Selon le rapport Global Gender Gap 2020 du Forum Économique Mondial, la parité entre les sexes au niveau global ne sera atteinte qu’en 2120. Une échéance non satisfaisante pour Delphine Remy-Boutang. Depuis 2013, la fondatrice et dirigeante de the bureau organise chaque année La Journée de la Femme Digitale pour trouver des moyens d’accélérer le processus d’inclusion des femmes dans le monde numérique. Dernière initiative en date : un Manifeste en faveur d’un monde digital inclusif.
Alliancy. Le 21 avril prochain se déroulera la prochaine édition de la Journée de la Femme Digitale… que doit-on en attendre ?
Delphine Remy-Boutang. Depuis 2013, la Journée de la Femme Digitale oeuvre pour une meilleure représentativité des femmes dans le monde numérique. Constitué de plus de 80% d’hommes, ce monde numérique est en train de s’écrire avec une plume masculine. En se privant de 52% de l’humanité, il reste biaisé. C’est pour ça que nous nous battons pour pallier cette surreprésentation masculine et mettre en valeur les profils féminins.
La JFD c’est plus qu’un événement, c’est aussi une communauté d’entrepreneures et cheffes d’entreprise à forte capacité d’influence. Nous souhaitons créer de la bienveillance et de l’entraide entre elles. Nous avons aussi créé en 2018 la fondation Margaret pour défendre la place des femmes dans le numérique autour de trois piliers : la formation et l’éducation, l’accès aux fonds d’investissements et la promotion de rôles modèles.
Delphine Remy-Boutang. Sur le premier volet, nous avons par exemple un partenariat avec la Grande École du Numérique pour favoriser l’inclusion des femmes dans la formation aux métiers du numérique.
Les deux autres piliers sont liés… Souvent, les entrepreneures qui attirent l’attention sont des startuppeuses ayant levé des fonds. Mais c’est assez réducteur car la réussite des femmes ne se traduit pas que par des levées, il y a aussi des exploits notables en termes de rentabilité ou des projets créatifs qu’il faut mettre en valeur. Je pense notamment à Sandra Rey avec Glowee ou encore Joséphine Goube avec Techfugees…
De la même manière, un biais reste encore très marqué s’agissant des levées car les femmes n’ont accès qu’à 1% des fonds présents dans le monde. Il n’y a pas assez de femmes autour de la table pour imposer leur vision. Il faut donc mettre en valeur des profils plus variés de femmes. Je pense encore à Anne de Bagneux, Directrice de la Stratégie et de la Transformation du groupe Transdev, qui est la seule femme présente au Comex de son entreprise. Ces femmes-là il faut les aider et ainsi montrer l’exemple.
Comment s’assurer que les entreprises et pouvoirs publics jouent le jeu en matière d’inclusion ?
Delphine Remy-Boutang. Chaque année, nous essayons de comprendre pourquoi les femmes sont sous-représentées. Mais au-delà des discours, il faut passer aux actes. C’est pourquoi nous avons lancé le JFD Manifeste. Concrètement, en signant le Manifeste les pouvoirs publics, entreprises et grands groupes internationaux s’engagent à prendre des mesures concrètes en faveur d’un monde digital inclusif.
Aujourd’hui nous comptons 16 signataires et nous passons au crible leurs efforts en matière de parité. Si les objectifs sont atteints, nous remettrons une certification. C’est un moyen de montrer les exemples à suivre avec un “palmarès des meilleures initiatives”, qui sera présenté le 21 avril prochain.
80% des emplois numériques vont se créer au sein d’entreprises qui ne sont pas nativement digitales. Nous voulons travailler avec les entreprises car souvent les métiers amenés à disparaître sont assurés par des femmes. C’est donc un enjeu de reconversion et de sensibilisation pour prouver que le numérique est accessible pour elles. Et contrairement à ce qu’elles peuvent penser, il ne faut pas être bon en mathématiques pour travailler dans le numérique, il faut surtout être créatif.