La Data est un enjeu important pour la moitié des grandes entreprises, dont près de 90 % recrutent et forment en interne sur ces compétences. Toutefois, la concurrence est rude et les employeurs soulignent des carences sur les Soft skills et la compréhension métier.
En août 2020, le Gouvernement lançait la mission numérique des grands groupes. Celle-ci porte notamment sur l’exploitation de l’intelligence artificielle et des données, un chantier co-piloté par le CDO de La Redoute, Samir Amellal.
« Nous sommes très souvent confrontés aux mêmes problèmes, de dette technique, fonctionnels et culturels, notamment », confiait-il récemment à Alliancy. Et aux freins culturels s’ajoute celui du recrutement, comme le souligne une étude Kantar/Essec Business School pour la Mission Numérique.
Les grands groupes sont en concurrence frontale pour attirer ces talents de la Data et mener leurs projets. Ils sont en effet 50% à juger la donnée comme « très importante », voire centrale dans leur activité (9%). Cela se traduit pour 44% d’entre eux par la création d’une entité spécifique réunissant les équipes de Data.
Ces entreprises comptent donc dans leurs rangs des profils désormais bien connus comme ceux de Data Scientist, Data Engineer et de Data Protection Officer. Ces métiers et leurs compétences, ne suffisent cependant pas à répondre pleinement aux attentes consistant à apporter de la valeur aux métiers.
« Ces dénominations ne prennent pas en compte l’aspect le plus important: le centrage sur le business. En l’état, elles ne centrent que sur la data ! », déclare pour l’illustrer un décideur interrogé par Kantar.
Au cours des trois dernières années, les grandes entreprises ont pourtant multiplié les recrutements. Elles sont 91% à avoir procéder à des recrutements externes sur la période. Ces actions se doublent d’opérations de formation en interne pour 89% d’entre elles.
Les besoins de compétences dans ce domaine restent forts néanmoins. Forts, mais également complexes à définir précisément. 74% des répondants déclarent difficile d’évaluer les besoins de leur entreprise pour les postes dans le domaine de la data. Cela s’explique notamment par la recherche de compétences multiples.
Un manque de sensibilité métier et de Soft Skills
Si les connaissances informatiques et théoriques sont les compétences considérées comme les plus importantes (63%), les soft skills sont également un élément primordial pour la moitié des entreprises sondées – devant la capacité à résoudre des problèmes (44%).
36% plébiscitent en outre des compétences métiers sectorielles, ce qui n’est pas toujours conciliables avec les profils plutôt juniors des experts recrutés (23% des Data Scientists et des Data Engineers). Les employeurs expriment clairement leurs attentes en faveur de spécialistes mieux dotés en termes de soft skills et de sensibilité métier.
« Les profils sont soient très experts dans leur domaine mais sans soft skills et business oriented ou l’inverse, il n’y a pas un bon équilibre », témoigne un répondant. Un second souligne le besoin de disposer de candidat présentant une « Double compétence métier et data science ». Un appel à faire évoluer les cursus de formation ? Ces formations « sont jugées d’un bon niveau et bien adaptées ». Néanmoins, les répondants estiment qu’elles ne sont pas suffisantes pour répondre à leurs besoins et manquent « d’un lien avec le monde de l’entreprise. »
Ces lacunes en termes de compétences ne constituent pas le principal frein à l’embauche aujourd’hui, à savoir le manque de profils (31%). Ces tensions à l’embauche génèrent une inflation salariale. 23% des recruteurs jugent les prétentions salariales des candidats trop importantes. Cette flambée salariale est cependant la résultante de la forte concurrence que se livrent les entreprises.
Et ces tensions ne devraient pas s’atténuer. 76% des entreprises prévoient le recrutement d’ingénieurs Data durant les 12 à 24 prochains mois. Elles sont 70% pour les Data Scientists et 67% pour les architectes Data. Or, elles sont déjà respectivement 68%, 70% et 60% à estimer souvent ou parfois difficiles leurs recrutements.
Enjeu d’avenir : des experts et les métiers réunis autour de la Data
Ces difficultés peuvent s’expliquer par un manque de diversité dans les profils convoités. Les « recrutements s’opèrent quasi systématiquement vers des personnes ayant travaillé ou été formé en France », observe-t-on chez Kantar. Les entreprises vont aussi privilégier les profils expérimentés et très diplômés, Bac+5 et aussi doctorat pour les Data Scientists.
Mais attirer ces talents n’est pas la seule difficulté exprimée par les employeurs, qui pour se doter de compétences Data peuvent accroître leurs efforts de formation. Ainsi, 78% ont mis en place des formations en interne pour faire monter en compétences leurs équipes data. Mais 63% jugent difficile à mener ce volet formation interne (plus même que la rétention des talents à 62%).
Ces formations doivent en particulier être l’opportunité de faire évoluer les compétences de ces experts et de mieux répondre aux enjeux business. La priorité pour les années à venir sera en effet de rapprocher Data et métiers (29%). Mais les entreprises prennent aussi conscience de l’importance de former au-delà des cercles d’experts. Ainsi, 20% soulignent l’importance d’acculturer et former les équipes à la data.
Ce souhait d’un lien plus étroit entre expertise data et compétence métier devra notamment se mettre en œuvre au travers d’une « bonne capacité de communication entre les profils data et non data. » Mais il passe également par une meilleure « capacité des équipes data à faire le lien entre les données et les équipes métier », ainsi qu’une « meilleure appréhension des opportunités liées à la data pour les équipes métier. »