Le Master Dev France, l’un des grands rassemblements de la communauté Web 3.0, orchestré par Docaposte, a récemment été organisé à Paris. Au programme, un concours de code en live et des conférences autour des sujets qui animent la communauté des experts de la Tech et des développeurs de l’Hexagone. La dernière table–ronde de clôture, animée par Gilles Babinet, président du CNNum ; Olivier Vallet, président de Docaposte ; du Sénateur Patrick Chaize, Vice-Président de la commission des affaires économiques ; et Hayat Outahar, marraine de l’évènement, a été l’occasion de poser le débat sur le code dans la souveraineté. Entretien avec cette spécialiste de la blockchain, afin d’obtenir un éclairage sur le sujet.
Alliancy. De quelle(s) manière(s), les acteurs du WEB 3.0 définissent-ils le code dans la souveraineté ?
Hayat Outahar. Le Web 3.0 est la prochaine génération d’usages numériques. Dans ce cadre, le code dans la souveraineté fait référence à la volonté de combattre la rétention d’informations, l’exploitation des données sensibles et la surveillance abusive des gouvernements, des entreprises et de tout autre intrus dans la sphère numérique en concevant notamment des réseaux décentralisés et des applications gérées par des contrats autonomes appelés « Smart Contracts ».
La souveraineté est une affaire de défense et de sécurité au plan national. Sur le plan politique, l’enjeu réside précisément dans la capacité à contrôler et protéger les intérêts des citoyens et du territoire grâce à une infrastructure technologique indépendante. Pour garantir la sécurité nationale et protéger les intérêts géopolitiques et économiques, chaque pays doit être en mesure de contrôler et surveiller l’accès à ses données. Cela nécessite des investissements massifs notamment dans la formation d’ingénieurs qualifiés, un soutien financier autour des projets innovants, le renforcement des infrastructures numériques de l’État, et l’encouragement des entrepreneurs à développer des outils bénéfiques à grande échelle.
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Alliancy. Notre gouvernement s’est engagé dans une logique de souveraineté numérique. Pourtant, nos données stratégiques se trouvent toujours hébergées parfois dans le cloud de prestataires étrangers. Quelles solutions nous permettraient de sortir de cette dépendance ?
L’autre élément central demeure la protection des données personnelles, en particulier l’adhésion aux conditions générales d’utilisation des Gafam qui sont souvent acceptées par les utilisateurs sans réflexion.
A titre d’exemple, Google en sait sans doute plus sur nous que le Trésor Public. Les utilisateurs, peu conscients des pratiques de ces plateformes, ignorent que la manipulation de leurs données peut être un danger pour la démocratie. Nous avons tous en tête l’exploitation des données personnelles par Facebook et Cambridge Analytica dans le but de servir des intérêts politiques. Ce scandale vieux de presque dix ans est désormais un symbole des dérives malsaines dues à l’exploitation de nos données par des tiers. Surveiller et renforcer les règles en termes de RGPD me paraît être un élément essentiel pour protéger les utilisateurs.
Alliancy. Les développeurs ont-ils un rôle à jouer dans cette partition ? Ont-ils une responsabilité sur la mise en œuvre de cette souveraineté numérique ? Et enfin, quid de l’IA, est-ce une opportunité ou une menace pour l’avenir des développeurs ?
Hayat Outahar. Les développeurs ont une responsabilité éthique importante dans la souveraineté numérique en raison de leur rôle dans la conception des systèmes qui collectent, stockent et utilisent les données. Sécuriser l’accès à nos données pour en limiter l’exploitation douteuse est indispensable. Cela peut passer par l’utilisation de techniques de cryptages avancées mais surtout par la conception de logiciels qui intègrent les questions de vie privée dès le début du processus de développement. On parle souvent du danger de l’Intelligence Artificielle pour l’avenir des développeurs, je pense que c’est un faux débat. Loin d’être une menace pour les développeurs, je pense qu’elle est un soutien. Grâce à l’IA, on peut automatiser des tâches routinières, analyser des lignes de codes et même détecter des « bugs ». L’IA nous fait également gagner du temps et nous permet de focaliser notre énergie sur la résolution de problèmes plus complexes qui nécessitent une réflexion profonde et un travail d’équipe. Mon avis est qu’il est préférable de s’adapter aux innovations plutôt que de les craindre ou de les rejeter. Je pense qu’à l’avenir, le nombre de développeurs sur le marché dépassera le nombre d’emplois disponibles.
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