[Billet d’humeur] Tout ça pour ça. C’est un sentiment de grande frustration qui prévaut après la censure du gouvernement par l’Assemblée nationale, mercredi 4 décembre.
Les partis politiques prouvent, une fois encore, qu’ils n’ont définitivement pas la culture du compromis et d’un fonctionnement efficace dans une Assemblée fragmentée, contrairement à ce que l’on observe ailleurs en Europe. Avec l’horizon de l’élection présidentielle de 2027 (ou même avant, selon les souhaits de certains…), chacun se retranche sur ses positions et fixe des lignes rouges. Autant de marqueurs de « pureté » partisane destinés aux futurs électeurs de leur bloc.
Au-delà de l’épineuse question du budget 2025, sur lequel pèse plus d’incertitudes que jamais, ce comportement a pour conséquence générale de forcer la France à l’immobilisme. Cela est particulièrement vrai lorsque l’on regarde l’avenir numérique. L’Hexagone, et plus largement l’Europe, fait face à un défi majeur : celui de parvenir à s’arrimer aux transformations mondiales qui se jouent à très grande vitesse, notamment autour de l’intelligence artificielle et, demain, du quantique, alors que l’écart se creuse avec les blocs américain et chinois.
Or, depuis la dissolution, la France tourne au ralenti. À un gouvernement démissionnaire, traitant pendant deux mois les affaires courantes, a succédé un gouvernement en sursis, sans boussole. Finalement, ce sont six mois qui ont été perdus dans la course à l’innovation. Six mois loin d’être anodins dans la préparation aux nouveaux paradigmes qui vont transformer notre économie. Si la secrétaire d’État Clara Chappaz n’a pas démérité ces dernières semaines pour susciter de l’envie et de l’enthousiasme en portant l’image d’une France ambitieuse et leader sur l’intelligence artificielle, le soufflet risque fort de retomber bien vite, faute de décisions politiques concrètes.
La France n’aura pas de gouvernement pour accueillir symboliquement la cinquantaine de chefs d’État et de gouvernement lors de la réouverture de Notre-Dame de Paris, les 7 et 8 décembre. À ce stade, face à l’immobilisme, on en vient à espérer que le pays dispose au moins d’un gouvernement et d’une ligne directrice claire les 10 et 11 février pour le Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle organisé à Paris. Faute de cela, ce sommet n’aura d’« action » que le nom, et il sera difficile de faire croire que le pays est prêt à s’adapter à un avenir qui arrive à toute vitesse…