Prendre le chemin de l’usine du futur n’est pas forcément chose aisée pour une entreprise. Quelles démarches adopter ? Vers qui se tourner ? Sur quelles aides compter ? Pourtant, les régions, la Commission européenne, les syndicats d’entreprises et même des instituts financiers proposent bon nombre de soutiens. En voici une sélection, conseillée par les principaux acteurs du marché.
1. Prendre exemple sur les pionniers
Dans la perspective de lancer un projet « usine du futur », une première étape peut consister à s’inspirer des sociétés qui ont déjà relevé ce défi. Plusieurs distinctions existent, sous forme de concours, labels et autres prix. Montrer l’exemple, c’est justement l’objectif du label « Productivez ! », qui a déjà distingué depuis 2013 plus d’une centaine de PME. Elles ont déjà fait de l’industrie du futur une réalité d’aujourd’hui, estime le Syndicat des machines et technologies de production (Symop), à l’origine de cette initiative. « Cette récompense n’intègre aucune dimension financière. L’objectif est de mettre en lumière, vis-à-vis de l’ensemble des acteurs industriels, de la pertinence d’investir dans l’appareil de production et des retours positifs qui en découlent », résume Jean Tournoux, son délégué général. Pour obtenir ce label, le candidat doit démontrer les bénéfices de son projet, en termes de productivité, mais aussi attester qu’il n’y a eu aucun impact négatif sur l’emploi. « Productivez ! C’est la démonstration par l’exemple qu’une entreprise française peut moderniser avantageusement son outil industriel », précise de son côté Laurent Siegfried, délégué industrie du Groupement des industries de l’équipement électrique, du contrôle-commande et des services associés (Gimelec). Ce syndicat professionnel, qui accompagne la transformation numérique des entreprises, est associé au Prix Productivez ! depuis 2014.
Lors de l’édition 2014, quelque 35 entreprises ont reçu le Label Productivez ! Et, parmi celles-ci, trois ont été récompensées, le 16 avril dernier à Bercy, par le Prix Productivez ! 2015, qui distingue les projets les plus exemplaires. La société MIG, expert en chaudronnerie, figure parmi les primés. Cette PME provençale d’une vingtaine de salariés a décidé, l’an dernier, d’investir dans un robot multi-outil (découpe plasma, soudage, perçage) afin d’améliorer ses cadences de production. « Ce fut un succès immédiat, expliquet-on chez MIG. Jusqu’à 80 % de gains de temps sur la fabrication de certaines pièces. » L’appel à candidatures pour la prochaine édition est ouvert jusqu’au 6 septembre 2015.
Parmi les autres distinctions qui permettent de trouver des modèles à suivre, on peut citer également le premier Concours national de robotique collaborative, qui a récompensé en février 2015 des projets autour de la collaboration rapprochée entre l’homme et le robot. Le programme HPC-PME permet aux entreprises de découvrir la simulation numérique en exploitant des infrastructures haute performance. Enfin, le Concours mondial d’innovation (CMI), qui récompense et accompagne financièrement des projets innovants dans sept secteurs jugés stratégiques (big data, médecine individualisée, silver économie, stockage de l’énergie…). Toutes les informations sont disponibles sur http://bit.ly/1JAxD2r.
2. Etablir un diagnostic et définir son projet
Avant de lancer un projet de modernisation de son outil industriel, il faut définir clairement ses besoins et évaluer les solutions techniques qui pourraient y répondre. Pour cette phase initiale, dite de diagnostic, les entreprises peuvent faire appel aux cabinets de consultants spécialisés. Et pour être mis en contact avec eux, et même se faire payer leur service, le plus simple reste de se tourner vers le conseil régional dont l’on dépend.
En effet, parmi les 34 plans de « la Nouvelle France industrielle » lancés fin 2013 par Arnaud Montebourg figurait le plan « Usine du futur ». Il a servi de socle au nouveau plan « Industrie du futur » présenté en mai par Emmanuel Macron. L’Etat a confié la gestion de ces plans aux régions. Et si elles planchent, aujourd’hui, sur l’application de ce nouveau plan, elles ont déjà avancé sur le plan précédent et lancé des initiatives pour aider les PME à moderniser leur appareil de production.
Une douzaine de régions ont ainsi lancé un Appel à manifestation d’intérêt (AMI) autour de l’usine du futur. C’est le cas notamment des régions Midi-Pyrénées, Poitou-Charentes, Basse-Normandie et Aquitaine… Le principe se répète. Les entreprises intéressées prennent contact avec le conseil régional. Ce dernier établit une sélection de sociétés selon différents critères, notamment le potentiel de développement grâce à cette démarche. Elles peuvent alors bénéficier d’aides, à commencer par la prise en charge partielle ou complète du diagnostic de départ.
Les régions Aquitaine, Alsace ou Poitou-Charentes financent à 100 % ce diagnostic qui ne coûte que 2 000 à 5 000 euros pour une PME. Au-delà de cette subvention, c’est souvent la possibilité de prendre un premier contact avec la région, qui pourra ensuite orienter l’entreprise vers d’autres solutions de financement.
3. Décrocher des subventions
Une fois les grandes lignes du projet défini, l’entreprise devra chercher des aides à l’investissement. Là encore, le conseil régional peutêtre un très bon contact. La région Paca met, par exemple, en place depuis le début de l’année une subvention aux entreprises allant vers l’usine du futur de l’ordre de 100 000 à 200 000 euros, via un partenariat Etat/Région. Doté d’une enveloppe de 10 millions d’euros sur trois ans, cette aide devrait déjà bénéficier à une vingtaine d’entreprises cette année et, à terme, à près de 200 PME. La sélection des entreprises est en cours.
Dans le même esprit, un plan d’accompagnement à la robotisation de l’appareil industriel a été mis en place en 2014 en Midi-Pyrénées, avec une enveloppe de 33 millions d’euros. L’entreprise toulousaine Etic’Plus, fabricant d’étiquettes adhésives, notamment pour la grande distribution, va en bénéficier. « Notre projet consiste à construire, d’ici à 2016, un bâtiment de 7 000 mètres carrés qui abritera un robot capable de produire les étiquettes selon des commandes prises en ligne. Tout sera donc informatisé, de la prise de commande à la production. Nous allons également automatiser notre chaîne de production de machines à étiqueter », explique Davy Tudela, PDG de cette PME de 70 personnes. Pour ce projet, d’un montant d’environ 10 millions d’euros, Etic’Plus devrait bénéficier de 10 à 20 % de subventions régionales. « Outre la subvention, nous devrions également bénéficier d’aides pour la formation du personnel », précise le dirigeant.
4. Obtenir un prêt
Pour les projets de plus grande ampleur, les subventions risquent parfois de ne pas suffire. Une entreprise peut alors s’orienter vers un prêt qui lui permettra de disposer de la trésorerie nécessaire pour acheter un équipement et ensuite de commencer à le rembourser quand les premiers effets positifs de cette modernisation se feront sentir. C’est le principe des prêts proposés par Bpifrance. Cette compagnie financière, dont l’État et la Caisse des dépôts et consignations sont actionnaires, a mis en place en 2014 les prêts « robotique », « industrialisation », « verts » et « numériques ». « L’enveloppe de 300 millions d’euros du prêt numérique a déjà été totalement allouée. Mais il reste les trois autres dispositifs qui peuvent convenir à une entreprise modernisant son outil de production », précise Guillaume Mortelier, directeur de la stratégie et du développement chez Bpifrance. En cumulant les prêts, une PME peut ainsi obtenir une aide allant jusqu’à 15 millions d’euros.
5. Le bon réflexe : rechercher les contacts de proximité
Les aides présentées ci-dessus sont loin d’être exhaustives. La Commission européenne propose également un programme de subventions autour de l’usine du futur qui peut également être un soutien non négligeable (lire infographie onglet bleu). Mais, de l’avis de l’ensemble des intervenants, la démarche la plus efficace n’est pas forcément de frapper à toutes les portes. Il faut concentrer ses efforts localement ! Comme évoqué ci-avant, le conseil régional est un contact privilégié pour les entreprises souhaitant moderniser leur outil de production. Outre des subventions directes, ses services, ou des entités connexes, orienteront les sociétés vers les meilleurs soutiens.
« C’est dans notre rôle de chef de file du développement économique que d’accompagner les entreprises qui souhaitent aller vers l’usine du futur tout au long de leur démarche. Nous assurons ce soutien via l’Agence régionale pour l’innovation et l’internationalisation des entreprises (ARII) qui est l’interlocuteur local privilégié des entreprises », indique Ladislas Polski, conseiller régional délégué au développement économique des entreprises, au conseil régional Paca. « La région et ses agences économiques sont effectivement le premier guichet vers qui se tourner pour moderniser son outil industriel », confirme Daniel Richet, directeur du développement régional et international au Centre technique des industries mécaniques (Cetim), l’un des principaux centres techniques industriels français.
De son côté, Bpifrance recommande également de « prendre contact avec l’antenne locale qui sera la plus à même d’orienter une entreprise vers les bons produits financiers, souligne son directeur de la stratégie et du développement, Guillaume Mortelier. Près de 90 % des décisions de financement sont prises en région, au plus près des entrepreneurs ».
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