Opérateur d’infrastructures et de réseaux numériques depuis près de cinquante ans, le groupe TDF peut capitaliser sur une empreinte territoriale et une image de marque fortes. Positionnée sur des technologies de pointe, l’entreprise se transforme au fil des besoins clients et collaborateurs. Les explications de Pascale Varnière, directrice des opérations broadcast chez TDF.
>> Cet article est extrait du carnet à télécharger ETI en transformation
Comment s’exprime la transformation chez TDF ?
Au niveau Groupe, elle recouvre principalement des enjeux d’innovation technologique, de gestion de la donnée, de cybersécurité et de durabilité environnementale. Plus spécifiquement, concernant la BU [Business Unit] Audiovisuel et Réseau dans laquelle je suis, la transformation vise à améliorer la qualité de service perçue – notamment au travers de l’automatisation (gestion des centaines de milliers d’alarmes, des incidents, des communications, etc.), de l’upgrade de nos réseaux, des outils et de la simplification des processus – pour soutenir notre activité audiovisuelle et conquérir de nouveaux marchés.
Quel est le moteur de votre transformation : la technologie ou l’humain ?
C’est un tout. D’un côté, nos clients nous poussent à déployer les meilleurs outils pour répondre à leurs besoins de suivi, en temps réel, de la résolution des incidents. De l’autre, sans un outillage solide, impossible pour nos collaborateurs de rendre un service client de qualité. Il y a souvent beaucoup de simultanéités entre les remontées des clients et celles des collaborateurs. C’est un des enjeux majeurs d’une transformation réussie : embarquer les collaborateurs pour les faire adhérer et leur proposer des solutions qui répondent à leurs besoins métiers.
La transformation, et à travers elle notre capacité à rester compétitifs, est certes une question de processus et d’outils. Mais elle est avant tout une question de cohérence entre les attentes de nos clients, celles de nos collaborateurs et l’implication du management. Cette implication du management autour des outils, comme vecteur de compétitivité, est clé pour réussir la bascule vers les nouveaux processus automatisés qui viennent bouleverser nos modes de fonctionnement. Une étape critique tant il est important de prendre le virage de l’IA.
En quoi votre transformation diffère-t-elle de celle d’un grand groupe ?
Il n’y a pas de différence notable. Les problématiques sont les mêmes. Ce qui change, c’est le nombre de salariés et de personnes impliqués. La taille humaine d’une ETI est un atout, car la proximité avec la direction générale facilite les décisions, et par conséquent accélère la transformation. Chez TDF, les métiers sont ainsi particulièrement acteurs de ce sujet de transformation. A contrario, leur volume de travail quotidien limite le temps qu’ils peuvent accorder aux projets de transformation, là où les grandes entreprises ont la capacité à déployer des équipes dédiées. Or le but de la transformation est justement d’éviter d’alourdir la charge de travail des collaborateurs.
L’info en +
Créé après la scission de l’ORTF (Office de radiodiffusion-télévision française) en 1975, le groupe TDF compte aujourd’hui 1 800 collaborateurs dans trois domaines : l’audiovisuel, les télécoms et la fibre. Ex-filiale à 100 % de France Télécom (aujourd’hui Orange). Cet historique est une vraie particularité pour une ETI.
Quels autres freins avez-vous rencontrés ?
La diversité de nos SI rend nos outils très hétérogènes. L’un de nos chantiers vise, par exemple, à faciliter les échanges entre notre centre d’exploitation et nos équipes techniques sur le terrain. L’idée est de déployer un workflow de bout en bout : depuis la détection d’une alarme et la création du ticket d’incident, en passant par la transmission d’informations vers les équipes terrain pour accélérer leur intervention sur site et effectuer la remise en service le plus rapidement possible, jusqu’à la boucle de retours pour transmettre des informations pertinentes aux clients. Ce sujet avance bien, mais la complexité des SI est une contrainte pour atteindre la cible que nous nous sommes fixée.
[bctt tweet= »« La transformation ne consiste pas à remplacer un outil obsolète par un nouveau, mais bien à revoir l’ensemble de la chaîne, les processus et les méthodes de travail. » » username= »Alliancy_lemag »]Comment définiriez-vous la culture de transformation chez TDF ?
Elle repose sur l’orientation client, avec l’ambition d’améliorer sans cesse notre qualité de service et notre réactivité. Nos employés ont bien perçu toute l’importance de comprendre les attentes clients, et d’ajuster les produits et les services en conséquence. D’où la nécessité d’être dans une adaptation continue aux nouvelles technologies, au monde qui change, aux nouveaux outils, etc. Une culture de transformation reconnaît que le changement est constant. Sans cette remise en cause permanente, impossible de rester pertinents et compétitifs. Le constat est identique concernant la transversalité : la culture de transformation reconnaît que l’efficacité ne réside pas dans le travail en silo mais dans une approche transverse. Et les outils doivent nous aider à y parvenir.
En résumé, notre culture de transformation est une culture organisationnelle qui encourage l’innovation, l’adaptation au changement et l’agilité. Elle repose sur des valeurs et des comportements qui permettent à l’entreprise de prospérer dans un environnement en constante évolution. Réussir sa transformation implique donc de créer et de cultiver cet état d’esprit au sein de l’organisation. Déployer un outil induit de prendre le temps de comprendre comment il fonctionne. Mais une fois en place, la transformation n’est pas achevée pour autant. Il faut maintenir cet outil et le faire évoluer au rythme de l’émergence de nouveaux besoins métiers ou de nouvelles règlementations.
[bctt tweet= »« Être une ETI n’est pas une contrainte dans la transformation. La question est plutôt de voir comment l’entreprise, quelle qu’elle soit, appréhende l’IA. » » username= »Alliancy_lemag »]Concrètement, quel impact cette culture a-t-elle sur les équipes ?
Elle implique de donner du sens à la transformation, et de bien leur expliquer où nous voulons aller et pourquoi, tout en se repositionnant au niveau de l’entreprise : c’est l’organisation tout entière qui se transforme. En ce sens, la mise en place d’ateliers est très importante non seulement pour impliquer les collaborateurs, mais aussi pour comprendre quels outils ils utilisent et comment ils travaillent. L’important est de favoriser les interactions avec l’ensemble des entités de l’entreprise. Voilà ce qu’est véritablement la transformation : c’est revoir les processus de bout en bout, mettre en place des workflows qui facilitent la remontée des informations et être le plus efficace possible dans nos communications vers le client.
Quelle place occupent aujourd’hui l’IA et l’automatisation dans votre stratégie ?
L’invention de l’IA générative est comparable à celle de l’imprimerie ou de l’internet. Bien que nous ayons fait le choix de placer l’intelligence artificielle au centre de nos développements, de nos réflexions et plus globalement de notre stratégie, nous n’en sommes encore qu’aux balbutiements de l’IA. Nous avons ainsi déployé un lab interne en interaction avec les métiers, pour développer les premiers use cases avec la volonté très rapidement de les industrialiser. Il est important de s’approprier l’IA en interne, mais également de travailler de concert avec les éditeurs comme ServiceNow pour construire la bonne plateforme qui, à terme, permettra ce passage à l’échelle. Nous avons ainsi mis en place leur outil de ticketing en 2020 et nous sommes en cours de déploiement de leur outil de gestion de projet Strategic Portfolio Management (SPM).
La transformation joue-t-elle également un rôle pour attirer des talents ?
Par leur capacité à proposer plus rapidement des responsabilités importantes et la possibilité d’avoir un impact direct sur l’entreprise, les ETI offrent en effet des opportunités d’avancement plus vite que les grandes entreprises. Et ce, au sein d’environnements de travail plus conviviaux et moins bureaucratiques. De même, leurs valeurs entrepreneuriales sont synonymes d’innovation et d’agilité. Nous devons rester compétitifs et attractifs, mais ce n’est pas si simple. Les technologies comme l’IA peuvent s’avérer anxiogène pour certains collaborateurs. D’où l’importance de les accompagner et de leur montrer les usages quotidiens qu’ils peuvent en faire pour les rassurer. Nous travaillons, entre autres, sur la mise en forme de textes techniques, ainsi que l’analyse et la résolution automatiques d’incidents simples. Pour nos collaborateurs, c’est un vrai confort de travail.