A l’heure du CES de Las Vegas, ces informations éparses glanées au fil de mes lectures dans la presse économique ou numérique montrent, une fois regroupées, la vague de fond qui déferle silencieusement (mais sûrement) dans l’écosystème français d’innovation…
Inauguré fin septembre 2017 sur le plateau de l'Arbois, près d’Aix-en-Provence, The Camp est un lieu d’expérimentation et un campus dédié à l'innovation, qui accompagne autant les start-up que les grands groupes, dans les domaines de l’alimentaire et des transports... L’idée originelle ? Réconcilier le business avec la notion d'impact positif.
Région, métropole, département, CCI… sont ses soutiens publics ; quand à Crédit Agricole, CMA CGM, Accor, SNCF, Cisco, Vinci, Air France ou Accenture… ils font partie des dix-sept investisseurs privés de ce lieu totem. Au total, 21 millions d’euros ont été prêtés à Frédéric Chevalier, initiateur de ce concept inédit, aujourd’hui décédé. Depuis un an, Olivier Mathiot, ex-Rakuten à la barre du paquebot, doit revoir son modèle face à l’érosion de l’état de ses finances (un moratoire sur les dettes vient d’être obtenu)... Et ce même si, en deux ans, The Camp a reçu 30 000 visiteurs et réalisé un chiffre d'affaires de 10 millions d'euros (contre 15 à 20 millions attendus). Sources : Challenges, LSA.
La première promotion de start-up de la structure américaine d’accélération avait été lancée à Paris au printemps 2017 ! C’était alors la grande époque de la « Start-Up Nation ». Depuis, les temps ont changé et les six partenaires engagés (Accor, Air Liquide, Gefco, Groupama, FDJ et Total) dans l’aventure comptent dans quelques mois revoir leur copie une fois le contrat des trois ans achevé.
Techstars cherche donc activement à convaincre d'autres acteurs privés de le rejoindre... et réfléchirait notamment à la possibilité de lancer prochainement un accélérateur dans une verticale donnée avec un ou plusieurs partenaires… Les raisons de cette situation ? La difficulté non seulement à mener des POC « pertinents » avec les start-up, mais aussi à les industrialiser… Un « ROI » jugé faible donc face aux engagements financiers demandés : 500 000 euros par an durant les trois années du contrat... L’accélérateur reste toutefois optimiste au regard des 31 start-up accompagnées, pour un montant total levé de 12 millions d’euros. L’on trouve ainsi parmi les entreprises ayant été accélérées par Techstars : Digital Ocean, SendGrid ou encore PillPack, récemment rachetée par Amazon… Source : Les Echos
Fin juin 2019, Station F, « le plus grand campus du monde de start-up », situé à la halle Freyssinet à Paris 13ème, fêtait ses deux ans d’existence… L’occasion pour Roxane Varza, la directrice de la pépinière d’indiquer alors : « Pour cette deuxième année, 410 jeunes pousses de Station F ont levé 317 millions d'euros au total auprès d'investisseurs. » Pour autant, 33 % de ces entrepreneurs ne se versent aucun salaire et 20 % vivent avec moins de 20 000 euros par an… De quoi rendre difficile l'obtention d'un logement à Paris ! Aussi, pour loger tout ce petit monde de jeunes entrepreneurs et résidents de Station F, Xavier Niel annonçait pour l’occasion l’ouverture de « FlatMates », un projet immobilier situé à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) et imaginé par l’agence d’architecture de Jean-Michel Wilmotte, intégré dans les 250 millions d'euros d'investissements annoncés au départ pour Station F. D’ailleurs, en matière d’immobilier, tout est loin d’être terminé : « Il nous reste encore à construire deux hôtels, un cinq étoiles pour permettre aux investisseurs étrangers notamment de pouvoir rester près de Station F, et une auberge de jeunesse, ainsi qu'une dizaine de commerces », détaillait Xavier Niel, dans un entretien aux Echos. Reste à voir ce qui adviendra de la suite… « Je ne crois plus à l’accélération, estime Marie-Vorgan Le Barzic, CEO du Numa. Quand tu vois Station F, ce sont les Nouvelles Galeries alors même qu’on revient au commerce de proximité… […] Cela fait déjà trois-quatre ans que les meilleur-e-s ne vont pas dans les accélérateurs. » Sources : Le Monde, Les Echos
Finis les programmes d’accélération de start-up pour ce lieu parisien emblématique de la « Start-up Nation », tout autant que sa cofondatrice et CEO Marie-Vorgan Le Barzic … Numa aura ainsi mis près de deux ans a retrouvé une nouvelle raison de vivre, passant de l’entrepreneuriat (son métier d’origine) à la formation. Le tout avec le soutien de la Maif, son actionnaire historique devenu désormais majoritaire au capital. Finies également les aventures internationales. Seul le site de New York subsiste autour des Learning Expeditions, mais devrait lui aussi bientôt se recentrer sur la formation. Mais de quoi ? Numa enseigne aux entreprises comment mener leur transformation numérique avec le meilleur des méthodologies et compétences des start-up. Ces derniers dix-huit mois, la formation est passée de 20 à 75 % du chiffre d’affaires, qui a été multiplié par trois sur cette période avec des clients du service public, du CAC 40 et du Next 40. La structure, qui compte à ce jour une cinquantaine de personnes, commence même à réembaucher. Sources : Les Echos, Maddyness
Lancé fin 2017 par la Société d’économie mixte Semcha, le ThincLab Châlons, fruit d’un partenariat entre l’Université australienne d’Adélaïde et la ville française de Châlons-en-Champagne, devait être un « grand » projet pour redynamiser l’économie de la ville en accompagnant le développement de nombreuses start-up... Deux ans plus tard, on en est loin. Les « pépites » attendues dans les secteurs RH, sécurité ou réalité augmentée manquent à l’appel ou ne s’éternisent pas pour laisser place à d’autres structures loin de l’idée d’origine du ThincLab. Eleanor Asprey, la directrice depuis avril 2018, confirme que c’est un peu compliqué… mais qu’il est encore tôt pour tirer un bilan. Une dizaine de start-up y serait encore incubée à ce jour. Pourtant, l’alliance avec les Australiens s’essouffle… Le business model a du évoluer et les coachs sont désormais français pour la plupart. Reste qu’il faut toujours du temps pour lancer une telle initiative, soutenue dans le cadre du Contrat de redynamisation du site de défense (CRSD), sur un territoire en difficulté… et qu’il n’est jamais trop tard pour pivoter. D’ailleurs, installé au sein du ThincLab, l’Oenotourisme Lab se concrétise. Après l’obtention du label France tourisme lab, la ville de Châlons veut désormais attirer des projets concernant le tourisme du vin. Source : L’Union
L’Europe compte 16 % des licornes mondiales… contre 48 % pour les Etats-Unis et 36 % pour l’Asie. Les difficultés à faire émerger des scale-up avec une valorisation dépassant le milliard se font toujours sentir... Et, si cela arrive, c’est souvent par l’intermédiaire de fonds d’investissement américains. Pour Sébastien Soriano, président de l’Arcep, les Gafam empêchent directement le développement des start-up européennes en « stérilisant l’innovation » et en cannibalisant la concurrence. Pour rappel, voici quelques acquisitions américaines et prises de participation récentes au capital de jeunes pousses européennes : Google entre au capital de Daitaku ; Sonos s’empare du français Snips ; Facebook s’offre le studio de VR Beatgames ; Apple acquiert la britannique Spectral Edge… etc.