L’association Green IT vient de publier la troisième édition de son étude sur les impacts environnementaux du numérique dans le monde. Un panorama qui a retenu comme méthode d’évaluation l’Analyse du Cycle de Vie (ACV) multicritère.
Cette étude met tout d’abord en exergue le fait que, en 2023, le numérique mondial représente 3,4 % des émissions mondiales de GES. Entre 2019 et 2023, les émissions de GES mondiales tous secteurs confondus ont augmenté de plus de 1,9 %. L‘impact mondial du numérique a suivi la même tendance de croissance. C’est pourquoi la part du numérique dans l’empreinte mondiale semble rester stable, malgré un accroissement des impacts. L’étude met aussi en avant la relation entre les impacts du numérique et le budget soutenable pour rester sous le seuil critique des limites planétaires. Ainsi, le numérique consomme 40% du budget annuel soutenable d’un internaute pour rester en dessous de 1,5°C de réchauffement climatique conformément aux accords de Paris. Ce qui apparaît fortement disproportionné en rapport aux besoins essentiels : manger, boire, se loger, etc. De même, le numérique mondial consomme 28 % du budget soutenable annuel par internaute en matière d’épuisement des ressources en minéraux et métaux.
Six équipements actifs par internaute en 2023
L’étude met également en lumière que le numérique est tout sauf immatériel, avec autour de six équipements actifs par internaute en 2023. Ainsi, si le numérique était un pays, il émettrait autant de gaz à effet de serre (GES) que deux fois le Canada ou 5,5 fois la France.
Le chiffre de 30,5 milliards d’équipements avait été estimé à 34 milliards d’équipements (pour 4,1 milliards d’internautes ayant en 2019, lors de la deuxième l’édition de l’étude), soit environ huit équipements par internaute. Cette différence est principalement due à une différence de sources dans l’estimation du nombre d’objets connectés (IoT) dans le monde. L’estimation réalisée pour cette étude s’appuie sur deux sources différentes, mais concordantes, rendant la valeur relativement fiable. Hors IoT, l’étude montre une augmentation de 13,8 % du nombre d’équipements en quatre ans (+3,3 % en rythme annualisé), alors que dans le même temps, le nombre d’internautes a bondi de plus de 30 %. Cette différence s’explique par le fait que les nouveaux internautes, principalement situés dans les pays d’Asie Centrale et d’Afrique, possèdent moins d’équipements que les internautes plus anciens. Le plus grand réservoir de nouveaux internautes étant dans ces régions du globe, on peut s’attendre à la poursuite de cette tendance : une augmentation du nombre d’internautes et du total d’équipements, accompagnée d’une baisse du taux d’équipement moyen par internaute.
Les appareils les plus utilisés dans le monde sont les smartphones (4,6 milliards), les moniteurs et téléviseurs (2,4 milliards), les téléphones fixes (1,7 milliard) et les feature phones (téléphones mobiles basiques : 1 milliard). Le nombre de smartphones est en croissance de plus de 31 % en quatre ans. Le nombre de téléviseurs en service progresse également dans la même proportion, notamment grâce à l’allongement de leur durée de vie utile et un « boost » temporaire des ventes durant la période covid-19. Concernant les ordinateurs, on note une légère augmentation de 5 % de leur nombre total entre 2019 et 2023 (pour atteindre 1,5 milliard), mais une nette progression de la part des ordinateurs portables en comparaison aux ordinateurs fixes, passant de 56 % en 2019 à 69 % en 2023.
Datacenters : 79,5 millions de serveurs dans le monde
En 2023, toutes activités confondues, on compte environ 79,5 millions de serveurs accompagnés de plus de 8,2 millions d’équipements réseau dédiés aux centres informatiques. La consommation électrique des centres de données (datacenters) est estimée à 506 TWh par an, soit à peu près autant que la consommation d’un pays comme l’Allemagne. Parmi ces 506 TWh, près de 190 TWh, soit environ 37 %, sont dévolus aux équipements dits « non-informatiques » (batteries, onduleurs, systèmes de gestion thermique ici appelés « climatisation », etc.). Au sein des centres informatiques, la consommation électrique est de loin la première source d’impact, sauf pour l’indicateur utilisation des ressources en minéraux et métaux, qui est principalement lié dans l’ordre d’importance, à la phase de fabrication des serveurs et des batteries.
Le cas particulier des serveurs IA
En 2023, les serveurs dédiés à l’intelligence artificielle représentent déjà 1 à 5% des impacts environnementaux des centres informatiques selon les indicateurs, et ce, malgré leur faible nombre en proportion des autres serveurs.
Les serveurs configurés pour l’IA émettent déjà près de 4% des émissions de GES du numérique, soit déjà plus que l’ensemble des ordinateurs portables. Au regard des projections de croissance à venir des usages des technologies IA, la proportion des impacts des serveurs IA est amenée à s’accroitre encore plus rapidement dans les prochaines années, avec les conséquences environnementales correspondantes. On note cependant déjà que les serveurs configurés pour l’IA consomment plus de 18 % de l’électricité des centres informatiques, alors qu’ils ne représentent que 2 % des quantités de serveurs.