Bpifrance Le Lab a interrogé plus de 1 800 dirigeants de PME et ETI sur leur maturité digitale. Pour 87 % d’entre eux, la transformation digitale n’est pas une priorité stratégique. Aussi, pour les accompagner, l’institution leur propose des outils d’analyse et d’aide à la décision adaptés.
La transformation numérique concerne l’ensemble des secteurs et toutes les tailles d’entreprises. Surtout, elle ne consiste pas à simplement injecter de la technologie. Réussir sa transformation à l’ère du numérique implique de créer de la valeur autrement : il faut adopter une approche centrée sur le client, évoluer vers une réelle transversalité organisationnelle et favoriser la co-innovation.
« Les patrons ne différencient pas bien numérique et informatique, confirme Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance. Aussi, le challenge qui est le nôtre, c’est de leur faire comprendre que la digitalisation, c’est moins compliqué que les jeux vidéo et, surtout que ce n’est pas cher. Un capteur ne coûte plus rien aujourd’hui. Il faut arriver à dédramatiser cette question. Car ceux qui n’y vont pas vont courir de graves fuites de clients, notamment dans l’industrie. Les grands groupes vont les lâcher ».
« Le nouveau système de production, c’est le système d’information ! » Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance.
Pour faire bouger cette situation, le patron de BpiFrance estime que l’entrepreneur doit dialoguer en toute sérénité, « avec nous et des consultants dont c’est la profession. C’est pourquoi il nous faut des armées de gens qui vont voir les patrons de PME. On en a pris conscience. Notamment dans nos accélérateurs, dans lesquels il y a un volet transformation numérique très important. »
7 000 missions de conseil seront ainsi réalisées par Bpifrance cette année, qui couvre également la France d’un réseau d’accélérateurs, sectoriels et territoriaux, dans lesquels sont attendues 4 000 sociétés à terme.
Mais ce n’est pas encore suffisant, c’est pourquoi Nicolas Dufourcq en appelle à une « mobilisation générale de tous les autres réseaux que ceux de Bpifrance », que sont les experts-comptables, les collectivités territoriales… « Les clés du succès, c’est l’explication ! On va le leur expliquer et ils vont comprendre. Il y a un travail autour de la confiance à mener ».
Encore loin du but
Concernant l’étude dévoilée ce matin, « elle quantifie la peur », d’où son nom : « Histoire d’incompréhension : les dirigeants de PME et d’ETI face au digital ».
Bpifrance Le Lab y constate une forte hétérogénéité sectorielle au sein du tissu économique français en matière de transformation digitale, les secteurs du BTP et des Transports étant les moins avancés. Plus globalement, les résultats de l’enquête montrent un certain retard des PME et des ETI. Un dirigeant sur cinq considère que le temps de se transformer n’est pas venu !
45 % des dirigeants interrogés n’ont pas de vision de cette transformation de leur entreprise et 87 % n’en font pas une priorité stratégique. Et ils sont encore 47 % à considérer que l’impact du digital sur leur activité ne sera pas majeur à cinq ans. Plus grave encore, plus de 60 % des répondants n’ont pas du tout d’outils de collecte de données, ni aucun suivi de leurs clients sur leurs besoins, leurs attentes…
« Mais il n’est pas question de s’arrêter à ce constat ou de stigmatiser tel ou tel secteur, insiste Pascal Lagarde, directeur exécutif de l’International, de la Stratégie, des Etudes et du Développement. Notre objectif est au contraire d’adopter une logique constructive et positive, qui fait partie de l’ADN de Bpifrance le Lab, en donnant aux dirigeants de PME les bonnes clés pour réussir leur transformation digitale. »
D’où la proposition d’une méthodologie de travail, qui est une matrice de transformation digitale (publiée sous forme de poster). C’est un outil d’aide à la transformation concernant le client, l’organisation et l’écosystème. « Si le dirigeant s’en saisit, cette matrice est un véritable levier pour les PME, qui ne savent pas souvent par où commencer », explique Alban Guyot directeur de l’entreprise du futur.
Début 2018, cette initiative sera assortie d’un « Guide de transformation digitale », pour réellement aller au bout de sa transformation.
Pierre-Marie Gaillot pilote du déploiement AIF auprès des entreprises du Cetim a cité en exemple l’entreprise d’Indre-et-Loire, Ester, passée de « sceptique à apprentie » : ils ont su écouté leurs clients, détaille-t-il. Désormais, tout besoin insatisfait est pour eux une opportunité de marché et la data est devenue le cœur de la proposition de nouvelles valeurs pour les clients… Ils ont mis en place le data mining et du virtual engineering avec eux. »
On voit là que ce n’est pas seulement une histoire de moyens financiers, mais qu’il faut y aller pas à pas.
Après l’international début septembre, une troisième étude sur l’attractivité des talents dans les PME et ETI va bientôt suivre. « C’est leur plus gros problème aujourd’hui », conclut Nicolas Dufourcq.
Lequel êtes-vous ?
L’étude a identifié trois grands profils de dirigeants face à la digitalisation, tout en donnant des conseils pour passer d’un groupe à l’autre.
- Les Sceptiques (38 % des répondants) : ils ne croient pas en la révolution digitale ou demandent encore à en être convaincus. Leur défi est de s’acculturer et d’initier le projet de transformation.
- Les Apprentis (52 %) : ils ont compris l’importance de la transformation digitale et ont déjà engagé quelques actions en ce sens. Leur objectif est de structurer leur projet.
- Les Conquérants (10 %) : ils sont pleinement engagés dans la transformation digitale de leur entreprise et bougent de nombreuses lignes. Il leur reste à fédérer les équipes autour du projet de transformation.