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Gabriel Plassat (Ademe) : « Ne pas laisser le champ libre à Google »

L’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (Ademe) a lancé en octobre un appel à projets pour la Fabrique des Mobilités, un programme d’accélération européen dédié aux acteurs du transport et des mobilités. Gabriel Plassat, ingénieur à l’Ademe, nous en dit plus sur cette initiative et dresse les pistes à explorer dans le secteur.

Gabriel Plassat, ingénieur à l’Ademe. © Gabriel Plassat

Pourquoi avoir créé cet accélérateur au sein de l’Ademe ?

Nous finançons déjà beaucoup de projets car nous gérons plus d’1 milliard d’euros issus des investissements d’avenir (voir encadré ci-dessous). Dans le domaine du transport, il y a déjà un certain nombre d’acteurs bien établis. Mais nous nous sommes rendu compte que sur les cinq dernières années nous ne savions pas financer les start-up alors qu’elles ont complètement changé la mobilité.

Ceci-dit, contrairement à d’autres accélérateurs, notre dispositif n’est pas financier. Pour résumer, nous voulons aider les start-up à gagner du temps. Nous leur mettons à disposition des territoires d’expérimentation et des ressources apportées par des partenaires industriels et des collectivités. Nous en avons déjà fait venir une trentaine dans le programme. Maintenant, nous allons sélectionner des initiatives jusqu’au 13 novembre et allons mettre en relation les porteurs de projet et les partenaires pour trouver de nouvelles solutions de mobilité. C’est la raison d’être de la Fabrique : un dispositif culturel où start-up, grands groupes et collectivités pourront travailler ensemble en mode projet.

Quels sont les critères de sélection pour intégrer le programme ?

Nous privilégions les projets où il y a une équipe, une preuve de concept et au moins un client. Notre premier objectif est d’aider les start-up à passer de un à plusieurs clients. Pour cela, elles pourront utiliser les « communs », c’est-à-dire les données ouvertes, les logiciels libres, etc… Aujourd’hui nous pensons même faire contribuer les partenaires industriels au financement des communs car nous visons le marché européen. Et nous ne souhaitons pas laisser le champ libre à Google ! Par exemple, Transdev, RATP, PSA pourraient se mettre d’accord pour financer le développement d’un assistant de mobilité open source. Ainsi, des start-up pourront venir innover plus facilement avec eux. En 2016, nous imaginons même créer une association dans laquelle les partenaires seraient des adhérents. L’Ademe deviendrait ainsi un financeur parmi d’autres. Pour l’instant, les partenaires ne financent pas la Fabrique des Mobilités mais ils y contribuent sous forme d’autres « richesses » comme le mentorat.

Selon vous, quels sont les grands chantiers de la mobilité pour les mois à venir ?

D’abord, le covoiturage quotidien. Il faut absolument répondre à cette demande sinon Google va l’emporter avec Waze (ndlr, une application mobile de navigation GPS que le géant américain a racheté en 2013). Pour que cette solution ne s’impose pas à nous, il ne faut pas seulement s’interroger sur le sujet du transport en lui-même. Il faut partir sur la mise en œuvre d’un système de récompenses destiné aux personnes qui changent leurs pratiques, comme le covoiturage. Aujourd’hui, il est uniquement traité en rétribution monétaire. Il faut inventer d’autres mécanismes de récompense. Tout le monde a intérêt à le faire : les utilisateurs, les territoires mais aussi les entreprises.

Plus largement, il y a un autre sujet peu regardé : les incitations au niveau des pouvoirs publics. Il faudrait qu’une start-up se positionne sur la fiscalité et voir comment elle investirait ce champ qui concerne des systèmes de contraintes et de récompenses (impôt sur le revenu, indemnités kilométriques…). Il en existe une multitude, qu’elles soient financières ou non, qui renvoient au citoyen un message peu clair. Enfin, il y a le blockchain* dans le transport. La start-up israélienne LaZooz (ndlr, une application de covoiturage dont les paiements s’effectuent en bitcoins) a fait une première tentative. En France pourrait-on faire émerger des projets qui utilisent le blockchain pour générer de la confiance ? Je l’espère.

*Le blockchain est une technologie qui permet d’assurer l’intégrité de transactions décentralisées

L’Ademe a reçu 3,3 milliards d’euros du PIA

Créé en 2010 par l’Etat, le Programme des Investissements d’Avenir (PIA) est destiné à stimuler l’innovation, accroître la compétitivité des entreprises, favoriser l’emploi et promouvoir l’égalité des chances. Il s’articule autour de cinq domaines : l’enseignement supérieur et la formation, la recherche, les filières industrielles et les PME, le développement durable et l’économie numérique. Une enveloppe de 35 milliards d’euros a été allouée au programme en 2010, suivi d’une seconde de 12 milliards en 2013.

Depuis 2010, l’Ademe, qui est un établissement public placé sous la tutelle du ministère de l’écologie et du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, s’est vu confier 3,3 milliards d’euros du PIA pour accélérer la transition écologique et énergétique des entreprises et collectivités. 2,13 milliards sont destinés aux énergies « décarbonées », aux réseaux électriques intelligents et à l’économie circulaire. Le transport a obtenu un budget de 1,15 milliard d’euros pour développer de nouvelles solutions autour du véhicule, du transport ferroviaire et des navires du futur.

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