Ces annonces s’inscrivent dans la continuité d’une importante mobilisation réglementaire de l’UE ces dernières années, en particulier à travers les deux textes Digital Services Act et Digital Market Act, visant à réguler les usages sur le marché par les grands acteurs du numérique. Au-delà du réglementaire, le ton officiel est aujourd’hui très « musclé », alors que Thierry Breton annonce des audits comparés à des « descentes » au sein des plateformes numériques. Objectif : évaluer les algorithmes utilisés, mais aussi la façon dont sont prises en charge les missions de modération des contenus dans toutes les langues de l’Union. Et l’Europe n’est pas seule à mener ce combat.
De l’autre côté de la Manche, une loi déposée le 25 avril par le gouvernement britannique, entend également renforcer l’arsenal répressif contre les plateformes, en confiant de nouveaux pouvoirs à l’autorité de la concurrence. Dans le viseur là aussi, la vigilance des acteurs du numérique vis-à-vis de la désinformation, des arnaques et des faux-avis… Avec l’ambition d’infliger des amendes pouvant monter jusqu’à 10% du chiffre d’affaires. Cette nouvelle loi viendrait s’ajouter à un autre projet, la « Online Safety Bill » qui vise à mieux protéger les utilisateurs d’internet, notamment du cyberharcèlement.
Comme toujours, on peut s’interroger sur la capacité réelle des gouvernements de faire respecter ces lois à grande échelle à l’international et surtout à punir efficacement, même si Thierry Breton promet « la création d’une équipe extrêmement performante ». Les sanctions concernant les infractions aux RGPD, premier des règlements durcissant la relation aux plateformes en 2018, sont ainsi toujours autant observées pour estimer si elles sont suffisamment contraignantes et effectives vis-à-vis de géants aux milliards de revenus.
Pourtant, la capacité à définir un cadre et à le tenir s’avère aujourd’hui essentiel pour les Etats, alors que notre société dans son ensemble va connaître dans les mois à venir une forte accélération des usages portés par les intelligences artificielles génératives. Vouloir réguler au plus tôt ces pratiques parait en effet plus crédible que d’appeler à une « pause » dans le développement des IA. Reste à savoir comment, pour ne pas tuer l’innovation.
L’Europe n’est pas la seule à se poser ces questions. En Chine, le parti communiste chinois (CCP) craint de son côté au plus haut point le développement par ses propres entreprises d’alternatives à l’américain ChatGPT. Qu’Alibaba nomme son outils « Tongyi Quianwen » (« Vérité à partir de 1000 questions ») n’est en effet pas de nature à rassurer un Etat chinois qui dépend en grande partie de son contrôle de l’information, et qui préférait un « ChatCCP » qui ne fasse aucune « erreur » vis-à-vis de la vérité officielle. Après une légère accalmie ces derniers mois, les mesures coercitives sur les géants de la tech de l’Empire du milieu pourraient donc reprendre de plus belle.
Cet édito est issu de notre newsletter de la semaine du 24 avril au 28 avril 2023.
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