Parce qu’il n’est plus possible en 2022 de prétendre ne pas avoir d’alternatives aux Gafam, Alain Garnier, CEO de Jamespot et membre du collectif PlayFrance, revient pour Alliancy sur la nécessité de donner la priorité aux éditeurs tricolores et européens de solutions et plateformes. Près de 400 entreprises ont été référencées par PlayFrance.
Alliancy. Pourquoi avoir réalisé cette infographie ? Quels critères ont été choisis ?
Alain Garnier : Cette infographie s’est imposée à nous quand nous avons commencé à recenser les acteurs du numériques souverains en France.
Car avec Pascal Gayat, on avait l’ambition de montrer que le choix était énorme dans le secteur. Face, à la critique de « il n’y a pas d’alternatives » martelée avec succès par les acteurs dominants notamment du Cloud. Cette infographie a permis en un coup d’oeil de battre en brèche cette idée reçue.
Les critères pour construire cette carte sont d’une part d’être souverain dans son offre logicielle mais aussi d’aller dans ce sens, d’adhérer à PlayFrance, au référentiel Sollain et surtout d’avoir une taille suffisante pour être un industriel solide. Le mapping a aussi cette logique de label ou de filtre pour un décideur.
Peut-on être Made in France pour tout ?
La logique de PlayFrance n’est pas « jusqu’au boutiste ». On travaille à un ré-équilibrage des marchés pas un protectionnisme total. Il faut mettre en perspective qu’aujourd’hui 76% des achats logiciels en France sont américains. On vise plutôt 25% et le reste pour la France, l’Europe mais aussi le reste du monde.
Ensuite, on pense que le made in France (et Made in Europe) doit s’étendre à toute la chaine de valeur. Car ce n’est pas sain qu’un seul pays ou continent détienne le monopole de production d’un bien numérique. En attendant, par exemple sur le matériel, il faut en effet parfois accepter cette dépendance.
Quel appel lancez-vous à l’Europe ?
La bonne nouvelle c’est que l’Europe est majoritairement dans la même situation que la France. Avec une domination des éditeurs de logiciels et du Cloud américain. Seuls les pays nordiques semblent prendre une voie plus vertueuse. Aussi, il y a un consensus qui se déploie. On l’a vu sur les taxes GAFAMs, comme plus récemment sur le DMA (Digital Market Act). Ces actes juridiques pour diminuer l’emprise des GAFAMs (même si ils ne sont pas nommément només) ont été mis en place rapidement. Ce qui prouve la volonté de l’Europe d’évoluer. Donc un seul mot d’ordre : continuer à accélérer la ré-industrialisation numérique de notre vieux continent en investissant d’une part et en se protégeant des pratiques prédatrices des acteurs dominants.
Comment favoriser nos écosystèmes de la tech ?
Nous pensons qu’il faut agir sur trois leviers. Le premier est culturel : comment mettre en avant les réussites de la tech européenne pour démontrer que tout existe. Ensuite, le deuxième est légal afin de stopper les comportements anticoncurrentiels. Enfin, et c’est la mesure la plus importante à mettre en place à court terme, il s’agit de flécher au moins 50% des achats publics vers les acteurs de la tech Européenne. On a initié un travail sur le sujet ou on a mis en lumière plus de sept leviers et moyens pour mettre en place cette mesure de manière opérationnelle. Ce qui démontre qu’il y a de nombreuses solutions à cette question essentielle. On estime aussi que cette mesure permettrait de reprendre des parts de marché conséquentes en moins de cinq ans. Ce qui est très court à l’échelle des politiques publiques industrielles.
Le combat est donc devant nous et à notre portée !