Pour cette nouvelle émission Inspiration, Alliancy s’est rendu dans les locaux d’OVHcloud à Paris pour rencontrer Michel Paulin, le directeur général de l’hébergeur français et Marc Juhel, Cloud Software Manager de Veeam en France. Incendie des datacenters à Strasbourg, culture cloud, sécurité, souveraineté… Les échanges se sont focalisés sur des sujets stratégiques pour les entreprises.
Pour OVHcloud, l’incendie de son data center à Strasbourg aurait pu être un épisode médiatique éphémère. Mais l’événement survenu en mars 2021 a depuis fait les gros titres, réactivant par la même occasion des débats récurrents autour de l’hébergement des données.
Alliancy a choisi de s’entretenir avec Michel Paulin, directeur général d’OVHcloud et Marc Juhel, Cloud Software Manager de Veeam en France, pour aborder la thématique de la transformation cloud, de la confiance et de la sécurité, tout en s’efforçant de dépasser les effets d’annonce.
Un contexte de ruptures
D’emblée, Michel Paulin entre dans le vif du sujet des grandes ruptures : celle des incendies de Strasbourg évidemment, mais aussi celle de la crise sanitaire de la Covid-19. Ce contexte inédit, associé à la généralisation du télétravail, a selon lui « exacerbé la transformation des entreprises vers le digital ».
Même constat du côté de l’éditeur Veeam où les usages cloud ont accéléré. Marc Juhel précise : « Le cloud a rapidement mis en musique des solutions collaboratives », permettant ainsi aux collaborateurs de continuer à travailler.
Les deux cloud providers ont constaté que « la notion de backup » n’est pas assez répandue chez les entreprises et c’est en ce sens qu’OVHcloud a annoncé le lancement d’une nouvelle offre « Hyper résilience », destinée notamment à offrir à ses clients des sauvegardes gratuites de données, par l’intermédiaire de Veeam. OVHcloud et Veeam veulent garantir la « confiance, la sécurité et la souveraineté » des outils et systèmes proposés à leurs clients et partenaires.
« Nous constatons une incertitude liée à la pandémie, à la fois dans la sphère personnelle et individuelle », explique Marc Juhel, avant d’évoquer d’autres crises qui ont également des conséquences sur les habitudes des entreprises. Sur l’événement des incendies à OVHcloud, ce dernier précise que les acteurs gravitant dans cet écosystème ont tous réagi pour renforcer leur sécurité, notamment par le biais d’audits de sécurité renforcés et des programmes complets de PRA (Plan de reprise d’activité) pour « restaurer les données en quelques clics ».
Enfin, Marc Juhel rappelle que « les ransomwares se sont multipliés par quatre en un an » et cela montre l’importance de l’hygiène numérique et de considérer la valeur économique que représentent les données.
Pour Michel Paulin, il ne fait aucun doute que les données sont au cœur d’enjeux financiers, ne serait-ce qu’en constatant l’argent que se font les Gafam à partir d’elles. Il cite une étude de KPGM attestant que le marché du cloud dépassera celui des telecom d’ici 2025 et garantira plus de 500 000 emplois – si l’alternative européenne se renforce.
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Des enjeux aussi géostratégiques
Mais au-delà de la valeur économique, c’est aussi sur le terrain géostratégique que cette data se retrouve enchevêtrée. « Les Etats utilisent aussi les données, elles peuvent être un moyen d’influencer… voire manipuler des élections », ajoute-t-il pour insister sur la nécessité de se mobiliser « pour établir ce cadre de confiance, de transparence et de réversibilité ».
Le rôle d’OVHcloud semble donc évoluer sur ces enjeux de souveraineté, à partir de deux critères : la garantie de sécurité via le label SecNumCloud de l’Anssi et la protection face aux lois extraterritoriales d’une part ainsi que le renforcement des investissements pour des solutions européennes et la promotion des meilleures pratiques « pour un cloud ouvert, réversible et transparent. » d’autre part.
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Ce projet de fondation d’un « écosystème de bonnes pratiques » est d’ailleurs défendu par Michel Paulin au sein de Gaia-X, dont il est membre du board. « À la fin, la souveraineté c’est la liberté de choix… ce n’est pas du protectionnisme », confirme-t-il. « Gaia-X est au croisement des chemins et c’est à nous de montrer que nous pouvons lutter contre des forces qui ne veulent pas ouvrir le capot »…
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Autrement dit, ce dernier veut montrer l’exemple et espère – avec l’aide des Etats et de la réglementation européenne – que les entreprises deviennent « impitoyables sur ces sujets » et ne soient plus des « victimes compatissantes de ce modèle ».
« Est-ce que l’Europe veut être systématiquement à la remorque, incapable d’assumer sa souveraineté technologique ? », interpelle Michel Paulin tout en appelant les donneurs d’ordre à soutenir massivement la recherche en ce sens, à l’image des écosystèmes technologiques américains et chinois largement dopés par le public. « Ces écosystèmes ne sont pas arrivés là par hasard, poursuit-il. Nous allons assumer nos responsabilités et continuer à recruter et à investir en ce sens ».