Avec la digitalisation accélérée de la santé depuis la crise sanitaire, ce secteur a décroché une place de choix durant le salon Vivatech qui vient de s’achever à Paris.Discours d’Emmanuel Macron, start–up, consortiums et innovations… Voici notre sélection de ce qu’il ne fallait pas manquer sur le salon.
Tout juste de retour d’Ukraine, vendredi 17 juin au matin, Emmanuel Macron a tenu à se rendre sur le salon Vivatech dans l’après-midi pour une intervention sur la scène principale. Dans une effervescence toute particulière, visible dans les allées du salon, le président de la République était entouré de quatre jeunes entrepreneurs, dont deux spécialisés dans la santé, Lifen(data) et Aqemia (recherche). L’occasion de fixer des objectifs très ambitieux pour les start-up de la French Tech, en citant pour exemple des fleurons comme Alan et Doctolib. Le président souhaite ainsi que dix géants européens émergent d’ici à cinq ans et qu’il y ait pas moins de 100 licornes françaises en 2030, dont un quart dans la greentech.
Le Président est revenu sur plusieurs sujets liés à l’innovation et la santé, domaine qui vit des heures compliquées. « On a des réservoirs de données de santé très peu comparables à d’autres pays mais le système public collabore peu avec le privé. Il faut qu’on donne un énorme coup d’accélérateur dans les prochains dix-huit mois. Il faut lever des contraintes », lance-t-il, au moment où l’Assurance Maladie annonce ouvrir à tous ses données ce mercredi 22 juin.
Emmanuel Macron est également revenu sur sa vision pour aider au développement de projets santé. « On a besoin qu’on forme mieux à l’université. Ça forme à travailler sur des sujets très complexes. C’est ça la compétence qu’apporte un doctorat. L'Etat en a besoin, il faut plus de doctorants dans des postes clefs d’encadrement », indique-t-il tout en encourageant les partenariats comme Paris Saclay où cohabitent universités, start-up, écoles de commerce et Polytechnique.
Rentrée au sein de Future4Care il y a trois mois, Whitelab Genomics utilise différents outils informatiques pour aider à la recherche et notamment sur les thérapies géniques. « On travaille avec des collaborateurs comme le généthon, financé par le téléthon et on les aide à optimiser leurs recherches et à l’accélérer, raconte Jean-Philippe Buffet, Project manager. Notamment avec des outils bio-informatiques, de la data science pour ressortir des données chiffrées de la littérature et tenter de trouver de nouvelles fonctions thérapeutiques ».
L’entreprise fondée en 2019 et composée de 13 salariés, travaille pour l’instant avec des clients en France et aux Etats-Unis mais n’a pas encore de produits à vendre. « Le but est de faire une suite d’outils personnalisés pour différents types de projets de recherche. On veut vendre ça avec une aide à l’utilisation de ces outils », indique Jean-Philippe Buffet. « La cible sont les entreprises biotech et l’industrie, ajoute Roberta Cobato, également project manager chez Whitelab Genomics. Ils vont avoir le plus de besoin pour avancer rapidement dans les phases précliniques ». La start-up vient de lever des fonds dont la somme reste secrète, afin de passer à une vingtaine de collaborateurs. Elle fait également partie du Biotech Scaler Program, lancé récemment par Microsoft France aux côtés de ses partenaires, l’Institut Curie et Cellenza.
Sur son stand particulièrement spacieux à Vivatech, le groupe public y a présenté de nombreuses technologies et innovations. Deux exosquelettes y étaient visibles. Le premier, Atalante, est conçu par une entreprise allemande et actuellement testé par l’entreprise DPD, outre-Rhin et en Suisse. Il permet de soulager les agents de livraisons dans la gestion manuelle des colis. Le second est moins lié à la santé au travail qu’aux handicaps. CrayX est le premier exosquelette auto-équilibré au monde. Il permet aux personnes handicapées des membres inférieurs de pouvoir se tenir debout et marcher. Conçu par le tricolore Wandercraft et financé par Louvre Banque Privée, filiale de La Banque Postale, ce modèle a valu la visite de Bruno Le Maire, mercredi 15 juin, en ouverture du salon. A noter qu’en début d’année, Wandercraft a levé 45 millions de dollars pour accélérer le lancement de cette innovation.
Présent au côté du Président sur la Stage One de Vivatech, vendredi 17 juin 2022, Franck Le Ouay, fondateur de Lifen a pu échanger avec Emmanuel Macron sur les problématiques de la santé. Fondée il y a sept ans, cette entreprise est désormais implantée dans 650 hôpitauxpublics. « On construit une infrastructure, pour faciliter le voyage de la donnée entre toute l’équipe de soins, explique Franck Le Ouay. Le but est que ces données soient exploitées en les mettant à disposition de toute l’innovation de la e-santé ».
A l’occasion du salon, la start-up a également annoncé une collaboration avec l’APHP et plusieurs autres entreprises : « Au sein du projet @HôtelDieu, cette alliance a pour but d’accélérer l'adoption des innovations numériques et en intelligence artificielle (IA) dans l'écosystème hospitalier ». En forte croissance, Lifen a levé 50 millions d’euros fin 2021, deux ans après un premier tour de 20 millions d’euros.
Aqemia, également présente auprès du Président sur la grande scène de Vivatech, a décidé d’utiliser la technologie pour la recherche médicale. Elle a mis en place une intelligence artificielle basée sur la physique quantique, afin de trouver des molécules médicamenteuses innovantes. Fondée en 2019, l’entreprise a déjà levé 1,6 million d’euros la même année.
En difficulté pour trouver un vaccin contre la Covid19 alors que Pfizer, Moderna ou AstraZeneca avaient déjà présenté des résultats satisfaisants sur leurs produits, Sanofi s’est allié à la start-up à la fin de l’année 2020 dans le but de trouver un antiviral contre le Covid. La start-up, promet une technologie 10 000 fois plus rapide que celles qui existent pour prédire l’efficacité des molécules, soit en quelques minutes, contrairement à quelques jours.
Fondée en décembre 2020, la start-up s’est placée sur le segment de la livraison à domicile de médicaments, grâce à une application smartphone. « On livre 24/24h, 7/7j en partenariat avec les pharmacies, assure Talel Hakimi, cofondateur de Livmed’s. C’est une solution qui va permettre de mettre en avant le produit auprès des consommateurs. On installe notre solution auprès du pharmacien, on le forme à traiter les commandes et il reçoit ensuite la carte vitale et l’ordonnance, poursuit-il. On a fait ce boulot de fourmis sur les prix de chaque pharmacie, sur les photos des produits, la posologie, pour que le patient voit les contrindications. »
La start-up niçoise qui promet une livraison en 30 minutes pour 4,99 euros en journée et 9,60 euros la nuit, a levé près de 2 millions d’euros en décembre dernier. Elle compte recruter une dizaine d’employés supplémentaires pour atteindre les 40 collaborateurs. Certains livreurs à Nice, Bordeaux ou Paris sont en CDI mais la plupart des 15 000 autres sont des indépendants. Présente sur le stand de Sanofi avec des sacs à dos roses au couleur de l’entreprise, Livmed’s a mis en place un partenariat avec la multinationale. « On travaille avec Sanofi sur la digitalisation des pharmaciens, précise Etienne Leroy, COC de la start-up. En 20 minutes avec notre service, il peut avoir une plateforme digitale de e-commerce. On va également aider Sanofi sur la vente en ligne de ses médicaments alors qu’eux vont nous aider grâce à leur réseau de pharmaciens et en lobbying.”
« On veut aider le patient, d’où qu’il soit et peu importe sa pathologie, à comprendre ses symptômes, explique Fabienne Ostermeyer, directrice générale de Medvir. Cette start-up s’appuie sur l’IA pour tenter d’aider aux diagnostics. En général, le patient décrit en premier, trois symptômes. Notre IA va ensuite l’aider à qualifier la gravité des douleurs, s’il a des données vitales comme sa tension on les intègre également. L’important c’est de savoir si le patient doit consulter tout de suite. C’est le point sur lequel on ne peut pas se tromper », assure-t-elle. La solution disponible sur smartphone ou ordinateur propose ensuite un diagnostic.
La start-up qui dispose d’une IA durcie, avec un algorithme fixe, travaille avec Sanofi sur les maladies rares. « On a 900 pathologies intégrées et on est en train de rendre avec Sanofi, un programme avec 300 maladies rares. Elles sont très difficiles à diagnostiquer et les gens sont souvent en errance pendant 2-3 ans, jusqu’à 10-20 ans », indique Fabienne Ostermeyer. A la fin du programme avec Sanofi, la multinationale va lancer un portail ouvert à tous. Cette start-up fondée par un médecin en 2013, se structure depuis seulement deux ans et l’avènement de la e-santé.
Owkin, anagramme de “I Know”, compte aujourd’hui 200 employés aux Etats-Unis et en Europe, qui conçoivent une intelligence artificielle pour la recherche. « On travaille avec de nombreux centres académiques et on analyse leurs données avec notre IA », explique Jean-Frédéric Petit-Nivard. Ainsi Owkin a collaboré avec le centre Lyon-Bérard sur le mésothéliome, un cancer de la plèvre dont le pronostic est mauvais. « On a eu accès à une base de données et on a essayé de comprendre qu’est ce qui permettait de savoir pourquoi les patients avaient un bon ou un mauvais pronostic. Et on a trouvé des paramètres neurobiologiques. »
Aujourd’hui, Owkin a signé des partenariats avec une vingtaine d’académies en Europe et aux USA pour avoir accès à des bases de données d’hôpitaux et tenter de faire avancer la recherche avec sa data plateforme. Une alliance a été signé avec Sanofi pour 90 millions d’euros, afin que la start-up aide la multinationale dans la recherche sur quatre maladies. Sanofi a également investi près de 190 millions d’euros pour rentrer au capital d’Owkin. A noter également qu’Owkin, avec Arkhn et Inria lancent le projet public-privé OncoLab avec plusieurs établissements de santé, pour traiter des données qui seront utilisées à des fins de recherche et d'innovation en cancérologie.
Docaposte, branche numérique de La Poste, est à la tête d’un collectif public-privé composé également d’AstraZeneca et d’Impact Healthcare, nommé Agoria Santé. C’est une plateforme d’analyse de données en vie réelle qui propose plusieurs services : hébergements sécurisés, solution d’analyse de data dans le but d’optimiser la recherche clinique... « La plateforme est terminée et dans les prochains moins, on lance des projets avec des laboratoires pharmaceutiques comme Astrazeneca », indique Cécile Lagardère, directrice des filiales et de la croissance externe santé chez Docaposte.
Un des services de cette plateforme est proposée grâce à la technologie d’Adobis, start-up dans laquelle Docasposte est entrée au capital à hauteur de 30 %. « Nous sommes un concepteur d’une solution data chain de traitement et d’analyse des données de bout en bout, explique Sandra Mathieu, fondatrice de la startup. On utilise de l'IA, de l’analyse et on rentre les résultats dans des dashboard. On est capable d’expliquer ce qui a été fait sur la donnée de bout en bout grâce à de la traçabilité ». Lancé voilà un an, le projet a mobilisé une vingtaine de personnes mais également une cinquantaine d’ingénieurs pour travailler sur la partie tech.