Les données et l’intelligence artificielle sont source d’innovations, mais aussi d’amélioration des processus existants, comme la prévision de consommation. Pour EDF, la stratégie Data sert les ambitions en matière d’optimisation et de décarbonation.
Data et intelligence artificielle sont mises au service des ambitions de transformation et d’innovation des entreprises. Toutefois, les applications résident également dans l’optimisation d’usages existants.
C’est ce que rappelle EDF avec son projet Score (Signal de Consommation Temps Réel) de prévision de la consommation, détaillé le mois dernier lors des Assises de la Data à Bercy. L’IA et l’open data ont donc été mis à contribution.
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Aller plus loin via l’IA sur des domaines déjà maîtrisés
L’énergéticien juge les résultats de Score “très concluants”. Il a pu, au travers de ce projet en production depuis 2022, “améliorer sensiblement” les prévisions “en temps réel, chaque heure, et être plus précis concernant les prévisions des jours à venir”, indique Damien Marolleau, expert métier d’EDF.
Si l’industriel a choisi de mettre un coup de projecteur sur Score, c’est notamment pour rappeler le potentiel en matière d’optimisation de l’existant. “EDF fait de la simulation de conso depuis des dizaines d’années, avec des moyens de calcul assez performants et des modélisations mathématiques”, souligne Florent Verrière, Group Chief Data Officer.
“La Data, l’intelligence artificielle associée, permet d’aller plus loin dans ces activités que nous maîtrisions déjà”, poursuit-il. Les données sont ainsi mises au service de l’amélioration de la performance opérationnelle, mais aussi de la transformation d’EDF.
Pour Véronique Lacour, Groupe Senior EVP, Transformation & Operational Effectiveness, la Data trouve sa place à tous les niveaux au sein de l’entreprise, qu’il s’agisse des processus, des pratiques ou des services.
L’IA et les données permettent “une approche déterministe de l’amélioration, c’est-à-dire basée sur des faits”, met en avant la dirigeante. Pour explorer les usages possibles de son patrimoine de données, EDF s’appuie entre autres sur des datalabs spécialisés dans des catégories de données (production, tertiaires, services aux clients…).
Priorité à l’efficacité opérationnelle, dont la maintenance
L’industriel se concentre en particulier sur les usages axés sur l’efficacité opérationnelle, et cela dans toutes les activités. Les données ont un rôle croissant à jouer dans un domaine clé pour EDF, à savoir la maintenance des centrales – et son efficacité.
“A travers la Data, nous cherchons à transformer notre maintenance classique”, déclare le CDO. Ainsi, ces opérations sont historiquement réalisées à des échéances prédéterminées et régulières. L’ambition est de basculer sur de la maintenance prédictive.
Ce changement de paradigme poursuit plusieurs finalités, dont une réduction des coûts de maintenance et des perturbations associées. “Maintenir une centrale nucléaire, c’est l’arrêter et donc cesser la production. Or, le contexte de production est assez tendu, en particulier en ce moment”, ajoute Florent Verrière.
Des projets ont déjà été initiés dans ce secteur de la maintenance, par exemple sur les générateurs vapeur. Le composant critique d’une centrale fait l’objet d’interventions spécifiques. Des dépôts accumulés réduisent l’efficacité de ces équipements. Pour contrôler le niveau de ces dépôts, une ouverture s’impose en principe.
EDF a tiré profit des données accumulées dans le temps sur ces générateurs afin d’identifier les facteurs influant sur leur encrassement. “Nous avons réussi à développer un modèle qui nous permet aujourd’hui de connaître, sans ouvrir le générateur et donc arrêter la centrale, le niveau de dépôt.”
La maintenance prédictive appliquée au nucléaire
Cette connaissance est mise à contribution pour déterminer le meilleur moment pour réaliser une opération de maintenance. A la clé des gains économiques. Le CDO rappelle que le nettoyage d’un générateur coûte en moyenne des dizaines de millions d’euros.
Les bénéfices résident aussi dans la réduction du temps d’interruption, ainsi que dans les effets environnementaux. La maintenance nécessite l’usage de produits chimiques. Son optimisation constitue par conséquent un progrès en termes d’impact environnemental, se félicite le chief data officer.
Voilà pour l’axe production. Mais la Data tient aussi un rôle dans les services fournis aux clients, leur expérience, ainsi que dans l’optimisation des tâches des collaborateurs, mentionne-t-il également.
Une illustration : les certificats d’économie d’énergie. Le dispositif défini par l’Etat en 2005 impose aux fournisseurs la promotion de l’efficacité énergétique et donc la réalisation de travaux.
EDF est donc amené à financer les travaux de ses clients, et à délivrer dans ce cadre des certificats. Pour le traitement de ces dossiers (plus de 25 000 par mois, pour un historique de 4 millions de dossiers), et garantir la bonne allocation des subventions, l’énergéticien s’est doté d’outils de contrôle.
“Nous avons développé une solution qui va analyser chaque dossier et le comparer avec la masse d’informations dont nous disposons afin d’identifier ceux présentant un risque potentiel”, détaille Florent Verrière.
Les dossiers ainsi identifiés sont transmis à des humains, qui vont en approfondir l’analyse. Cette automatisation permet de décharger des collaborateurs de tâches fastidieuses.
De la Data oui, mais responsable et frugale
Mais l’apport de la Data se situe aussi au niveau environnemental, “l’enjeu du siècle” pour Véronique Lacour.
“La consommation d’électricité va doubler d’ici 2050”, rappelle-t-elle encore. D’ailleurs, le numérique devrait fortement accroître son empreinte environnementale sur cette période, comme l’anticipent l’Arcep et l’Ademe.
Pour les producteurs d’énergie comme EDF, il est donc critique d’accentuer la part de l’énergie décarbonée et de contenir la hausse de la consommation. La société estime y participer via la collecte des données des compteurs Linky et son application mobile EDF et Moi.
La donnée présente toutefois une empreinte non négligeable, reconnaît le CDO. Pour soigner son bilan, l’entreprise s’est engagée dans une démarche de numérique responsable, indique-t-il. L’énergéticien a ainsi été labellisé par l’INR, une “première” pour un tel acteur, se félicite Florent Verrière.
En termes d’actions concrètes, EDF a donc revu sa politique de stockage de données, cessant de conserver tous azimuts les données. La firme se veut aussi “plus frugale” dans leur traitement, grâce notamment au respect de bonnes pratiques en matière d’IA responsable.
Ainsi, l’empreinte carbone est prise en compte dans le développement des différents modèles. L’objectif : parvenir à un meilleur équilibre entre efficacité de ces modèles et leur empreinte environnementale.