Dans le cadre de son projet Sygal, la brigade des sapeurs-pompiers de Paris déploie dans ses services de logistique un logiciel de gestion de maintenance assistée par ordinateur (GMAO) pour gagner en efficacité et permettre aux équipes d’intervention de répondre aux appels d’urgence dans les meilleurs délais.
A 7h45, comme tous les matins, les pompiers se réunissent dans la cour de leur caserne pour la relève de la garde. Lors de l’appel, chacun se voit attribuer une fonction dans la vérification du matériel après les interventions de la nuit. Si un pompier observe un problème, il en réfère immédiatement à son capitaine, qui remonte l’information au centre technique de niveau 1 pour un contrôle élémentaire. En cas d’anomalie sérieuse, le véhicule est transféré au centre technique de niveau 2, à Voluceau, situé dans l’ancien site de l’Otan accolé à l’Inria. Ce schéma de maintenance est minutieusement suivi pour permettre aux équipes d’intervention de partir dans les meilleures conditions.
Pour montrer à la presse européenne ces coulisses peu connues de la logistique de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), une visite a été organisée jeudi 24 mai à la caserne de Nanterre, qui regroupe un centre de secours et un centre technique, ainsi qu’à Voluceau. Plus de 200 pompiers-techniciens œuvrent en interne à la maintenance des infrastructures et du matériel afin que toute intervention puisse s’effectuer en moins de trois minutes. Pour gagner en efficacité, la BSPP met en place le projet Sygal, qui comprend le déploiement de gestion de maintenance assistée par ordinateur (GMAO).
La clé de réussite : avoir une équipe dédiée
Le projet, évalué à plus d’un million d’euros avec la maintenance du logiciel, a débuté en 2013 : « A l’origine, nous voulions un logiciel pour la gestion des stocks en pharmacie. En discutant, nous nous sommes rendus compte que nous avions besoin d’une vision sur l’état du matériel, d’où la GMAO », explique le lieutenant-colonel Ambroise Permalnaïck, chef du bureau maintien en condition opérationnelle et du projet Sygal. Un benchmark a été effectué entre cinq éditeurs, le choix d’Ambroise Permalnaïck et de son équipe s’est porté sur la solution de Carl Software, éditeur de logiciels de GMAO basé près de Lyon et qui vient de rejoindre le groupe Berger-Levrault. « Le projet a été lancé en octobre 2014, il nous a fallu huit mois pour adapter la solution aux besoins et les premiers services ont été équipés en janvier 2016 », raconte Mikaël Arnaud, ingénieur d’affaires à Carl Software en charge des relations de communication avec les pompiers.
Après deux années de fonctionnement, la GMAO a été instaurée « avec brio » dans trois des cinq services métiers de la division logistique. « Elle nous permet de gérer le stock et de savoir quatre semaines à l’avance ce qui va devoir être fait dans l’entretien, ce qui nous permet de mieux nous organiser et d’optimiser la maintenance car auparavant, on en avait connaissance que le matin même », témoigne l’adjudant Cédric Mathis, chargé de développer le module Maintenance dans le logiciel Carl Source, en montrant les alertes de rappel sur l’ordinateur. « La réussite du projet repose sur la mise en place d’une équipe dédiée, sortie de l’organisation, pour se focaliser dessus », souligne le lieutenant-colonel Frédérick Telmart, chef de bureau en charge de la DSI. La brigade a par ailleurs adopté la solution de planification Sigtao, développée par l’éditeur Astillia, pour planifier et gérer les emplois du temps des pompiers.
La mobilité, une prochaine étape
La brigade a néanmoins rencontré des difficultés pour trouver les bonnes compétences. « Les pompiers ne sont pas des ingénieurs, le projet repose seulement sur leur bonne volonté. En voulant optimiser trop de choses, je reconnais que l’on s’est trompé sur la gestion des carburants », confie Ambroise Permalnaïck, qui entend désormais se concentrer sur l’exploitation des données.
Au-delà du savoir-faire, c’est surtout la conduite du changement qui est l’épreuve la plus importante. « Adopter un logiciel informatique implique d’écrire des processus et de les traduire dans l’application. Et avec un nouveau système, les usagers doivent s’y former, s’y familiariser, avoir le réflexe de l’utiliser tous les jours… cela prend du temps, il faut en permanence faire preuve de pédagogie. On a l’avantage d’être des militaires donc on peut imposer de travailler différemment. Car l’on ne fera pas marche arrière », soutient le lieutenant-colonel Frédérick Telmart.
La BSPP entend s’appuyer sur les technologies pour anticiper les risques. Elle a notamment fait l’acquisition de robots pour les interventions lors d’incendie. Les drones sont également à l’étude. Le prochain chantier pour la DSI de la BSPP concernera la mobilité des pompiers. « Aujourd’hui, quand les pompiers interviennent, ils remplissent une fiche papier dont une partie est destinée à l’hôpital. L’objectif de les équiper de tablettes est de pouvoir numériser l’ensemble des bilans patients avec les données médicales, un démonstrateur sera mis en place en 2019 », annonce Frédérick Telmart.
La BSPP en dix chiffres :
– Création en septembre 1811
– 3e unité au monde derrière Tokyo et New York
– 8 500 pompiers
– 124 communes défendues sur 4 départements (Paris, Haut de Seine, Saine St-Denis, Val de Marne et les deux aéroports) par 76 centres de secours répartis sur le secteur
– 502 000 interventions par an, dont 80% en secours aux victimes
– 2 millions d’appels reçus à la centrale
– 250 pompiers techniciens pour assurer la maintenance