Alexandre Lazarègue, avocat spécialisé en droit du numérique et droit de la presse, revient sur le rôle des réseaux sociaux dans l’incitation à la haine, ayant conduit à l’acte terroriste envers Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie au collège du Bois d’Aulne, à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines). Quelles sont les solutions pour réguler les propos ?
Les réseaux sociaux ont joué un rôle majeur pour propager la haine et conduire au crime terroriste de l’enseignant de Conflans-Sainte-Honorine. La législation a considéré jusqu’à présent les plateformes numériques comme des « prestataires d’hébergement » qui ne peuvent voir leur responsabilité civile engagée du fait des informations qu’ils stockent.
Ils sont seulement contraints de supprimer les messages illicites dans les meilleurs délais dès lors que cela leur a été notifié par les internautes. Le projet de loi « AVIA » de lutte contre les propos haineux proposait de contraindre les plateformes à retirer tous contenus incitant à la haine dans les 24 heures à compter de leur notification. Elle imposait un délai de retrait d’1h pour les contenus pédopornographiques et d’incitation au terrorisme. La loi prévoyait une amende de 250 000 euros en l’absence de suppression.
Les réseaux sociaux étaient chargés d’apprécier eux-mêmes, par une analyse proportionnée, si un propos relevait manifestement d’un message de haine et le cas échéant de le supprimer. Le Conseil constitutionnel a censuré ces dispositions, estimant qu’elles portaient atteinte à l’exercice de la liberté d’expression.
Quelles solutions pour réguler les propos sur les réseaux sociaux ?
Le Gouvernement a indiqué réfléchir à des mesures urgentes pour réguler les messages de haine diffusés sur les réseaux sociaux. Assurément les plateformes numériques doivent être considérés comme de véritables directeurs de publication. Il convient de leur donner les moyens de surveiller, contrôle et les cas échéant supprimer rapidement les messages susceptibles d’inciter à la haine et le cas échéant susciter des passages à l’acte. Des recours doivent être rendus possibles pour que les auteurs des messages puissent contester les décisions de suppression par un médiateur rapide et en ligne.
Si l’anonymat doit pouvoir subsister, les réseaux sociaux doivent être en mesure de connaitre l’identité des auteurs diffusant des messages sur leurs plateformes. La loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 rédigée pour réguler les propos politiques dans la presse papier au XIX e siècle doit être réformée. La rigueur de la procédure de mise en œuvre n’est plus adaptée aux modes de communication sur internet.