Face à la crise sanitaire actuelle, les entreprises ont d’autant plus besoin de créativité pour repenser leur modèle et s’adapter au monde qui bouge. Un défi évolutionniste très important pour la pérennité d’une entreprise et qui ne pourra être surmonté avec une posture de prédation mais bien par la collaboration.
Chaque année, le réseau social professionnel LinkedIn délivre une étude sur les compétences les plus demandées en entreprise. Et pour la deuxième année consécutive, la créativité arrive en tête. Mais pourquoi ce soft-skill a-t-il le vent en poupe ?
Concrètement, une personne crĂ©ative est dotĂ©e d’un regard analytique Ă 360° sur le moyen long terme. C’est par exemple le fait de pouvoir pressentir les effets positifs qu’un produit innovant peut avoir sur le marchĂ©. C’est aussi une aptitude pour envisager tous les scĂ©narios possibles dans la rĂ©solution d’un problème.
Si les employeurs sont si demandeurs de talents créatifs, c’est parce qu’ils attendent un esprit d’initiative, une propension à l’intuition qui pousse à sortir du cadre pour innover dans l’intérêt du groupe ou du projet. Les entreprises l’ont bien compris et multiplient les ateliers de formation pour booster l’intelligence collective à coups de créativité.
« L’imagination est plus importante que la connaissance »
Albert Einstein a prouvé qu’en science il faut parfois sortir des sentiers battus pour faire de grandes découvertes. La curiosité et l’imagination sont pour lui les pierres angulaires du progrès. Il en est de même pour la créativité en entreprise.
Le but des ateliers de formation à la créativité est avant tout de renforcer la confiance des collaborateurs en eux-mêmes, en réduisant leur peur de l’échec et en aiguisant leur curiosité. Cette intelligence collective est une étape cruciale pour former une organisation plus collaborative et résiliente face aux changements.
Plus précisément, pour les entreprises opérant dans un secteur concurrentiel, c’est un moyen de booster sa performance grâce à de nouvelles sources d’innovation. Mais alors que l’innovation dans les entreprises est une simple réponse à un besoin identifié, la création, elle, suppose de revoir nos schémas, revisiter nos croyances, déconstruire nos récits et penser de nouveaux imaginaires.
Pour mieux comprendre cette différence, il est possible de faire une analogie artistique. Les ateliers de créativité ne visent pas à former de nouveaux designers mais bien des artistes, aptes à explorer l’inconnu, à créer par intuition. Toutefois, pour éviter de devenir un artiste “hors sol”, le collaborateur doit pouvoir recourir aux outils de son temps.
Rester « mobile » dans un monde qui évolue vite
De tous temps, l’acte de crĂ©ation a dĂ» s’adapter Ă la technique pour prospĂ©rer et ne pas devenir obsolète. La crĂ©ation doit donc jouer avec les outils de son temps et constamment s’adapter au contexte dans lequel elle s’applique. C’est seulement dans ces conditions qu’elle pourra devenir un atout considĂ©rable pour l’adaptation des entreprises au monde qui bouge. C’est d’ailleurs ce que Jules Verne a voulu exprimer avec la devise “Mobilis in mobile” (“Mobile dans l’élĂ©ment mobile”) inventĂ©e dans son roman 20.000 lieues sous les mers.
La rupture majeure qui marque notre nouveau millénaire est sans aucun doute due à l’avènement d’Internet. Apparu dans les années 90, ce réseau informatique mondial accessible au public offre l’instantanéité, l’ubiquité, la multidimensionnalité et amorce une disparition progressive de la fracture espace-temps. C’est à la fois un progrès indéniable dans notre manière de communiquer et d’échanger de l’information. Mais aussi une évolution très rapide qui complexifie l’effort d’adaptation des entreprises.
Smart city, smart home, voitures autonomes, assistants vocaux, … tout notre environnement devient connecté à mesure que la prolifération des IoT s’amplifie. Les usages de leur côté deviennent de plus en plus personnalisés et mobiles.
Ramené à l’échelle de l’Histoire, cet emballement du temps peut être daté au moment de la Renaissance. Il a ensuite été marqué, selon Nils Aziosmanoff, fondateur du Cube, par “l’émergence de la démocratie, du capitalisme, des sciences de la mécanisation industrielle, l’économie de marché, la mondialisation… C’est bien depuis le siècle des Lumières et au moment où l’Homme a réussi à dompter les énergies que les technosciences ont connu une accélération sans précédent.”
Au XXIè siècle, et plus particulièrement à partir de la deuxième décennie, ces technosciences passent une autre étape avec les développements faits en matière d’intelligence artificielle en informatique quantique, en nanotechnologies… La fusion du réel et de l’irréel s’accentue à mesure que le Big Data prouve de plus en plus sa capacité à délivrer une analyse plus fine du monde.
Une dualité perpétuelle entre création et destruction
Pour booster la création dans son entreprise, il faut bien garder à l’esprit qu’un acte de création implique systématiquement des effets de destruction. C’est le sens du progrès. Et c’est d’ailleurs ce qui anime la démarche artistique ; du moins au sens du peintre Pablo Picasso qui considérait que « Tout acte de création est d’abord un acte de destruction ».
Dans le monde économique, le concept de destruction créatrice a pris tout son sens dans les années 40 lorsque l’économiste Joseph Schumpeter a développé le concept de “destruction créatrice”. Selon lui, des secteurs économiques sont amenés à disparaître dès lors que de nouveaux sont créés.
Cette dualité est similaire au paradoxe entre ancien et nouveau monde. C’est un débat sur le sens de l’Histoire qui oppose souvent le camp des réfractaires au changement à celui des adeptes du neuf. Dans le contexte actuel, cette polarisation du débat se tient entre techno-optimistes et néo-luddites.
Ainsi nous avons pu constater, avec l’arrivĂ©e de la machine Ă vapeur ou l’électricitĂ©, des activitĂ©s Ă©conomiques devenir complètement obsolètes. Aujourd’hui, l’irruption du web et des technosciences rendent possible de nombreuses innovations de rupture qui crĂ©ent Ă leur tour les mĂŞmes effets Ă©conomiques. Un contexte bien similaire mais qui reste nĂ©anmoins inĂ©dit du fait de l’accĂ©lĂ©ration du temps et de la circulation de l’information. Bien plus encore, cet emballement s’opère dans un monde toujours plus globalisĂ© qui nous oblige Ă nous demander si la destruction ne viendra pas un jour dĂ©passer la crĂ©ation.
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Finie la prédation, vive la collaboration !
Force est de constater que depuis l’irruption du coronavirus, une bonne partie des entreprises maintiennent leur activitĂ© grâce aux outils numĂ©riques. La crise sanitaire provoque une accĂ©lĂ©ration et une mutation de l’acceptation technologique.
Cette crise soudaine nous rappelle Ă©galement l’incertitude quant Ă l’avenir du monde dans lequel nous vivons. Pour les entreprises, rĂ©ussir l’appropriation de ces nouvelles technologies par les collaborateurs n’est pas suffisant.
Tout d’abord, comme prĂ©cisĂ© plus haut, les dĂ©veloppements dans ce domaine sont en constante Ă©volution. Et toutes les secondes, nous faisons des dĂ©couvertes qui changent notre manière de voir le monde.
Les entreprises se retrouvent dans l’urgence d’accĂ©lĂ©rer leur transformation numĂ©rique pour Ă©viter le risque d’ĂŞtre Ă©vincĂ©es du marchĂ©. Plus encore, le numĂ©rique peut sans aucun doute permettre aux entreprises de s’adapter aux contextes de crise comme celle du coronavirus. Mais il restera inefficace si le collectif n’est pas embarquĂ© dans la dĂ©marche.
Concrètement, pour pouvoir s’adapter au contexte et devenir plus résilientes, les entreprises doivent tout faire pour embarquer le collectif vers la création de nouvelles pratiques, tout en “détruisant” les anciennes.
Embarquer l’humain et favoriser l’autonomisation des collaborateurs sont un atout considĂ©rable pour booster sa capacitĂ© d’adaptation au futur proche. Car l’humain est le cĹ“ur de l’entreprise, le rendre plus crĂ©atif c’est le rendre plus capacitaire. Voici le chemin Ă emprunter pour rĂ©ussir Ă rendre son entreprise plus rĂ©siliente. Parvenir Ă un taux d’appropriation des outils numĂ©riques n’est pas satisfaisant, c’est bien l’empowerment crĂ©atif qui demeure la clĂ© de la rĂ©silience.
La transformation digitale est nécessaire mais pas sans l’humain. En effet, le principal écueil chez les entreprises est d’utiliser le numérique pour amplifier l’ancien modèle. Cet écueil a d’ailleurs déjà produit des dérives liées à l’automatisation de la société, la surveillance généralisée… Les entreprises de demain devront donc défendre l’émancipation plutôt que l’aliénation, favoriser l’empowerment créatif plutôt que le leadership vertical.
En résumé, la résilience d’une entreprise aujourd’hui se tient en trois facteurs : l’autonomisation des personnes d’une part ; la coopération ensuite, qui, grâce au numérique, permet la production de savoirs collectifs ; et enfin, la créativité, placée au dessus de tout, qui stimule l’improvisation et qui permet aux collaborateurs de penser “out of the box” et de prendre des risques.