Démonstration et anecdotes à l’appui, notre chroniqueur Thierry Adenis partage ses recettes pour permettre à un directeur des systèmes d’information de mieux échanger avec les dirigeants.
Après une rapide analyse, le chauffagiste m’explique qu’il faut changer le bruleur. Pour cela, il va avoir besoin d’un ensemble d’outils et de matériel, y compris : un tournevis à tête plate, un tournevis cruciforme, des pinces, une clé à molette, des bougies d’allumage, une boîte à outils, un détendeur, des câbles, une chevillette et un chiffon. Il m’explique qu’il va commencer par couper l’alimentation électrique et la source de combustible, puis débrancher les câbles et retirer les bougies d’allumage et les câbles qui les relient et enfin utiliser le tournevis à tête plate pour enlever les écrous de fixation et retirer le brûleur. Il va ensuite nettoyer les surfaces du brûleur et de la chaudière avec un chiffon. Installer le nouveau brûleur et le fixer-fermement, remettre les bougies et les câbles, puis réinstaller le détendeur et les câbles. Enfin, il va réinstaller l’alimentation électrique et la source de combustible. Ce qui permettra à ma chaudière de remarcher correctement.
Vous trouvez que tous ces détails techniques vous importent peu, et que la seule chose qui vous intéresse est de savoir s’il va remettre en état ou non votre chauffage, dans quel délai et à quel coût ?
Vous avez absolument raison.
Mais c’est pourtant ce que font vivre bon nombre de DSI à leur CoDir. Or, les détails techniques n’intéressent que les techniciens.
Ce qui intéresse la Direction c’est de savoir si l’entreprise sera plus performante à la fin du projet, ou si le problème de production sera réglé au plus vite. Que vous choisissiez tel serveur, tel base de données ou tel prestataire ne regarde que vous. La technique, c’est à la maison (i.e. au sein de la DSI). En dehors, on parle le même langage que son interlocuteur.
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« Le prix total est la seule chose que je comprenais dans le dossier »
L’un des Présidents pour lequel j’intervenais en management de transition, m’avait fait la remarque suivante : « Vous ne parlez jamais technique. De fait, je comprends tout ce que vos me dîtes. Cela me change de votre prédécesseur, qui est même allé jusqu’à me demander de choisir entre deux devis pour acquérir un nouveau serveur ». Quand je lui ai demandé ce qu’il a fait face à cette question, il m’a répondu « j’ai choisi le moins cher. Le prix total était la seule chose que je comprenais dans le dossier. »
Le rôle du DSI est de parler du système d’information sans passer par la technique. Pour cela, il convient de raconter des histoires d’usages. La seule chose qui intéresse le Business, c’est lui-même. Il faut lui raconter des histoires qui parlent de lui. Pas de votre technique.
Il faut faire rêver la Direction en projetant l’entreprise à la fin du projet ou du schéma directeur. Il faut provoquer des émotions, pour mieux être entendu sur le réel. Il faut décrire au Business la cible que vous allez construire avec lui, comment vous allez les accompagner dans leur transformation, les aider à être plus performant au quotidien, à gagner de nouveaux marchés, à se différencier de la concurrence, à développer de nouveaux produits, …
Tout cela en mettant à leur disposition des usages plus performants, plus pertinents, plus novateurs, plus adaptés.
L’essentiel n’est pas de raconter des belles histoires… mais que vos interlocuteurs y croient
Il faut s’approprier et décliner dans le domaine du système d’information la citation de Antoine de Saint Exupéry « Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer ».
L’essentiel n’est pas de raconter de belles histoires, mais que vos interlocuteurs les croient. C’est à dire qu’ils se reconnaissent dans ce que vous leur décrivez, qu’ils se projettent dans les solutions que vous leur proposez.
Mais l’exercice n’est pas simple pour le DSI, et peut s’avérer dangereux. Comme vous allez être à la réalisation, il faut vous assurez au préalable que vos belles histoires soient réalisables. En tant que DSI, vous devez donc maitriser les processus fonctionnels majeurs, les enjeux de l’entreprise à court et moyen terme, ainsi que les éléments techniques clés. Pour attiser l’appétit et provoquer l’envie, je conseille un nappage de songe sur une génoise de réalité
Une fois l’adhésion à la cible acquise et la compréhension de votre apport (ce que l’on appelle le marketing de la DSI), il ne faut pas oublier de faire comprendre que le chemin sera long et expliquer les écueils potentiels, les prérequis, les risques et autres difficultés. Il est important qu’ils s’approprient l’entièreté du projet, car ils seront eux aussi des acteurs majeurs.
Ayez la vista !
J’apporterais une modération au fait de ne pas parler technique lors des échanges stratégiques avec le Business. Aujourd’hui, de plus en plus d’utilisateurs ont des (vraies) connaissances techniques en système d’information. Et ils sont amenés à avoir des remarques ou des questions pertinentes. Ne pas dialoguer avec eux sur ce point serait, a minima, maladroit. Je préconise cependant de continuer à ne pas mélanger stratégie et besoins business avec la technique au sein du même échange, mais d’organiser des réunions dédiées aux questions technologiques avec les utilisateurs impliqués.
Alors, amis DSI, ayez la vista ! Devenez des storytellers et disruptez le quotidien de votre entreprise en racontant les usages de demain, et en veillant bien à emmener un maximum de décideurs avec vous. Aussi beau soit le voyage, il est triste de voyager seul.
P.S., pour le fun : mes connaissances en chauffage et autre bricolage étant piètres, j’ai demandé à ChatGPT de me rédiger le 1er paragraphe.