Depuis 3 ans, l’enseigne de magasins spécialisés dans l’équipement de maison s’est mise en ordre de marche. Objectif : être plus concurrentielle et faire aboutir sa vision cross-canal et du client « unique ». Une stratégie de transformation numérique qui doit se traduire jusque dans les couches les plus opérationnelles de ses équipes informatiques… non sans défi.
Comment mener une transformation drastique de son approche cross-canal (e-commerce, magasins physiques, contacts avec le client…) en intégrant des usages et des technologies de pointe, sans risquer le « big bang » qui va mettre en péril l’activité ? C’est la question qui taraudait depuis plusieurs années les responsables des magasins BUT et à laquelle de nombreux autres retailers ont été confrontés. Enjeu : identifier un client quel que soit son action, son emplacement, son besoin… de façon unique. Ce, sans compromettre le fonctionnement quotidien de 300 magasins lors de la période de transition.
Transformateur à la méthode douce
« Nous avons voulu poursuivre cet objectif avec une « méthode douce » » témoigne Thierry Leclerc, responsable Bureau Technique et Exploitation de l’enseigne. Rencontré à l’occasion de l’inauguration des nouveaux locaux français de la société Automic (voir notre interview de Todd de Laughter, CEO d’Automic), dont BUT est client, il retrace l’impact sur la production informatique de l’entreprise des choix stratégiques opérés pour mener la transformation des magasins de la marque. Trois ans plus tôt, BUT a changé l’ensemble de ses dirigeants et au niveau de la DSI, c’est Robert Eskenazy, ancien chef d’orchestre de la transformation multicanal pour les Galeries Lafayette, qui a pris la barre.
Thierry Leclerc dresse le portrait de ce transformateur : « Il est arrivé avec beaucoup de nouvelles idées, c’est un fin connaisseur des dernières technologies et il nous a rapidement brossé un portrait précis de l’informatique de demain pour BUT. Surtout, il a défini un cap stable et cohérent, auquel nous nous tenons depuis 3 ans ». Doté historiquement d’un ERP développé en interne « rigide et peu évolutif », la DSI chez BUT a donc décidé de mettre en place un nouveau « hub » de transport de l’information pour l’entreprise, base centralisée qui sera la future colonne vertébrale de l’architecture de l’enseigne. Pour éviter le « big bang », tous les flux de données métiers sont dédoublés afin d’alimenter de manière parallèle l’ERP – pour continuer à travailler normalement au quotidien – et ce nouveau système – pour y adjoindre les technologies plus modernes. Progressivement, chaque nouvelle fonctionnalité mise en place voit son équivalent au sein de l’ERP être décommissionnée pour assurer la transition.
Sur le papier, la solution est élégante, mais les défis sont nombreux : « Il faut être particulièrement vigilant quand on adjoint de nouvelles technologies à un existant. Nous avons dû multiplier les développements, les mises en production » décrit le responsable du Bureau Technique. Le système d’information des entreprises est de plus en plus complexe, ouvert et fragmenté, BUT en sait quelque chose. Avec l’accélération des rythmes – la DSI se calquant de mieux en mieux sur la vision business – et la variété croissante des technologies à disposition, le cocktail est explosif : la bonne transformation d’une entreprise passe donc aussi par sa capacité à savoir bien accompagner les hommes qui ont les mains au cœur du moteur.
Automatisation et DevOps
« Se transformer est une opportunité et une obligation, mais humainement, accélérer les cycles de mises en production coûte : tout le monde est sous pression. D’où le choix de mettre en place des outils d’automatisation comme Automic Release Automation, cela permet non seulement d’augmenter la fréquence de nos mises en production mais aussi de les fiabiliser » détaille Thierry Leclerc, en faisant le lien avec sa présence lors de la soirée organisée par Automic. « Grâce à de tels outils, nous allons clairement tendre vers DevOps, mais cela ne s’improvise pas » ajoute-t-il.
DevOps. Le terme est lâché. A la mode, il souligne une réalité importante pour les entreprises en transformation : la capacité à rendre beaucoup plus anodine et fluide la façon dont l’ensemble de la chaîne informatique fonctionne pour proposer de nouveaux services au reste de l’entreprise et, in fine, aux clients. Lors des Etats-Généraux du Cloud qui se sont tenus le 6 juillet, Gilles de Richemond, directeur général de Voyages-SNCF Technologies en résumait ainsi l’enjeu « DevOps correspond bien à une logique culturelle du « as a service » que l’on retrouve partout. L’idée est de banaliser l’acte de mise en production, qui était autrefois une échéance complexe, pour que les équipes de la DSI puissent se concentrer sur l’objectif business lui-même ».
Un avis partagé à la Société Générale où Carlos Goncalves, DSI pour la branche GPIS estime lors de la même rencontre : « Il ne s’agit pas tant d’une transformation de l’IT, que de redonner les clés de l’informatique aux acteurs business, ce qui permet de mieux prioriser et mettre en musique les changements. Mais ce gain de fluidité amène un risque d’entropie sur la production informatique, il est donc important d’automatiser au maximum, notamment toutes les batteries de tests ».
Faire évoluer ses fidèles
Chez BUT, on admet que si les outils favorisent le changement, l’évolution culturelle est un challenge. On ne peut pas imposer par le haut ce genre de fonctionnement, surtout quand les individus sont des fidèles qui ont l’habitude de travailler depuis de nombreuses années pour l’enseigne. Pour continuer à faire tourner l’existant tout en préparant l’avenir, l’enjeu n’est donc pas seulement de recruter de nouveaux talents, mais aussi d’accompagner les compétences présentes et de leur faire accepter la nouveauté.
« Le DSI est l’homme clé de la situation, qui va permettre de faire le lien entre les deux mondes : les réalités de l’exploitation informatique et la trajectoire business numérique de l’entreprise, sans pencher trop d’un côté ou de l’autre. C’est un travail de management fondamental. Et encore une fois, le fait de partager sa vision fédératrice et stable sur le long terme permet autant de rassurer que d’avancer plus vite » insiste Thierry Leclerc. Les derniers résultats de l’entreprise peuvent le conforter dans cette vision de la transformation : en 2015, l’enseigne a vu son chiffre d’affaires augmenter de 3,8% à 1,33 milliards d’euros, en prenant 1 point de part de marché.