques grandes collectivités.
Suite à la loi de mars 2000 sur l’écrit numérique, la Caisse des Dépôts a créé CDC Arkhinéo afin d’investir dans l’archivage électronique à valeur probante.
Sur ces sujets, à quel niveau de la collectivité, la dématérialisation se met-elle en place ?
Charles du Boullay. Cela marche si la dématérialisation est portée par un gros porte-avion. Ce sont des projets complexes, lourds, économiquement difficiles à porter pour une petite collectivité. Il faut une taille critique pour avancer, soit au niveau d’un groupement de communes, d’un département ou d’une région. Par exemple, dans les transports, tout l’enjeu est que ce soit interopérable d’une collectivité à l’autre… Il faut donc mutualiser et surtout ne pas brider.
Peut-on dire toutefois que cela avance dans le bon sens ?
Charles du Boullay. Oui, cela décolle. Réellement ! Mais reste à trouver encore le modèle économique. Certes, les services apportés au citoyen doivent être gratuits et ont une vraie utilité, mais ils ont aussi un coût…
Comment voyez-vous le développement de ces services au citoyen aujourd’hui ?
Charles du Boullay. Je ne crois pas à un site unique. La collectivité doit mettre en place différentes applications verticalisées, du type « mes services administratifs », « mes transports », « ma vie locale »… pour plus d’efficacité. Ceci permet à la fois d’avancer de façon plus mesurée, mais aussi de mieux répondre aux différentes problématiques en fonction des catégories de population concernées.
Les communes ont-elles compris que la dématérialisation peut être itérative ?
Charles du Boullay. Elles l’ont compris ! Mais ce qui est difficile, c’est le nombre de communes impliquées. La France en compte 36 000… Il ne faut pas l’oublier. Aller convaincre des collectivités qui ont déjà fait cet effort de dématérialisation qu’il faut aujourd’hui adopter la nouvelle solution mise en place par l’agglomération, le département ou autre… C’est difficile. Pour qu’il y ait du succès, il faut tenir compte de cela. Les porteurs de projet à tous les niveaux doivent absolument regarder ce qui a pu être fait dans leur environnement proche, voir si cela marche bien, très bien ou pas… et en tirer les conclusions. Peut-être qu’il faut capitaliser sur ce qui existe déjà et le déployer plus largement… En tout cas, il faut avancer avec ceux qui ont déjà fait des efforts pour ne frustrer personne, mais surtout tirer avantage des retours d’expérience. Il ne faut surtout pas imposer des solutions…
La connaissance sur tous ces sujets existe-t-elle ?
Charles du Boullay. Oui, évidemment dans les grosses collectivités. Dans les petites aussi, car l’information est accessible. Mais ces projets sont souvent trop complexes par rapport aux moyens dont disposent les petites collectivités. Il faut absolument la capacité à rendre les services intercommunaux. Ce n’est pas possible d’avoir une appli transport par exemple qui ne concerne que votre commune… C’est a minima intercommunal, voire régional.
Ce qu’impose la loi…
Depuis le 1er octobre 2018, les marchés publics ont l’obligation de dématérialiser leurs échanges, notamment avec le profil acheteur qui centralise tous les outils nécessaires à la dématérialisation de la procédure marché, la généralisation de la signature électronique et l’obligation pour l’acheteur d’accepter l’e-Document unique de marché européen (e-Dume). La facturation électronique sera quant à elle généralisée en 2020, ce qui représentera un gain de 700 millions d’euros.
La solution d’archivage en mode SaaS proposée par CDC Arkhinéo est certifiée Afnor NF 461, ISO 27001, label France Cybersecurity, agréée par le SIAF et le Ministère de la Santé et doublement qualifiée eIDAS pour la validation et la préservation des signatures et cachets électroniques.