La responsable Marché ioT Solutions et ioT Place chez SFR Business, Elisabeth Nguyen, revient pour Alliancy sur la nécessité pour les entreprises d’initier une stratégie IoT, en profitant de la disponibilité sur le marché de solutions simples et rapides à mettre en œuvre, pour ensuite d’imaginer des déploiements plus importants.
Alliancy. Pourquoi les entreprises doivent-elles mener une stratégie IOT ?
Elisabeth Nguyen. Le monde change ! Aujourd’hui, tout tourne autour du client et l’IoT, c’est principalement pour une entreprise la possibilité de gagner en agilité et en efficacité. A condition que la donnée récoltée, grâce aux capteurs installés, soit intelligente et porteuse de sens. A partir de là, l’entreprise peut simplifier son quotidien et créer de la valeur pour ses clients en imaginant de nouvelles solutions ou, en interne, en optimisant des processus industriels existants.
Auriez-vous un exemple ?
Elisabeth Nguyen. Une entreprise dispose d’une flotte de camions qui consomment, chaque mois, 10 000 litres de Diesel. C’est un fait. Si l’on peut analyser, grâce aux données remontées via des capteurs installés sur ces véhicules, que les chauffeurs ne consomment pas tous de la même manière sur une même distance par exemple, on peut agir et faire baisser la facture en les formant à une meilleure conduite.
Au vu de cet exemple, on ne peut donc pas imaginer dissocier IoT et data…
Elisabeth Nguyen. Exactement ! Seule la collecte de la donnée dans la chaîne de valeur peut ouvrir des perspectives à l’entreprise. Mais reste à savoir l’analyser et quoi en faire… et là on touche au domaine du big data. Aujourd’hui encore, les filières IoT et Big Data dans l’entreprise ne sont pas pilotées par les mêmes directions. Les projets Iot sont souvent menés par les directions métiers, indépendamment de la DSI. Mais, il est évident qu’à terme, les domaines comme le big data ou la blockchain appliqués à l’IoT auront besoin de l’expertise technique apportés par la DSI… Cette dernière reprendra alors la main sur ces projets métiers permettant un développement « viral » au sein de l’entreprise.
Pourrait-on dire que cette technologie est réservée aux grandes entreprises ?
Elisabeth Nguyen. Pas du tout. Toutes les entreprises, de la TPE au grand groupe, sont concernées par la mise en place de solutions IoT, dans des domaines aussi divers que la logistique, la santé, les transports, la gestion de l’énergie… Il est clair toutefois que les grands groupes en sont très friands, car ce sont eux qui disposent d’un grand nombre d’objets à connecter. IDC a, par exemple, montré que les entreprises jusqu’à 200 salariés comptent environ un parc moyen de 4 000 objets connectés, tandis qu’une entreprise de 1 000 salariés en dénombre 11 000… On voit donc que plus l’entreprise est de taille, plus le volume suit. Il y a ensuite des secteurs qui tirent l’IoT, parce qu’il y a une volonté politique. C’est le cas de l’eCall par exemple au niveau européen [bouton d’appel d’urgence en cas d’accident, obligatoire dans tous les nouveaux modèles de voitures et de fourgonnettes depuis le 31 mars 2018, NDLR].
Justement, quels sont les principaux champs d’applications de l’IoT que vous voyez chez vos clients ?
Elisabeth Nguyen. Ils sont très nombreux notamment pour géolocaliser des actifs matériels (engins, autobus, remorques, bennes, containers, gros outillage…) et mesurer leur taux d’utilisation pour un meilleur suivi, mais aussi pour anticiper de futurs investissements. Les loueurs en tous genres de matériels et les entreprises avec des flottes de véhicules en sont de grands utilisateurs, comme les fournisseurs d’énergie.
L’IoT permet également de disposer d’informations sur l’usage qui est fait de véhicules connectés (ambulances, camions de livraison…) ; ou pour protéger les travailleurs isolés en détectant les chutes de personnes sur un chantier par exemple, ou pour répondre aux contraintes liés à la loi de transition énergétique… Ou, encore, dans la ville, pour gérer des places de parking ou l’éclairage…
La « ville intelligente » grâce à l’IoT, est-ce déjà une réalité ?
Elisabeth Nguyen. Dans les villes, tout a commencé par les parkings publics ou privés, avec la surveillance des places libres ou occupées, pour une meilleure fluidité des véhicules, mais aussi pour mieux organiser le service public du stationnement (loi MAPTAM). Aujourd’hui, on voit aussi beaucoup d’applications se déployer pour une meilleure maîtrise énergétique, autour de l’éclairage public, des bâtiments administratifs ou des équipements collectifs… Au-delà du secteur public, le monde agricole s’y est mis également : un fabricant de tracteurs remonte des informations sur ces matériels pour de la maintenance prédictive, mais demain il pourra revendre ses données sur l’utilisation qui en est faite…
Pour autant, on ne va pas pouvoir mettre des capteurs partout…
Elisabeth Nguyen. Cette effervescence est réelle, mais il n’y a pas autant de projets massifs que l’on croit. Les entreprises commencent par faire un POC [proof of concept], puis étendent le concept dans un secteur, ou une région et, ensuite, entrent dans une phase d’analyse autour du TCO, du retour sur investissement, des impacts humains… Mais, si un développement massif est envisagé, il s’agit alors de mener un projet avec ses contraintes en termes de délai, de coût et de gestion des changements. La DSI doit entrer dans le jeu et s’approprier ce type de projets en y ajoutant du big data et des notions de sécurité. A date, on constate, que les gros volumes sont générés par la demande du marché ou suite à des contraintes législatives, comme on le voit au niveau des véhicules ou des compteurs intelligents (eau, énergie…).
Comment une entreprise choisit-elle sa solution ?
Elisabeth Nguyen. Tout va dépendre si l’entreprise veut du clé-en-main ou des briques à assembler… La TPE-PME choisira la première option qui lui permettra de faire des tests et de commencer rapidement… Pour les entreprises plus importantes, après une première expérience réussie, elle élargira avec du sur-mesure. Les grands groupes également testent beaucoup de solutions d’abord standards pour aller vite, avant de devenir des assembleurs de solutions.
A partir de ce moment-là, tout devient plus complexe et ce n’est plus si évident… Autour d’un projet IoT, l’entreprise devra assembler des compétences en capteurs, réseaux, plateforme de récolte des données, stockage et analyse… Cette démarche projet se fait alors avec la DSI sur un temps beaucoup plus long, qui n’est plus du tout la temporalité des directions métiers tournées vers le client. Un projet IoT global devient une décision stratégique pour l’ensemble de l’entreprise, sous l’impulsion de la direction générale.
Selon les cas, quelles solutions sont proposées par SFR ?
Elisabeth Nguyen. SFR est présent sur toute la chaîne de valeur d’un projet IoT, que ce soit au niveau connectivité (réseau 2G/3G/4G et, bientôt, NB-IoT) ; au niveau solutions IoT complètes clés en main (location flotte de véhicule, d’asset, DATI, gestion parking, Optimisation énergétique) ou bien au niveau Cloud et plateforme Iot. Nous avons également un accord avec ThingWorx. Cette plateforme IoT, souvent notée comme la meilleure du marché, est conçue pour créer plus rapidement des applications IoT. Elle est surtout adaptée à un nombre important d’objets à connecter, car on ne gère pas de la même façon des centaines d’objets comme on peut en traiter des milliers, voire des millions.
Ainsi, quel que soit le protocole de connectivité choisi (réseaux SFR, Sigfox, Wifi, LoRa, Bluetooth, Protocole MQTT, MBUS ou le Nb-IoT) et le type de données transmises [remontée de températures, de vibration, de pollution, de géolocalisation, etc.], notre solution IoT Place collecte toutes les données et permet de les restituer dans une application adaptée au métier de l’entreprise. Toutes ces données (objets, capteurs, cartes SIM…) peuvent ensuite être stockées dans le Cloud SFR en France, mais également dans tout autre environnement informatique si l’entreprise le souhaite.
On parle beaucoup de propagation de malware via l’IOT. Comment traitez-vous cette question ?
Elisabeth Nguyen. La GSM Association a publié des lignes directrices et des recommandations que nous suivons et allons même au-delà sur la partie opérateur réseau. Pour autant, tout n’est pas réglé au niveau de la sécurité, qui doit se regarder au niveau de chacun des maillons de la chaîne de valeur, et surtout pour de grands volumes d’objets. Dans l’avenir, La Blockchain pourrait être une solution pour mieux sécuriser les projets IoT, son organisation décentralisée et sans intermédiaire pouvant permettre à un objet de communiquer avec un autre objet permettant ainsi une prise de décision autonome… Le critère « sécurité » d’un projet IoT est important, et peut ralentir – voire freiner – le déploiement de projets à grande échelle.