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Henri Adreit (Manutan) : « Sur l’IA, il faut se casser les dents sur certains projets pour apprendre »

Après avoir mené un hackathon et fait émerger 3 projets basés sur l’usage de l’intelligence artificielle, Henri Adreit, DSI du groupe de distribution européen Manutan, s’est retrouvé confronté aux problèmes qu’ont de nombreuses entreprises : le passage à l’échelle. Retour sur son expérience.

Henri Adreit (Manutan) : « Sur l’IA, il faut se casser les dents sur certains projets pour apprendre »

Henri Adreit, DSI du groupe (Manutan)

Comment une entreprise comme Manutan en vient à réfléchir à des usages IA ?

Henri Adreit. Nous sommes un groupe familial de distribution généraliste BtoB présent dans 17 pays à travers 23 filiales. Notre ambition est de pouvoir fournir aux entreprises, grandes et moins grandes, les mêmes services qu’un Amazon peut fournir aux particuliers, en centralisant des fournisseurs et achats qui seraient sinon éparpillés et difficiles à gérer. Pour y arriver, nous devons allier les solutions technologiques et l’intelligence humaine à tous les niveaux de l’entreprise. Il y a deux ans, avec la création de notre département digital transverse, nous avons donc commencé à explorer le sujet de l’intelligence artificielle de façon très ouverte, pour voir les opportunités concrètes qui s’offraient à nous autour d’un thème de plus en plus médiatique.

Quels ont été les rôles respectifs de la DSI et du département digital dans cette réflexion ?

Henri Adreit. Le département digital comptait 4 personnes à sa création, ils seront une douzaine d’ici la fin de l’année. Son focus est particulièrement sur les sujets d’expérience utilisateur. Notre DSI est un service européen centralisé pour toutes les filiales. Elle regroupe environ 50 personnes mais va connaître dans l’année à venir une croissance de 50% de ses effectifs pour traiter l’ensemble des nouveaux sujets de l’entreprise. En effet, si elle s’est pendant longtemps concentrée sur le renouvellement de la plateforme technologique qui soutenait la transformation de l’entreprise, elle doit aujourd’hui aussi industrialiser les nouveaux sujets comme l’IA qui transforment nos usages. A ce titre, nous recrutons actuellement un nouveau DSI et je vais prendre pour ma part une responsabilité de directeur du digital permettant de faire le lien efficacement entre ces deux mondes. Nous pensons que c’est le bon moyen pour permettre de dépasser le stade des expérimentations.

Quel a été votre expérience en la matière ?

Henri Adreit. Sur l’intelligence artificielle, nous avons été confrontés particulièrement à la problématique du passage à l’échelle. Nous avons mené un hackathon afin de moderniser nos fonctionnements sur de nombreux sujets variés. Nous avons fait participer des partenaires de notre écosystème, comme IBM – pour tester Watson – ou encore notre intégrateur sur la partie e-commerce, afin d’expérimenter autour du plus d’idées possibles. Cela a permis de faire émerger des applications très intéressantes de l’IA pour notre entreprise : l’optimisation des visites de nos commerciaux sur le terrain, la possibilité pour les clients de faire des recherches par l’image, ou encore un bot pour assurer une partie du SAV.

Avez-vous réussi à déployer ces innovations à l’échelle du groupe ?

Henri Adreit. Nous étions emballés, donc nous avons voulu déployer tous ces projets. Mais nous nous sommes rendu compte que celui pour les commerciaux devait s’intégrer plus largement dans notre changement de CRM et qu’il ne pouvait pas s’y rattacher juste comme cela… Nous avons été confrontés à des réalités de roadmap, tout simplement. Quant à la recherche d’image, nous manquions de compétences pour vraiment faire aboutir un projet satisfaisant pour le groupe. Nous avons par contre pu travailler sur le chatbot pour la relation client de façon efficace. Et cela nous a inspiré. Nous allons rapidement déployer un second chatbot, cette fois-ci tourné vers l’interne pour amener du self-service RH à nos collaborateurs. Nous ne sommes pas dogmatiques : pour ce nouveau projet, nous allons à la découverte de start-up qui pourrait répondre à nos besoins. Nous voulons mener des déploiements en interne mais aussi nous appuyer sur l’écosystème.

Entre ces deux types d’approches, laquelle vous parait au final faciliter l’industrialisation ?

Henri Adreit. Je pense que la question de l’industrialisation n’est pas forcément liée à une approche interne ou externe.  A mon niveau, j’ai pu voir un outil comme IBM Watson être très facile à prendre en main et qui a permis aux développeurs de faire beaucoup de choses pendant les deux jours du Hackathon. Mais au-delà du prix de l’outil, quid effectivement du long terme ? Sur l’IA j’ai besoin fondamentalement de faire progresser les équipes et pas qu’on nous donne tout, tout fait, sans explication. On doit pouvoir se casser les dents sur certains sujets pour apprendre et s’améliorer. Parfois, il suffit d’ailleurs de peu de chose pour qu’une solution externe propose un compromis intéressant en la matière. Ainsi nous travaillons sur des sujets d’up-sell et cross-sell en e-commerce avec Target2Sell. Là aussi, nous craignions l’effet « boite noire », mais avec une console d’administration orientée métier et permettant à celui-ci d’activer différents leviers business et d’apprendre des conséquences, les résultats sont intéressants. L’industrialisation s’est faite en quatre semaines, après un déploiement en A/B testing sur nos deux plus grands pays, la France et les Pays-Bas. Nous avons été bluffés par l’impact business et maintenant l’outil tourne à l’échelle du groupe depuis un an.

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