Aujourd’hui l’Europe est confrontée à deux défis majeurs : la transition verte et la transition numérique. Bien que ces deux mouvements puissent être considérés comme incompatibles, notamment à cause de l’impact environnemental de l’utilisation croissante de données, ils sont pourtant interdépendants et l’un ne peut réussir sans l’autre. Marie Laure Codaccioni, Directrice d’unité adjointe de mc2i, nous livre son analyse.
En effet, la numérisation offre de nouvelles opportunités pour la surveillance à distance de la pollution de l’air et de l’eau ou l’utilisation de l’énergie et des ressources naturelles. Ainsi le pacte vert pour l’Europe – ou green deal – veut faire de l’Europe le premier continent neutre en carbone et propose des solutions de durabilité basées sur l’exploitation des données. Aujourd’hui plusieurs questions se posent : l’essor du Big Data nécessite des capacités de stockage et donc des dépenses énergétiques croissantes, est-ce que des solutions concrètes existent vraiment pour corriger ce problème ? Plus généralement, où en est l’Europe en matière de numérique vert, ses ambitions sont-elles réalistes ? Comment les entreprises intègrent ces impulsions européennes ?
Des solutions concrètes pour limiter la consommation énergétique
Aujourd’hui, les centres informatiques représentent 3 % de la production mondiale d’électricité et 17 % de la consommation d’énergie totale du numérique. Pour lutter contre ces dépenses énergétiques des solutions sont mises en place par les entreprises et les villes comme le data parks développés par la ville de Stockholm qui intègre les structures du big data dans son éco-conception urbaine. Les entreprises s’intéressent aussi de plus en plus dans leur production d’énergie, en sensibilisant les collaborateurs aux démultiplications des copies de sauvegarde. Cela permet de réduire significativement la consommation électrique des clouds de certains acteurs tout en boostant leur capacité de développement.
Pour accélérer cette prise de conscience et les initiatives, l’Europe s’engage, au travers du projet green deal, à trouver des solutions de durabilité basées sur les données tels que The Climate Corporation, CGIAR et le Famine Early Warning System proposent de rendre la production et la consommation durable, efficace et sans gaspillage de ressources alimentaires. Par ailleurs, l’utilisation des prévisions météorologiques en combinant l’analyse prédictive et l’apprentissage automatique avec des données météorologiques satellitaires et historiques peuvent également permettre d’optimiser la production d’énergie dans les centrales solaires, éoliennes et hydrauliques existantes. Des données peuvent également être recueillies sur le réacheminement intelligent de l’énergie excédentaire dans le système énergétique du réseau intelligent.
Enfin, dans le secteur du transport, le big data permet de gérer les niveaux de congestion dans les trains et les gares à l’aide des technologies de flux de personnes ou encore de fournir des estimations en temps réel qui permettent aux navetteurs de prendre des décisions de voyage optimales en fonction des niveaux de congestion, des heures d’arrivée, des heures de départ et des itinéraires. C’est l’un des objectifs stratégiques de la DSI de la SNCF.
Ces ambitions sont-elles réalistes ?
Les ambitions semblent être difficilement réalisables puisqu’elle présuppose que l’Europe va inventer et déployer une économie zéro carbone en seulement 28 ans (d’ici 2050), « ce qui est une révolution industrielle et historique dans la mesure où les deux révolutions industrielles précédentes ont mis 250 ans à inventer l’économie carbonée. »précise Pascal Canfin, Président de la Commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire.
La Coalition européenne pour le numérique vert (EGDC) a été formée par 26 PDG d’entreprises de TIC qui ont signé une déclaration pour soutenir la transformation verte et numérique de l’UE à l’occasion de la Journée numérique 2021. La déclaration s’appuie sur les conclusions du Conseil de l’UE de décembre 2020 sur la numérisation dans l’intérêt de l’environnement et reconnaît que le secteur des TIC est un acteur clé de la lutte contre le changement climatique. Avec la signature de la Déclaration, ils ont formé l’EGDC, s’engageant, au nom de leurs entreprises, à prendre des mesures dans les domaines suivants :
- investir dans le développement et le déploiement de solutions numériques vertes présentant une efficacité énergétique et matérielle significative qui produisent un impact positif net dans un large éventail de secteurs
- mise au point de méthodes et d’outils pour mesurer l’impact net des technologies numériques vertes sur l’environnement et le climat en unissant leurs forces avec les ONG et les organisations d’experts compétentes
- co-créer, avec des représentants d’autres secteurs, des recommandations et des lignes directrices pour une transformation numérique verte de ces secteurs qui profite à l’environnement, à la société et à l’économie.