L’analyse d’images, pour augmenter la productivité, assurer la satisfaction client et… sauver des vies

William Eldin est le CEO de XXII, pépite française spécialisée dans l’analyse d’images. Il revient sur les cas d’usage qui le séduisent le plus dans les secteurs de l’industrie et du retail, en pointe sur l’emploi de l’intelligence artificielle. Il passe également en revue la place de la France sur la scène internationale de l’IA et celle du cloud dans les stratégies d’innovation des entreprises.

>> Cet article est extrait du Carnet d’expériences « Les champions français de l’IA »

William-Eldin

William Eldin, CEO de XXII

Comment résumer la philosophie des usages de l‘IA dans l’industrie et le retail qui font les innovations françaises d’aujourd’hui ?

Les entreprises mettent en œuvre des programmes informatiques, des logiciels, qui essaient avant tout d’imiter nos propres réactions à ce qui nous entoure, et à ce que nous voyons en particulier. Ils forment aujourd’hui des bribes de ce qui pourrait être des réactions humaines pleines et entières.

Ces innovations sont en pleine construction, encore un peu basiques, elles imitent partiellement nos compétences et facultés… Mais elles se développent très vite, et peut-être qu’un jour pas si lointain, elles seront à la hauteur de notre magnifique cerveau !

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Quels sont les cas d’usage que vous estimez d’ores et déjà bluffants en 2022 ?

Il y a des cas sur l’analyse d’image qui retiennent l’attention. Prenons celui d’un parc d’attractions, l’un des plus grands en France. Aujourd’hui, on sait détecter le nombre de personnes qui attendent dans une file ou les problèmes de poubelles qui débordent, pour analyser les données et agir en conséquence. Mais on peut également aller dix fois plus loin en 2022 : quand un enfant se perd dans un tel parc, une IA peut analyser les images des caméras de vidéosurveillance, à partir des couleurs, des coefficients de taille et de poids des vêtements… pour retrouver la personne égarée. L’IA s’appuie sur le réseau de caméras, avec la logique qu’il y a derrière, en fonction de l’endroit recherché et de l’activité de l’enfant. Et il ne s’agit pas de reconnaissance faciale : c’est de l’analyse non biométrique, qui est donc du même coup beaucoup moins critiquée.

Donc l’IA est utilisée pour sauver des vies aujourd’hui. Et on peut imaginer de nombreuses autres façons d’exploiter cette technologie, par exemple en détectant les bagages abandonnés qui bloquent les gares et les aéroports avec intervention de démineurs. Pour y parvenir, l’IA aura besoin d’énormément de données. L’objectif pour une entreprise est d’apprendre ainsi aux machines tous les cas les plus rares, qu’un humain analyse habituellement par son expérience.

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Et du point de vue de l’amélioration de la productivité, quelle est l’innovation qui vous a le plus convaincu ces derniers mois ?

Il y a ce cas dans un fast-food très connu, dont l’objectif est l’efficacité et la rapidité de la livraison de la commande. Tout est optimisé pour cela, de la disposition du mobilier aux réglages des appareils de cuisine. Imaginez maintenant une IA, derrière des caméras installées au plafond, qui va contrôler non seulement la propreté des toilettes et des tables, comme c’est déjà souvent le cas… et qui va aussi permettre d’assurer la conformité des commandes.

Quand je vais dans ce type de fast-food, trop souvent il y a encore une erreur à la livraison : il manque un sandwich ou une sauce. Aujourd’hui, on a la capacité de mettre une diode pour l’opérateur, qui s’allume en vert quand la commande est pleine et juste. C’est hyperopérationnel pour, non seulement aller au plus efficace, mais aussi assurer la satisfaction des clients qui ne sont plus obligés de se plaindre, de revenir au comptoir, etc. Et ce n’est pas qu’aux États-Unis que ça se passe : c’est aussi déployé en France !

Justement, comment la France se compare-t-elle à d’autres pays sur de tels sujets ?

Il y a surtout une différence d’approche. Aux États-Unis, on développe et finance l’innovation en étant très focus : on choisit un vertical, avec un cas d’usage sur lequel on va tout faire pour être le meilleur du monde. En France, sans doute du fait de notre histoire et de la nature de nos formations scientifiques, nous avons une approche que je qualifierais de plus créative et transverse. C’est une force, car cela fonctionne particulièrement bien quand on parle d’intelligence artificielle.

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Avec l’IA, il est plus intéressant d’avoir une compréhension globale des sujets, des scènes de la vie, avec à la clé la possibilité d’avoir un commun, par exemple un algorithme de détection de mouvements, qui, au final, va pouvoir être appliqué à de très nombreux cas différents. On se retrouve donc avec des innovations beaucoup plus transversales, utilisables dans des industries et pour des cas très différents. Cela permet d’aller beaucoup plus loin dans les usages que l’on voit aujourd’hui. Après tout, l’IA est censée reproduire notre intelligence… et celle-ci est bien loin d’être seulement verticale !

Tous ces cas d’usage d’analyse de flux vidéo reposent-ils sur des capacités cloud importantes ?

Quand on travaille dans des milieux où la question de la sécurité et de la production est extrêmement importante, il est tout à fait légitime d’entendre que des entreprises ne veulent pas remonter leur flux vidéo dans le cloud. Par ailleurs, le cloud n’a pas encore des instances qui permettent de traiter du temps réel en vidéo de manière complètement satisfaisante, car cela reste très lourd en matière de données. Il est possible d’avancer avec des petits algorithmes sur des jeux de données en local au démarrage d’un projet. Mais le sujet va se poser quand il sera question d’industrialiser une solution. Aujourd’hui, les architectes du logiciel se cassent encore un peu la tête et on attend beaucoup des acteurs du marché pour qu’ils fournissent les outils qui permettront de faire fonctionner de tels systèmes, à la fois en sécurité et de manière performante à l’échelle.