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[Edito] Le chemin vers l’IA générale d’OpenAI, une quête vertigineuse qui pourrait sonner le glas de l’Europe

Le chemin vers IA Générale OpenAI

Vous avez été impressionné par l’accélération technologique et commerciale de l’intelligence artificielle depuis deux ans ? Vous n’avez encore rien vu, car celle-ci n’est pas encore assez rapide et ambitieuse pour Sam Altman. Bien loin des appels à la prise de recul et à la modération face aux enjeux d’intégration sans heurts de l’IA dans nos sociétés et nos économies, le patron d’OpenAI, qui édite ChatGPT, veut que tout aille plus vite, plus haut, plus fort. Quitte à donner l’impression qu’une bulle s’est formée.

En réalisant une nouvelle levée de fonds de 6,6 milliards de dollars, la pépite américaine de l’IA générative (IA Gen) confirme les dimensions vertigineuses de tout ce qu’elle entreprend. Dorénavant valorisée à 157 milliards de dollars, elle a rejoint SpaceX et ByteDance (TikTok) sur le podium des plus grandes entreprises non cotées. Les autres chiffres sont à l’avenant. ChatGPT compte aujourd’hui 250 millions d’utilisateurs mensuels. Et après avoir fait passer son chiffre d’affaires de 1 à 3,7 milliards en un an, la jeune pousse a annoncé un objectif de 11,6 milliards de dollars pour 2025. Les dépenses annuelles de l’entreprise s’élèvent ainsi à 7 milliards de dollars par an… avec pour résultat près de 5 milliards de pertes. Chez l’éditeur de ChatGPT, tout est excessif.

Ce n’est d’ailleurs pas surprenant, car la quête elle-même d’OpenAI, a des aspects de gigantisme par sa seule nature. Son but ultime ? Atteindre au plus vite l’intelligence artificielle générale (IAG), capable d’être multitâche, autonome et aussi intelligente que les humains. « Pour le bien de l’humanité », a rappelé Sarah Friar, sa directrice financière. Et c’est pour cela qu’elle estime nécessaire de devenir une « entreprise plus traditionnelle », alors qu’elle était jusqu’à présent une organisation à but non lucratif. Car, malgré toutes ses bonnes intentions, OpenAI se verrait bien dominer seule le Graal de l’IAG.

Ainsi, selon Reuters, OpenAI aurait demandé aux investisseurs ayant mis au pot lors de ce dernier tour de table de s’abstenir de soutenir les concurrents. Une demande assez classique dans l’absolu, mais la firme est allée plus loin en listant précisément les cibles auxquelles elle faisait référence : xAI, société d’Elon Musk ; Anthropic (qui édite le modèle d’IA Gen « Claude ») ou encore Safe Superintelligence, créée récemment par l’un des cofondateurs d’OpenAI, Ilya Sutskever. Idem selon Reuters pour les entreprises Perplexity et Glean.

Il faut dire que la course s’accélère encore. OpenAI annonce des « agents » d’IA autonomes dès 2025, pour permettre à toute personne d’optimiser son quotidien en déléguant des tâches variées à ses IA. On imagine sans doute encore mal quels impacts pourraient avoir ce nouveau cap technologique franchi. Le principe d’agent autonome est souvent vu comme un deuxième niveau de développement après l’IA générative, avant celui plus complexe de l’IA générale. Mais ce qui est certain, c’est que sur le marché, celui qui tirera le premier aura certainement un avantage considérable pour imposer ses ambitions. De la même façon qu’en ouvrant ChatGPT au grand public fin 2022, OpenAI pourrait de nouveau remettre un impressionnant coup de pied dans la fourmilière et prendre de vitesse ses concurrents, avec l’espoir de devenir encore plus la référence absolue de l’IA pour construire le monde de demain.

De ce côté-ci de l’Atlantique, perçoit-on ce sprint effréné vers ce qui pourrait être, bien plus encore que ChatGPT, une révolution mondiale ? En Allemagne, lors du Berlin Global Dialogue réunissant les élites politiques, Emmanuel Macron a mis en garde. « Nous sommes en danger. […] Si nous restons sur le même agenda au cours des deux ou trois ans à venir, nous serons en dehors du marché », a-t-il mis en avant en parlant de manière générale des investissements nécessaires non seulement dans l’IA, mais également la santé ou la défense. Il est allé jusqu’à imaginer la disparition de l’Union européenne si rien ne changeait, face à l’écrasante compétitivité américaine et, sous un autre aspect, chinoise. Mais l’Europe a-t-elle vraiment « deux ou trois ans », si OpenAI provoque une nouvelle accélération massive dès 2025, « pour le bien de toute l’humanité » ?

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