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Bruno Capdordy (Schneider Electric) : « L’arrivée de Linky et son impact sur le résidentiel et petit tertiaire, ont changé notre approche »

Entretien avec Bruno Capdordy, VP Home & Distribution France, Home & Distribution Division, France Operations chez Schneider Electric, sur l’impact de l’arrivée de Linky dans le paysage énergétique français.

Alliancy. Vous avez plusieurs casquettes… Quel est votre champ d’intervention aujourd’hui ?

Bruno Capdordy Schneider Electric

Bruno Capdordy, VP Home & Distribution France, Home & Distribution Division, France Operations chez Schneider Electric

Bruno Capdordy. Avec une équipe d’environ 200 personnes, nous sommes en charge de toute la partie développements produits pour le résidentiel et petit tertiaire en France (gamme d’appareillage électrique, distribution électrique, offres KNX et Wiser pour piloter des usages énergivores…) et nous animons également la clientèle des distributeurs et des grandes surfaces de bricolage, des architectes, des installateurs du résidentiel… Nous travaillons donc autant en BtoB que BtoC, avec des offres à la destination des consommateurs et des installateurs.

 

 

 

Alliancy. Quelle est votre approche face au déploiement de Linky en France ?

Bruno Capdordy. L’arrivée de Linky et l’impact qu’il a sur le résidentiel et le petit tertiaire, ont évidemment changé notre approche. Ce compteur communiquant permet de faire de la collecte à distance des données avec un protocole de communication dédié capable d’interagir avec les produits de la maison. Tout ce qui va se dérouler à l’extérieur du logement, Linky l’analyse et le restitue à Enedis et/ou à votre fournisseur d’énergie… Ensuite, il y a un besoin de relayer différents signaux que le fournisseur d’énergie va donner dans le logement, via les offres de gestion de l’énergie d’acteurs comme nous, Schneider Electric, mais aussi nos confrères Legrand, Hager, Delta Dore… L’idée étant de piloter les différents postes énergivores dans le logement.

Wiser Home Touch est à la fois la plaque tournante des produits Wiser et un écran tactile à partir duquel vous pouvez modifier les modes, les scénarios et la température.

Les signaux fournis via Linky, plus complexes et plus réactifs, nous permettent aujourd’hui d’avoir de vraies stratégies de « mini-grid » à l’intérieur du logement (autoconsommation, véhicule électrique, chauffe-eau électrique, heures pleines/heures creuses…), c’est-à-dire une modularité, une plasticité dans le pilotage du logement. Et, même si toutes les briques de la maison de demain ne sont pas encore assemblées, le champ des possibles s’élargit grâce à la plate-forme technologique qu’offre le déploiement massif du Linky.

Qu’est-ce qui fait qu’on n’y est pas encore ?

Bruno Capdordy. La transformation des logements va prendre encore un peu de temps… Pour décarboner nos consommations et assurer la baisse des gaz à effet de serre qui engendrent la hausse de la température, cela impose de revoir les modes de consommation énergétique dans un logement, voire de conception du logement. Nous allons devoir décarboner notre mix de consommation et donc combiner : un mode de transport ; des modes de chauffage ; des technologies de chauffe de l’eau basés sur l’électrique. Ainsi, nous allons nécessairement avoir besoin d’une capacité à auto-consommer et autoproduire notre énergie pour accueillir à la fois les nouveaux usages et éviter l’utilisation de mode de productions carbonés ou le déploiement de nouvelles sources de production que nous ne saurons pas maintenir sur le long terme.

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Le logement neuf répond partiellement à cet objectif et nous voyons des pays bien plus en avance que nous (la Californie a déployé massivement l’autoconsommation), mais le vrai challenge est le parc existant. Les 33 millions de résidence en France ont une empreinte carbone supérieure aux 350 000 logements que nous construisons tous les ans. Aujourd’hui, par exemple, il y a 80 000 installations en autoconsommation en France qui se font… sur un parc de 33 millions de logements. Pour atteindre un mix énergétique moins carboné, plus électrique, cela va donc prendre du temps si nous continuons à ce rythme. Le point positif est que la plateforme Linky permettra d’accueillir cette évolution des logements.

C’est-à-dire ?

Bruno Capdordy. Pour arriver à décarboner notre économie, l’autoconsommation, l’utilisation d’un véhicule électrique, etc. – dans le cadre d’un logement –  sont les solutions indispensables. Et, en France, une filière se met peu à peu en place… Des petites structures commencent à lancer des solutions clés en main pour des installeurs qui sont  ainsi capables de proposer des packages aux particuliers et de resynchroniser la consommation et la production qui se déroulent sur des cycles différents. C’est le cas d’acteurs comme MyLight Systems par exemple, qui développe des solutions de monitoring et de gestion de l’énergie solaire pour les installations photovoltaïques résidentielles, ou du fournisseur de solutions en énergies renouvelables NED, qui propose également une gamme de service connexes à cette activité.

Récemment, Voltalia a aussi annoncé son partenariat avec Ikea France pour la mise en place d’un service clé en main d’installation de panneaux solaires en toiture chez les particuliers dès cet automne 2020 dans le sud de la France, puis progressivement dans tout l’Hexagone. Tout comme EdF Energies Renouvelables, qui travaille à la réduction des délais de raccordements de ces énergies au réseau électrique et à l’approche en autoconsommation… De la part de tous ces acteurs, on voit donc l’urgence à bouger pour répondre aux défis énergétiques et sociaux auxquels nous sommes confrontés.

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Et quel est le lien avec Linky ?

Bruno Capdordy. C’est le dispositif qui nous permet d’assurer la « passerelle » entre le réseau et votre maison ou logement, doté ou pas de solutions d’autoconsommation, de borne de recharge de véhicule électrique, etc. Linky nous facilite le déploiement ! Le réseau communique avec le logement et, via les outils mis dans les mains des particuliers, nous pourrons mettre en place des stratégies d’effacement ou de pilotage du logement, tout comme d’adéquation avec les besoins du réseau et de limitation des perturbations…

Le marché est-il mature sur ces questions ?

Bruno Capdordy. Aujourd’hui, tous les fondamentaux qui permettent à un marché de l’autoconsommation de se mettre en œuvre dans le respect du consommateur et de l’équilibre du réseau sont en place. Les technologies de pilotage du logement chez les fabricants sont prêtes, le véhicule électrique et les bornes des recharges sont prêtes, les algorithmes de synchronisation sont prêts, la filière est de plus en plus formée, le marché n’explose pas encore, mais on peut imaginer que les choses vont bouger… A nous de continuer à animer et former un réseau d’installateurs sur ces solutions de pilotage du logement. En ce sens, Linky reste à découvrir et on y arrivera en poussant le déploiement de solutions décarbonées pour le logement.

Ce qui n’est pas si simple à comprendre pour le particulier…

Bruno Capdordy. Il faut arriver, via le guichet unique de l’Ademe par exemple, à avoir un package complet pour un particulier non éclairé… Il faut une politique unique qui accompagne cette transition, comme il faut des spécialistes capables de vous accompagner dans le choix et l’installation de tels équipements à votre domicile.

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