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La data, un moteur de la performance industrielle pour Siemens

Les systèmes de collecte et d’analyse des données de nouvelle génération facilitent l’évolution des usines vers l’industrie 4.0, pour plus de performance. A travers ses solutions, d’abord mises en œuvre en interne, Siemens mesure au quotidien les progrès réalisés ces dernières années. Entretien avec Vincent Jauneau, vice-président de Siemens France, directeur de la division Digital Industries.

Alliancy. Chez Siemens comme chez la plupart des acteurs de l’industrie, la digitalisation des usines est-elle en train de s’accélérer ?

Vincent Jauneau vice-président de Siemens France directeur de la division Digital Industries

Vincent Jauneau vice-président de Siemens France directeur de la division Digital Industries

Vincent Jauneau. A l’image de nos quatre sites industriels en France, en particulier celui d’Haguenau en Alsace, la transformation numérique des usines s’est accélérée au cours de la dernière décennie, grâce aux nouvelles générations d’automatismes et de solutions digitales. C’est une condition essentielle pour gagner en compétitivité.

Mais cette transformation ne s’improvise pas et, en France, toutes les entreprises du secteur industriel ne sont pas logées à la même enseigne. Si les grands groupes peuvent aisément investir pour intégrer les dernières technologies et rester à la pointe, les entreprises de taille plus modeste doivent gérer un outil de production parfois ancien, difficile à faire évoluer.

De manière générale, quelle est la marge de progrès, et pour quels bénéfices ?

Vincent Jauneau. Selon une étude que nous avons récemment réalisée avec McKinsey, 60 % des tâches de fabrication pourraient être automatisées, permettant d’accroître la productivité, la qualité et la sécurité. Or, chez la plupart des acteurs de l’industrie en France, un secteur en souffrance depuis des décennies, ce niveau d’automatisation est loin d’être atteint. Au sein du Gimelec, l’organisation professionnelle qui regroupe plus de 200 acteurs représentant environ 90 % de la filière électro-numérique française, nous sommes convaincus que la digitalisation des usines est un levier essentiel, notamment pour la réindustrialisation du territoire. En améliorant la compétitivité, elle peut compenser en partie les impôts de production et les coûts de main d’œuvre, et favoriser les relocalisations et les nouvelles implantations.

Comment pousser les industriels à miser davantage sur l’innovation technologique, et favoriser la convergence des mondes physique et numérique ?

Vincent Jauneau. La convergence entre les mondes des technologies de l’information et celles de production passe par une sensibilisation et un accompagnement des entreprises. En complément de l’Alliance Industrie du Futur, qu’il a co-fondée pour organiser et coordonner les initiatives, et des actions gouvernementales en faveur du secteur, le Gimelec a ainsi lancé un site dédié aux technologies de l’industrie 4.0 pour œuvrer dans ce sens. De son côté, en tant qu’acteur majeur de la filière électro-numérique, Siemens a multiplié les investissements et les partenariats au cours des dernières décennies pour élargir sa couverture technologique et son écosystème, afin de mieux répondre aux besoins du marché. Cet engagement s’est traduit par le lancement de la plateforme Xcelerator, qui regroupe un portefeuille de logiciels et de services numériques, un atelier de développement d’applications ainsi que l’écosystème de nos partenaires. Cette plateforme fait écho au concept de Totally Integrated Automation (TIA), qui encourage une automatisation unique pour favoriser l’interopérabilité et la circulation des informations.

Quels sont précisément les ressorts de la digitalisation des usines ?

Vincent Jauneau. Le jumeau numérique est un élément clé de la digitalisation des usines et de son accélération, en particulier pour la création de nouveaux sites. A travers une usine virtuelle, il permet de recueillir des données sur les composants de la chaîne tout au long de leur cycle de vie, depuis leur conception jusqu’à leur déploiement et leur utilisation, puis de les analyser pour anticiper d’éventuels points de friction. Une fois le modèle validé, le « Virtual Commissioning » constitue un autre élément clé de la transformation digitale, qui facilite la programmation des nouvelles machines de la chaîne de production et les tests. Pour les entreprises qui souhaitent moderniser des sites existants, en intégrant par exemple des systèmes de maintenance prédictive ou d’optimisation de l’ordonnancement, des PC industriels pré-packagés permettent aujourd’hui de disposer rapidement et à moindre coût d’indicateurs, à partir de données collectées sur le terrain en mode « Edge computing ».

[bctt tweet= »« Notre objectif est de réunir les mondes physique et numérique, en faisant converger les technologies digitales et les systèmes de production » » username= »Alliancy_lemag »]

Des exemples ?

Vincent Jauneau. En matière de création de nouveau site, le partenariat que nous avons conclu avec le spécialiste des batteries automobiles ACC (Automotive Cells Company) est emblématique. Notre technologie de jumeaux numériques permettra d’accélérer la mise en service des usines de batteries pour véhicules électriques sur le site de Billy-Berclau Douvrin, dans les Hauts-de-France. Dans le cadre de l’écosystème Xcelerator, Siemens devient le fournisseur privilégié d’ACC dans les domaines de l’automatisation, de la digitalisation et de l’électrification, ce qui lui permettra d’augmenter sa production, de maximiser l’efficacité de ses installations industrielles et d’optimiser la gestion de l’énergie sur ses sites. Autre exemple : la création par ASF 4.0 (Advanced Shoe Factory 4.0), filiale de Chamatex Group, de la première usine automatisée de chaussures de sport en France. Pour accompagner ce projet, Siemens a déployé un modèle d’usine 4.0 intégrant un jumeau numérique ainsi que des technologies telles que la réalité augmentée ou encore les robots autonomes.

Vous vantez les technologies Siemens, mais aussi celles de son écosystème. Quels acteurs regroupe-t-il ?

Vincent Jauneau. Pour enrichir en permanence l’offre de notre Digital Experience Center, créé avec le CEA, nous avons effectivement besoin de nous appuyer sur un ensemble de partenaires. Il peut s’agir d’acteurs très transverses, comme Orange et Bouygues dans le domaine des télécommunications, pour par exemple déployer des réseaux sans-fil dans les usines, ou comme la société de conseil en technologies Alten, qui nous accompagne dans le déploiement de nos solutions. Nous avons également noué des partenariats avec des hyper-spécialises dans des domaines de pointe, comme la data, la cybersécurité, l’internet des objets, etc. Ainsi, nous travaillons aujourd’hui avec une centaine de start-up.

Qu’en est-il des toutes dernières technologies, dites disruptives, en particulier dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA) ?

Vincent Jauneau. Dans ce domaine devenu particulièrement stratégique, nous venons d’annoncer un partenariat avec Microsoft à l’occasion de l’édition 2023 de la Foire de Hanovre. A travers ce partenariat, qui porte plus précisément sur l’IA générative, nous comptons améliorer la collaboration transverse lors des processus de conception, d’ingénierie et de fabrication, et plus globalement tout au long du cycle de vie opérationnel des produits, pour stimuler l’efficacité et l’innovation. Concrètement, nous allons intégrer notre logiciel Teamcenter avec la plateforme de collaboration Teams de Microsoft et les modèles de langage dans Azure OpenAI Service. Nous comptons ainsi démontrer comment cette nouvelle version, dotée de ChatGPT, peut améliorer l’automatisation en assistant les techniciens dans le signalement des problèmes et l’inspection visuelle de la qualité.

Les enjeux sociétaux sont-ils aujourd’hui suffisamment pris en compte dans cette digitalisation des usines ?

Vincent Jauneau. Non seulement nous contrôlons l’impact écologique des automatismes et des solutions digitales que nous déployons dans les usines, en termes de production de carbone et de consommation énergétique, mais ces systèmes permettent de mesurer la conformité des outils et des processus de production de nos clients en regard des enjeux environnementaux et sociaux. A son niveau, Siemens est engagé de longue date en faveur du développement durable, pour devenir une entreprise toujours plus inclusive, équitable et responsable. La compliance fait partie intégrante de nos activités. Elle est le meilleur moyen de protéger nos clients, notre entreprise et notre avenir.

Chiffres clés du groupe Siemens

  • Activité: groupe international d’origine allemande spécialisé dans les secteurs de l’énergie, de la santé, de l’industrie et du bâtiment.
  • Présence mondiale (% du chiffre d’affaires): Europe (hors Allemagne), CEI, Afrique et Moyen-Orient (30 %), Amériques (29 %), Asie et Australie (25 %), Allemagne (17 %)
  • Effectif : 311 000 collaborateurs, dont 6 000 en France
  • Chiffre d’affaires (2022): 72 milliards d’euros (29 % pour Digital Industries), dont 2,2 milliards en France
  • La division Siemens Digital Industries est un acteur de l’innovation dans les domaines de l’automatisation et de la digitalisation. En étroite collaboration avec ses partenaires et ses clients, elle œuvre à la transformation numérique de l’industrie manufacturière et de l’industrie des procédés.
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