Le groupe spécialiste de la location de véhicules Rent a Car booste son approche du revenue management avec une part d’intelligence artificielle. Alexis Guerpillon, revenue manager, décrit ce qui l’a motivé à accélérer le déploiement d’une solution et les résultats obtenus… tout en précisant les questions que se pose encore l’entreprise.
Pourquoi appliquer de l’intelligence artificielle aux activités de revenue management de Rent a Car ?
Alexis Guerpillon. Rent a Car regroupe 360 agences, dont 50% sont des activités en propre. Il y a donc une gestion conséquente sur le revenue management pour le groupe, comme pour toute entreprise avec un certain niveau de décentralisation. Cependant, nous ne sommes montés en puissance que récemment sur le sujet. Anne-Catherine Péchinot, qui a été nommée directeur général délégué de l’entreprise en 2017, m’a recruté pour accompagner sur la partie revenue management l’important mouvement de digitalisation qu’elle a initié. L’intelligence artificielle est un moyen pour rendre nos grilles de prix encore plus dynamique.
Qu’est-ce qui a changé depuis un an ?
Alexis Guerpillon. Rent a Car menait du revenue management structuré uniquement sur la partie web de ses activités. Or, l’essentiel de l’activité passe par le réseau physique de nos agences. Le but était donc de trouver un moyen pour décentraliser au mieux la prise de décision, tout en facilitant le quotidien de ces décideurs en local. Nous nous sommes donc appuyés sur la technologie de PriceMoov, qui permet d’aller chercher beaucoup plus efficacement les prix pratiqués par la concurrence, et d’anticiper les évolutions marchés. Elle intègre aussi deux aspects d’intelligence artificielle. D’abord, la capacité à faire de l’enrichissement de donnée, c’est-à-dire de confronter les recommandations de l’outil aux connaissances des acteurs du terrain et à leur bonne pratique, pour permettre au logiciel d’apprendre. Ensuite, la capacité à interpréter des millions de points de données différents, qui vont de la localisation des agences jusqu’à la météorologie par exemple – ce que nous ne pouvons pas faire sans automatisation.
Pour quels résultats ?
Alexis Guerpillon. L’ensemble de ces éléments nous permet d’anticiper opérationnellement les flux de locations beaucoup plus en amont. On ne peut plus se permettre de faire seulement des réglages « de dernières semaines ». Nous pouvons ainsi beaucoup mieux gérer notre stock, notre parc de véhicules, en gérant extrêmement finement l’augmentation des prix. Nous sommes sur une sorte de business intelligence, mais en instantanée et capable de s’enrichir dynamiquement des retours terrains ; cela fait toute la différence.
Quelle a été votre principal défi en déployant une telle solution ?
Alexis Guerpillon. La question technique a été gérée facilement. Nous nous appuyons sur le mode software as a service, nous transmettons les données et nous accédons à des résultats. Nous avons eu cependant une vigilance particulière avec notre responsable juridique pour faire en sorte que le sujet soit complètement cadré avec l’entrée en application du RGPD. Au-delà, la grande question à laquelle il faut répondre est celle de l’utilisateur qui profitera le plus efficacement de cet outil ? A quel niveau doit-on mettre la décision ? Si l’on part d’agence, nous avons un chef de comptoir, puis un chef d’agence, un chef de secteur et un chef de région qui reporte au directeur des opérations. Il nous faut assurer la proximité avec le terrain, mais est-ce au chef d’agence de se dégager du temps sur le sujet ?
La technologie à base d’intelligence artificielle ne vise-t-elle pas justement à gagner du temps ?
Alexis Guerpillon. L’automatisation de l’analyse par l’intelligence artificielle est une chose, mais la partie la plus déterminante de revenue management, c’est le temps de cerveau et l’intelligence humaine qui interviennent lors de la décision elle-même. Il faut un certain recul sur le business et le métier pour faire vraiment la différence à ce moment. Depuis 2 mois, nous avons déployés l’outil sur 40 de nos agences en propre. Parfois auprès des chefs d’agence, parfois au niveau secteur ou région. Nous proposerons la possibilité aux franchisés quand nous serons rodés. L’avantage, c’est qu’au niveau pratique, la prise en main n’est pas difficile. Une courte formation théorique et une autre formation rapide sur l’outil suffisent. Le facteur clé pour déployer à l’échelle du groupe sera de déterminer la politique de changement sur les processus et les prix. C’est un sujet organisationnel, pas technologique.