[Chronique] Pourquoi Chat GPT défie-t-il aujourd’hui notre intelligence digitale ?

En présentant les différents types d’intelligence artificielle, notre chroniqueur Imed Boughzala revient sur ce qui fait la particularité d’un outil comme ChatGPT, pour aller au-delà du buzz médiatique.

ChatGPTLa sortie quoique surprenante mais logique de ChatGPT en période de fin d’année, est une bonne illustration qui met en évidence l’importance, encore une fois, de l’intelligence digitale. Individus, organisations et même les États doivent pouvoir comprendre et s’emparer d’une technologie quelle que soit sa sophistication d’une manière efficace, responsable et durable.

Il y a quelques mois seulement toute l’attention était portée sur le Métavers. Aujourd’hui, on ne parle que de Chat GPT parfois à tort et à raison. Demain, ce sera une autre technologie qui sera au centre de l’attention.

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Tout le monde aujourd’hui s’improvise spécialiste des technologies et de leurs usages. Entre résistance/réticence et éphorie, entre peur et enthousiasme, entre spéculation/mimétisme et modération, entre répression et permission… La vraie question n’est vraiment pas de savoir s’il faut interdire ou permettre l’utilisation de Chat GPT dans les établissements d’enseignement et dans l’espace de travail et de production mais plutôt s’il va augmenter notre intelligence ou la diminuer ? Certains lui trouvent des avantages pour répondre à toute question d’une manière rapide et efficace et d’autres lui trouvent des défauts pour son manque de contextualisation et d’imprécision, sans parler des dommages liés à son empreinte carbone.

La vraie question est donc : comment préparer une génération de citoyens digitalement intelligents capables de discerner les bonnes, des mauvaises technologies ? d’avoir une conscience prononcée des avantages, des limites, des effets et des impacts des technologies, de faire les bons choix et les bons usages sans emballement ni nonchalance ?

Ce ne sera ni la première, ni la dernière fois que l’humanité sera mise au défi par une nouvelle technologie qui risque de changer ses modes de vies, ses usages, ses liens, ses habitudes, son rapport à la connaissance… La technologie utilisée par Chat GPT ne date pas d’aujourd’hui. Elle n’est pas seule dans sa catégorie d’intelligence artificielle qu’on appelle désormais générative. Après tout, ce n’est qu’une intelligence humaine reproduite par une machine !

Au-delà du buzz médiatique, la sortie de Chat GPT nous interpelle surtout sur l’intelligence digitale de la société en général et sur sa capacité à intégrer efficacement les évolutions technologiques à venir face à une peur parfois non avouée des humains de la robotisation et de la coévolution Homme-Machine dans la vie quotidienne et dans l’espace du travail.

Si à travers mes chroniques, chers lectrices et lecteurs vous êtes au fait de l’intelligence digitale, l’intelligence artificielle – technologies post-digitales DARQ (Distributed ledger, Artificial intelligence, extended Reality & Quantum computing) mérite certainement quelques précisions.

L’intelligence artificielle (IA) est l’ensemble des techniques et des technologies qui permettent à une machine de simuler l’intelligence humaine. Officiellement, elle est définie comme le « champ interdisciplinaire théorique et pratique qui a pour objet la compréhension de mécanismes de la cognition et de la réflexion, et leur imitation par un dispositif matériel et logiciel, à des fins d’assistance ou de substitution à des activités humaines » (JO 2018). Autrement dit, elle a pour objectif de fabriquer des machines et/ou développer des applications capables d’imiter de manière autonome l’intelligence humaine, afin de résoudre des problèmes complexes à l’aide d’algorithmes et de données. Elle est utilisée dans de nombreux domaines, tels que la finance, la santé et les transports.

Les IA et leurs classifications

Elle peut être divisée en trois grandes catégories : l’intelligence artificielle faible, l’intelligence artificielle forte et la super intelligence artificielle. L’IA faible, également connue sous le nom d’IA limitée/étroite (ANI : Artificial Narrow Intelligence) ou d’IA de première génération, se concentre sur une tâche spécifique et ne peut pas apprendre ou s’adapter à de nouvelles situations. Elle est utilisée dans des domaines tels que la reconnaissance de la parole, la traduction automatique et la reconnaissance de l’écriture manuscrite. L’IA forte, également connue sous le nom d’IA générale (AGI : Artificial General Intelligence) ou de IA de deuxième génération, est conçue pour être capable de résoudre n’importe quel type de problème. Elle peut apprendre et s’adapter à de nouvelles situations, et est capable de raisonner de manière autonome. L’IA forte est utilisée dans des domaines tels que l’apprentissage automatique et la robotique. Elle s’étend à la superintelligence artificielle (ASI : Artificial Superintelligence) ou IA de troisième génération, pour dépasser les capacités de raisonnement humain.

Il existe plusieurs autres manières de classifier l’intelligence artificielle selon ses caractéristiques et ses applications. Une première classe l’IA en 3 familles :

  1. L’IA de réaction : cette forme d’IA est conçue pour réagir à des stimuli prédéterminés de manière autonome, sans avoir besoin d’intervention humaine. Elle est souvent utilisée pour automatiser des tâches simples, comme le suivi d’un processus de production ou la surveillance de systèmes.
  2. L’IA de raisonnement : cette forme d’IA est conçue pour résoudre des problèmes complexes en utilisant des méthodes de raisonnement et de déduction. Elle peut être utilisée pour effectuer des diagnostics médicaux, planifier des itinéraires de voyage ou évaluer les risques financiers.
  3. L’IA de perception : cette forme d’IA est conçue pour percevoir et interpréter les données sensorielles, comme la parole, l’image ou le son. Elle peut être utilisée pour reconnaître les visages, traduire des langues ou conduire des véhicules autonomes.

Une autre façon de classer l’IA en utilisant 3 critères serait :

  1. Les systèmes d’experts et les bases de connaissances : ces systèmes sont conçus pour simuler l’expertise humaine dans un domaine spécifique. Ils sont basés sur des règles et des connaissances préétablies (logiques des propositions, de prédicats, moteurs d’inférence…) et peuvent être utilisés pour effectuer des diagnostics médicaux, prévoir des événements futurs ou recommander des actions à suivre (dans les centres d’appels par exemple).
  2. Les réseaux de neurones qui se basent sur les modèles d’apprentissage (Machine Learning et Deep Learning). Ces modèles sont conçus pour apprendre à partir de données et à faire des prédictions ou des prises de décision. Ils peuvent être utilisés dans de nombreux domaines, comme le traitement automatique des langues ou encore la prévision des ventes. Avec l’apport de la quantique, on parle de Quantum machine Learning, pour le remplissage d’un vaisseau spatial par exemple.
  3. L’analyse des données massives (Data analytics): les données sont un élément clé de l’IA, car en masse elles sont utilisées pour entraîner les modèles d’apprentissage et alimenter les systèmes d’experts. Les données peuvent être structurées ou non.

Il existe aussi une autre classification d’intelligence artificielle qui reprend la dernière, notamment :

  1. L’IA basée sur les règles : fonctionne en suivant des règles prédéfinies pour prendre des décisions.
  2. L’IA de Machine Learning : utilise des algorithmes d’apprentissage automatique pour améliorer ses performances en analysant les données.
  3. L’IA déductive : utilise la logique pour déduire des conclusions à partir de connaissances préétablies.
  4. L’IA inductive : utilise des modèles statistiques pour tirer des conclusions à partir d’exemples.
  5. L’IA basée sur l’expérience : apprend de ses expériences passées pour prendre des décisions plus documentées dans le futur.
  6. L’IA en nuage/cloud : utilise les ressources de calcul en nuage pour effectuer des tâches complexes.
  7. L’IA hybride : combine plusieurs approches d’IA pour atteindre des résultats plus performants.

 ChatGPT, l’IA générative

L’IA générative est une IA hybride qui se concentre sur la création de systèmes informatiques. Elle permet de produire ou de générer des contenus (images, vidéos, musique, voix, textes, et plus encore).

Il existe différents types d’IA générative, mais l’un des plus communs est l’IA générative basée sur les réseaux de neurones, comme GPT (Generative Pre-trained Transformer) qui est utilisé pour générer des textes de manière autonome. Ces réseaux de neurones sont entraînés sur de grandes quantités de données : livres, articles, vidéos, etc. Cela leur permet de comprendre les structures et les styles de différents types de contenu et de générer du contenu similaire. Il est utilisé dans différents domaines tels que la création artistique, la génération de contenu, la traduction automatique, la synthèse de voix, la création de personnages virtuels, la génération de designs, entre autres.

L’IA générative n’est pas encore arrivée à la fin de son développement. Il demeure des limites à ce qu’elle peut générer avec toutefois des avancées récentes. Elles ont permis de générer des contenus de qualité de plus en plus proche de ce que pourrait produire un humain.

Chat GPT en est un exemple parmi d’autres. C’est un modèle de traitement automatique du langage (NLP) basé sur une architecture de réseau de neurones appelée modèle de Transformer. Il est entraîné à générer du texte en utilisant un grand corpus de données textuelles qui remonte à 2021. Il utilise des techniques d’apprentissage automatique pour comprendre le contexte et la structure des phrases et des patterns, et génère du texte qui est cohérent et pertinent par rapport à la question posée. Cela permet de répondre de manière fluide et naturelle à des questions sur de nombreux sujets différents.

Replacer ChatGPT dans des cas d’usage

Dans le monde l’enseignement supérieur, il est important de noter que ce n’est qu’un outil. Il ne saurait remplacer l’expérience d’un enseignant qualifié et les interactions en direct avec ses élèves. Il pourrait permettre de compléter un apprentissage en fournissant des informations rapides et précises, et en aidant les apprenants à développer leur compréhension des sujets. Cependant, ses utilisateurs doivent garder à l’esprit qu’il ne peut être considéré comme une source fiable et que les informations doivent être vérifiées. Il ne remplace pas non plus l’apprentissage des compétences de base telles que la rédaction, les connaissances disciplinaires, la pensée critique, la recherche ou encore l’analyse de d’information.

Ici nous sommes confrontés qu’à une intelligence artificielle, celle d’une machine qui n’est pas forcément une vraie intelligence d’ailleurs. La vraie intelligence est humaine celle appelée digitale pour faire de l’IA un atout et non une menace.

D’ailleurs, pensez-vous que ce texte soit écrit par ChatGPT ? Demain, on ne se posera peut-être plus la question. Ce genre de technologie sera intégré dans les enseignements et même dans les outils de travail comme fonctionnalité… les enjeux ne seraient alors plus les mêmes sans oublier que le plagiat et le droit d’auteur demeurent une problématique à trancher en parallèle à l’évaluation des usages.