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Chief Artificial Intelligence Officer : faut-il un expert ou un « responsable transverse » ?

Header article Chief Artificial Intelligence_Officer Fabrice Mateo

Le concept de Chief Artificial Intelligence Officers (CAIO) a le vent en poupe depuis plusieurs mois, mais une question se pose : l’intelligence artificielle doit-elle être gérée par un expert ou est-ce que l’IA est une affaire trop importante pour être laissée aux seuls spécialistes ? Deux spécialistes débattent. 

Dan Bendavid, chef de l’innovation chez le spécialiste de l’assurance et de la réassurance Axa XL et Olivier Dancot, CAIO pour l’entreprise d’ingénierie Omnilog, partagent la conduite de l’IA dans leur entreprise respective. Mais alors que le second se charge de l’IA et uniquement de l’IA, Dan Bendavid chapeaute lui les départements informatiques et numériques dans lesquels figure, parmi ses autres responsabilités, le management de l’IA. Quelle est donc la meilleure manière de favoriser le développement de l’IA dans une entreprise ? C’est la question que nous avons posé à ces deux acteurs aux perspectives différentes.

Pluridisciplinaire et transversale

Dan Bendavid entame le débat par la nature de l’IA qui est fondamentalement pluridisciplinaire : « Elle recouvre plusieurs domaines qui vont du monde informatique et digital. Certains utilisent l’IA pour faire de la statistique avec des calculs de prédiction et d’analyse plus précis et plus divers. Dans le domaine de l’assurance, nous l’utilisons de plus en plus dans la gestion des risques et l’évaluation des sinistres. D’autres vont utiliser de l’IA pour automatiser des tâches. Cette dernière était assez limitée dans l’assurance mais grâce à l’IA LLM, nous avons mis en place des automatisations qui nous aident à effectuer certaines opérations de manière plus efficace. Par exemple, nous utilisons de plus en plus d’outils de visioconférence et nous pouvons générer ainsi des minutes à la volée. C’est pour nous un gain pour ceux qui retranscrivent les meetings par écrit et tous ceux qui n’en écrivaient pas avant et vont désormais en écrire. Pour nos gestionnaires de projet, par exemple, c’est un progrès évident. » Sous-entendu, l’IA est si diverse et imbriquée dans le digital qu’il est nécessaire de posséder une personne à la vision panoramique pour bien la gérer au sein de tout l’écosystème numérique.

Pour Olivier Dancot, c’est justement parce que l’IA est transverse qu’il faut un expert à sa tête : « Il est au contraire préférable d’avoir une personne qui dirige la politique de l’IA dans l’entreprise. Dans un premier temps, il faut être capable de reconnaître où se situe la valeur ajoutée, et ceci, ce sont les experts métiers qui le savent et pas le responsable IA. En revanche, la façon de mettre en place la valorisation, c’est l’expert IA qui possède cette capacité. Il va gérer les équipes qui déploient les briques d’intelligence artificielle. Et pour ce faire, plusieurs équipes coexistent. Les équipes data, de développement, de mise en production, de cloud… Pour les coordonner, le rôle de CAIO est selon moi indispensable. »

Il faut donc un rôle de manager qui possède une expertise sur la capacité à faire et sur les échanges avec les comités directeurs et exécutifs. Le CAIO est une sorte de liant entre la direction qui souhaite et les équipes qui réalisent : « Tout le monde peut faire de l’IA, mais la déployer de manière industrielle sur l’ensemble des processus et des sites est quelque chose de plus complexe qui nécessite une connaissance approfondie de l’IA », argumente Olivier Dancot.

L’IA au service des métiers

Dan Bendavid rétorque que l’IA est une approche qui est mise au service des métiers, des clients et de l’efficacité de l‘entreprise. C’est donc déjà un moyen et pas une fin en soi : « Chez Axa XL, les métiers sont à la manœuvre. C’est son expertise qui définit les cas d’utilisation de l’IA. En sus de l’angle métier, de celui technologique, il y en a un troisième pour l’IA qui est celui des risques de la protection de la vie privée et de la sécurisation des données. Ceci nous amène à travailler main dans la main avec les gens de la sécurité, du risque, de notre data privacy officer, des métiers et ceux qui présentent les solutions possibles. Alors certes, un CAIO possède un savoir-faire et des connaissances IA, mais il fait plus, une expertise, des ressources, de la passion IA, certes, mais aussi connaître les métiers. »

De plus, ajoute Dan Bendavid, « l’IA n’est pas le seul axe technologique d’innovation. Il y a la cybersécurité, le spatial, la réalité augmentée pour accompagner nos clients à la maîtrise de leurs risques et aussi l’informatique quantique que nous observons de près… L’IA générative n’est pas notre seule source de progrès chez Axa XL et Axa. » Il est donc indispensable de ne pas se contenter de l’IA, même si certaines recherches qui prenaient des jours avant ne prennent que quelques heures aujourd’hui, commente le chef de l’innovation chez AXA XL.

Parallèlement chez Omnilog, le job d’Olivier Dancot est de chercher « pourquoi » on fait quelque chose et comment on va pouvoir l’améliorer grâce à l’IA. Le corollaire de cette fonction, c’est une veille, une communication, un pragmatisme et une curiosité permanents en termes d’IA, ce qui ne peut se réaliser que si on est spécialiste.

Connaître la donnée avant de démarrer un projet IA

« Au niveau hard skills, il est indispensable de connaître la donnée, comment elle va être classifiée, comment elle va être comprise, avant d’entamer tout projet IA. Il faut aussi être capable de discuter algorithmie.
Parfois, dans le recrutement, il est nécessaire de mettre les mots sur des compétences que certains ont sans en avoir la pleine conscience et donc avoir une bonne lecture de chacun face à la pénurie de talents dans le secteur », informe le CAIO d’Omnilog.

Ceux qui utilisent l’IA au quotidien ne sont pas forcément capables de déployer l’IA de manière industrielle dans une usine. L’inverse est donc également vrai. Mais ce qui est certain, c’est que de nombreuses entreprises placeront le curseur entre les deux extrêmes du spécialiste visionnaire et du généraliste gestionnaire. Ne serait-ce que parce que les profils capables de développer rapidement l’IA à l’échelle dans une entreprise sont encore rares. Derrière le terme un peu facile de Chief AI Officer, de nombreuses réalités coexisteront donc sans aucun doute à l’avenir.

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