A l’heure où le travail collaboratif et l’agilité s’imposent dans tous les domaines, surtout celui de l’innovation, nous nous sommes entretenus avec Carlos Cunha, délégué général de Cap Digital, pour évoquer les mois passés de la crise sanitaire et les projets à venir. Entre repositionnement stratégique imposé par l’Etat (les pôles sont désormais régis par les Régions) et entreprises en difficulté, mieux vaut se tourner vers l’Europe…
Depuis deux ans, Cap Digital a évolué. La nouvelle stratégie de l’Etat concernant les pôles de compétitivité, véritables écosystèmes locaux d’innovation, et la crise sanitaire leur ont imposé le changement. « Certains de nos adhérents ont beaucoup soufferts pendant cette période, durant laquelle notre conseil d’administration a de son côté été renouvelé pour plus de moitié en juin dernier », explique Carlos Cunha, délégué général de Cap Digital depuis un an (et dans l’équipe permanente depuis 2010).
Point positif : les investissements reprennent depuis quelques mois, « exactement depuis le début du 2ème trimestre 2021, poursuit le délégué. Cela se concrétise de la part des grands groupes et des institutions publiques par beaucoup de curiosité pour des solutions innovantes, mais aussi une réelle volonté d’accélérer, de consolider les plans stratégiques et d’investir sur la maximisation du Plan de relance (transitions écologique, énergétique et numérique), à identifier les opportunités, à essayer de constituer de nouvelles chaînes de valeur pour répondre aux appels à projets…
« En ce sens, naturellement, on vient nous voir chez Cap Digital en tant que lieu de facilitation, pour faire émerger des collaborations ou ajouter un volet numérique dans ces projets qui se lancent, explique-t-il. Il y a une réelle volonté de la part de nombreux acteurs territoriaux de s’appuyer sur un écosystème d’entreprises locales innovantes sur lesquelles ils peuvent s’appuyer. »
Par ailleurs, il y a toujours autant d’entreprises qui se créent et d’envies chez de jeunes entrepreneurs ! Mais, après deux à trois ans d’existence, 25 à 30 % d’entre elles ne survivront pas… Celles qui s’en sortent le mieux sont sur des modèles d’abonnement ; les autres souffrent davantage et les investisseurs ne suivront pas. Reste à voir ce qui se passera d’ici à la fin de l’année 2021 en fonction de la reprise réelle…
Deux grands sujets pour les mois à venir : Europe et PIA 4
Concernant les financements européens, le pôle s’est aussi mis en ordre de marche pour accompagner ses membres à candidater à divers appels d’offres européens. Veille, information, constitution d’équipes pour soumissionner dans les projets, montage d’un dossier conforme : le pôle pousse à l’émergence d’écosystèmes d’innovation… « Aujourd’hui, un des piliers forts de notre action vise à déployer des solutions innovantes sur cinq-six territoires « chantiers » en Europe. C’est un modèle totalement nouveau. En consortium, on crée à l’échelle européenne une fabrique commune de l’innovation numérique territoriale. On amène la meilleure des expertises autour de la table, on définit ensemble les enjeux prioritaires, on identifie les entreprises porteuses de solutions innovantes et l’on amène des territoires demandeurs ou des opérateurs pour leur compte… On crée aussi des moments de visibilité pour les lauréats auprès d’investisseurs européens »
Cap Digital souhaite faire la même chose à l’échelle du territoire en matière d’innovation et de dynamiques collectives (PIA 4). « On essaie d’identifier dans la masse d’appels à projets les quelques guichets intéressants pour notre communauté et on mobilise ensuite les équipes pour les accompagner dans leur montage en leur garantissant la meilleure expertise technologique et financière, et l’on opère éventuellement une partie du projet. » Ce sont des nouveaux modèles de collaboration que souhaite développer Cap Digital pour répondre notamment à l’accélération écologique des territoires (villes durables, industries culturelles et créatives…), et que la Caisse des Dépôts, au sein du pôle, est capable de soutenir financièrement sous conditions…
« Sur la verticale des ICC par exemple, nous créons une dynamique sur les essences de contenus audiovisuels. On veut réunir toute la filière du producteur au distributeur (traçabilité, sécurité, optimisation du modèle d’affaires, etc.). Dans ce domaine, Cap Digital peut être le dénominateur commun de tous ces acteurs et tiers de confiance », précise-t-il.
L’avenir des pôles
Une première consultation, à l’échelle nationale et opérée par l’Etat, vient de se finaliser sur l’avenir des pôles, dont les résultats seront bientôt dévoilés. « Pendant la crise de ces derniers mois, nous avons été de vrais relais vis-à-vis de nos membres », explique Carlos Cunha. Pour autant, les IRT, SATT, pôles de compétitivité, CSF… ne remplissent pas encore tous les besoins identifiés (ou pas suffisamment) par leurs communautés. Aussi, toutes ces structures entrent aujourd’hui dans une phase de concertation sur ce que seront leurs missions pour le compte de l’Etat à partir de 2023. « Nous devons nous renforcer dans un rôle de fabrique d’innovation numérique territoriale, sur des open call en lien avec le PIA4 ou la transition technologique des territoires… », souhaite le délégué, soit en tant qu’apporteur d’affaires ou en tant qu’accompagnateur à disposition des lauréats du PIA4 sur le volet numérique…
Reste que les pôles doivent décider s’ils veulent avoir une portée nationale/européenne ou seulement régionale. « Il faut maximiser la complémentarité des politiques, locales ou nationales, au bénéfice du territoire », reconnaît-il.
Cap Digital, quelques données
- Présidé par Charles Huot (2ème mandat), le pôle de compétitivité francilien œuvre à faire des Régions Ile-de-France et Hauts-de-France des références mondiales de l’innovation numérique responsable, tant d’un point de vue industriel que stratégique, principalement sur des thèmes comme la ville durable (transitions écologique et énergétique) et les industries culturelles et créatives (ICC)…
- Le pôle porte notamment la vision et les projets de ses adhérents au cœur des plans de la relance à venir et plus particulièrement du Plan d’investissement d’avenir (PIA 4).
- 933 membres au 1er janvier, 860 en fin d’année, au rythme de 120 nouvelles adhésions pour l’année 2021 et 180 résiliations. Avec deux types de profils : beaucoup de très jeunes structures en création et beaucoup de grands groupes et ETI, comme de nombreux opérateurs (Grand Paris Express, Suez…) et métropoles (Dijon, Lille…).