Invité d’honneur de la Digiworld Week organisée à Montpellier, du 17 au 19 novembre, le créateur de l’encyclopédie collaborative défend le business model de son organisation.
Alliancy, le mag. Wikipedia a ubérisé avant l’heure, les encyclopédies Britanica et Universalis. Y a-t-il un risque pour elle d’être ubérisée à son tour ?
Jimmy Wales. Bien sûr que nous pouvons être ubérisés ! Il y a toujours des évolutions technologiques qui peuvent le permettre. Aujourd’hui, tout le monde va de l’avant, et de plus en plus vite. Nous devons penser en permanence à des transformations technologiques. Je pense par exemple au mobile. C’est quelque chose de très important pour nous.
C’est un enjeu critique pour bien des acteurs du numérique. En quel sens est-ce si important pour Wikipedia ?
Aujourd’hui, il faut reconnaître qu’il est très difficile d’apporter une contribution à Wikipedia depuis un terminal mobile. Au vu du développement du marché du mobile, cet usage aura forcément un impact sur l’activité de Wikipedia. C’est pourquoi nous travaillons énormément sur cette problématique.
Vous avez développé en Afrique des partenariats avec des opérateurs Internet pour un accès gratuit et sans abonnement à Wikipedia…
Nous sommes une organisation sans but lucratif. L’objectif de Wikipedia a toujours été de proposer gratuitement un savoir dans la langue de l’utilisateur. C’est là, dans les pays où les utilisateurs n’ont pas les moyens d’avoir Internet, bien qu’ils ont un téléphone portable, que notre impact humanitaire est le plus important. Dans certaines zones du monde, les utilisateurs découvrent leur première encyclopédie grâce à Wikipedia.
Wikipedia lance actuellement une campagne de dons en France. Votre business modèle est-il viable ?
Pour faire tourner Wikipedia, cela coûte 1 centime par lecteur et par mois. Cela veut dire que si vous faite un don de 20 euros. Vous pouvez dire au 2 000 prochaines personnes que vous croisez : « Hey, j’ai payé ta contribution à Wikipedia » (rires). Bien sûr, on doit faire attention, mais notre business modèle est bon. Nous avons des donateurs fidèles avec une base large de petits donneurs. C’est très important pour nous car cela nous rend indépendant.
A titre personnel, vous venez de participer à la création de TPO, un opérateur de réseau mobile virtuel (MVNO). Quel est la nature de cette entreprise ?
TPO est l’acronyme de « The people’s operator ». Le principe, c’est que 10 % de votre facture va à l’opérateur de votre choix, et que 25 % des profits de l’entreprise vont à une œuvre de charité. Pour moi, c’est une approche qui caractérise une nouvelle façon de faire ce commerce. On ne dépense pas d’argent en marketing et en publicité à la télé, mais dans une cause qui tient à cœur aux utilisateurs, qui en parleront à leurs proches. En Grande Bretagne on est passés en quelques mois de 14 000 utilisateurs à 50 000 utilisateurs. On vient de se lancer aux Etats-Unis. Nous le ferons dans le reste de l’Europe dès que possible.
La France fait-elle partie de vos cibles ?
Oui. Nous sommes actuellement en discussion avec des opérateurs. Et nous espérons proposer TPO en France dès l’an prochain.
Avec quel opérateur de réseau mobile (MNO) discutez-vous ?
Je ne peux pas vous le dire, désolé. On devra peut-être discuter avec chacun d’entre eux. On a besoin du meilleur accord… J’espère pouvoir vous le dire l’année prochaine !