Une enquête publiée début avril par l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur), en partenariat avec la Ville de Paris et la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Paris, montre que la Capitale a perdu 11677 établissements depuis 2017. Une légère baisse due principalement à la crise des gilets jaunes et l’irruption de la Covid-19 qu’il faut surveiller de près.
Difficile pour un commerce parisien de survivre lorsque les mesures de confinement se succèdent ! C’est ce qu’une enquête publiée le 8 avril dernier par l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) prouve, chiffres à l’appui. « Chaque année, nous embauchons une vingtaine d’enquêteurs pour relever tous les locaux en rez-de-chaussée ayant une vitrine et un accès depuis l’espace public à Paris », précise Stéphanie Jankel, directrice études logement et quartiers de gare à l’Apur. L’étude, menée tous les trois ans en partenariat avec la Ville de Paris et la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Paris, remonte ces données du terrain depuis vingt ans.
Après une longue période de stabilité, la capitale a perdu 1164 établissements commerciaux depuis 2017. Sur les 83 400 locaux recensés en 2020 (dont 61 500 commerces, bars, restaurants et services commerciaux), 8760 sont vacants (passant de 9,3 % à 10,5 %). Un taux de vacance plutôt stable depuis la dernière étude (de 8,3 % à 8,7 %), mais qui reste à surveiller au vu du contexte peu prometteur.
« Depuis quatre ans, la région Ile-de-France est en désarroi, déplore Dominique Restino, président de la CCI de Paris. Les inondations de 2018, l’explosion de la rue Trévise, l’incendie de Notre-Dame, les manifestations des Gilets jaunes, les grèves dans les transports, et maintenant la crise sanitaire… Cette longue période est un coup de massue pour l’ensemble de nos commerçants ».
Des conséquences économiques disparates selon le type de commerce
Si la baisse du nombre de commerces parisiens est qualifiée de « légère », c’est parce que Paris détient la plus forte densité commerciale en France, avec environ 28 commerces pour 1 000 habitants. Les commerces bio par exemple affichent une progression de 67 % du nombre d’établissements depuis 2017 (+ 200). Les magasins d’alimentation générale de moins de 120 mètres carrés, eux, sont 4 % de plus qu’il y a trois ans.
Idem du côté de la restauration rapide qui compte 327 restaurants en plus et les activités médicales, dont le nombre de locaux est en constante augmentation depuis une quinzaine d’années et continue de progresser entre 2017 et 2020 (+ 9,3 %, + 179 locaux).
Mais quand certains prospèrent, d’autres tombent. C’est le cas des agences de voyage (15 % en moins) ou encore les commerces d’équipement de la personne (- 13 %) et les agences bancaires (- 10 %). La baisse du nombre de commerces de gros se poursuit aussi (- 36,6 %) et passe en–dessous de la barre des mille (ils étaient plus de 3 000 au début des années 2000).
La crise n’a donc pas affecté tous les commerces de la même manière et ses effets sont encore à déterminer pour la période à venir. « Je suis extrêmement préoccupée par la situation du commerce parisien, qui était jusqu’ici très dynamique, a fait remarquer Olivia Polski, adjointe à la Maire de Paris, chargée du commerce. Du fait de la crise, certains secteurs d’activités sont très touchés : nuit, hôtels, cafés, bars, restaurants, habillement, vente de presse etc. »
La disparition des touristes et le confinement des Parisiens sont en partie la raison pour laquelle la pérennité de ces types de commerces inquiète.
Des commerces sous perfusion
Si le constat dressé par les auteurs de cette étude n’est pas si catastrophique en apparence, c’est en partie parce que l’Etat a mis en place un certain nombre de mécanismes pour permettre aux commerces de tenir le coup. La Ville de Paris par exemple, déploie depuis mai 2020, un plan de relance de 200 millions d’euros dans cette optique. Il est prévu notamment une exonération pour six mois des loyers des commerces ayant fait l’objet d’une fermeture administrative et hébergés par des bailleurs sociaux.
Un an plus tard, d’autres mesures d’envergure sont annoncées par la Ville de Paris pour relancer l’activité de ces entreprises. Un nouveau fonds de 80 millions d’euros va permettre d’accompagner les TPE et PME du secteur du tourisme et une foncière va être créée pour soutenir les commerces de proximité et les hôtels indépendants. L’agence de gestion foncière aura notamment pour objet de racheter temporairement des actifs (murs et fonds de commerces) pour permettre aux commerçants d’avoir des liquidités pendant la crise, avec une option de rachat une fois la crise passée.
Pour en savoir plus : Paris s’engage pour la relance de l’activité économique
Les commerces bénéficiant de ces aides publiques sont donc sous cloche, le temps que l’orage passe. Une stratégie insuffisante d’après Olivia Polski : « Pour faire repartir le tissu économique de notre territoire, nous avons besoin d’une mobilisation de l’Etat avec un grand plan de relance économique territorialisé. », précise-t-elle. Dominique Restino, lui, tient à rappeler que ces aides sont bienvenues, mais qu’elles ne règlent pas la grande souffrance qu’éprouvent la majeure partie des commerçants à ce jour.
En attendant la reprise, les auteurs de l’étude préconisent aux commerçants parisiens de se préparer à investir les terrasses et les trottoirs – quand cela est possible – pour leur réouverture. C’est tout une nouvelle organisation de l’espace public qu’il faut repenser et qui s’inscrit notamment dans le débat lancé par la Mairie de Paris avec son plan de suppression de 70 000 places de parking d’ici à 2026. Une discussion est d’ailleurs en cours pour revoir à la baisse cet objectif car cela impacterait le nombre de places de livraison nécessaires à l’approvisionnement des commerces.