À l’heure d’envisager leur avenir professionnel, les jeunes talents tendent à fantasmer sur des métiers dont la réalité ne correspond pas forcément à l’idée qu’ils s’en font. Parallèlement, certaines fonctions continuent de les rebuter, victimes de stéréotypes datés mais tenaces. Comment inverser le cours des choses ?
À l’heure où le destin de centaines de milliers de bacheliers dépend des algorithmes de Parcoursup, il est frappant de constater que les projections des professionnels en herbe ont finalement peu évolué. Pourtant la réalité des métiers à l’image traditionnellement attractive n’est pas forcément reluisante. Ainsi, le journalisme fait partie des métiers les plus précaires et mène plus sûrement à grossir les bataillons de chômeurs qu’à réaliser des reportages passionnants aux quatre coins de la planète. Une étude du site de recherche d’emploi Qapa classe le journalisme en tête des métiers qui recrutent le moins. Autre exemple, les architectes, que l’on tend à envier, tirent le diable par la queue après de longues années d’études, confrontés à la réalité d’un marché du travail ultra-élitiste (25 % se retrouvent en grande difficulté économique avec des revenus à peine supérieurs à 500 euros par mois). Enfin, les créatifs qui pensaient trouver un métier artistique dans le graphisme et le web-design, se heurtent souvent à la réalité des contraintes du monde de la communication et de ses diktats pas toujours poétiques.
De toute évidence, nombre de professions généralement appréciées, jugées « glamour » et perçues comme créatives et intellectuellement stimulantes, se traduisent au quotidien par une succession de tâches routinières et prosaïques.
Une dualité qui interroge
À l’autre extrémité du spectre des métiers attirants, l’image des métiers financiers — comptable, trésorier ou autre fiscaliste — lunettes sur le nez et costume élimé épluchant, calculette à la main, des centaines de pages de liasse fiscale, agit comme un repoussoir pour les jeunes générations à la recherche d’activités stimulantes, porteuses de sens, et de qualité de vie… C’est un fait, les métiers du chiffre sont confrontés à une importante pénurie depuis plusieurs années. Et la tension risque de s’aggraver encore dans les prochains mois. En France, les projections de la très sérieuse DARES (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) sur les métiers les plus pourvoyeurs d’emplois en 2022, classent les services administratifs et financiers au quatrième rang après les agents d’entretien, les aides à domicile et les enseignants.
Dans le même temps, une autre étude réalisée par l’institut statistique du Ministère du Travail a classé les métiers qui procurent le plus de bien-être psychologique au travail, et les résultats sont à rebours des stéréotypes collant à la peau des fonctions comptables et financières. Les cadres des services administratifs, comptables et financiers se hissent au quatrième rang des jobs assurant le plus de satisfaction et de sérénité aux salariés. Pourquoi, alors, les candidats ne se bousculent-ils pas au portillon ?
Réputés sérieux, ingrats et peu stimulants intellectuellement, il semble exister une déconnexion réelle entre la réalité vécue par les salariés des métiers comptables et l’image qu’ils renvoient à leurs congénères — notamment cette fameuse génération Y ultra-connectée et digital-native.
La digitalisation à la rescousse des différents métiers
Contrairement aux préjugés — à l’instar des Ressources Humaines qui ont cessé de n’être que des chambres d’enregistrement des données employés, pour monter d’un cran stratégique — la comptabilité n’est pas si routinière. A fortiori à mesure que la digitalisation croissante du métier permet de la délester des tâches itératives et sans valeur ajoutée. Exit les saisies manuelles interminables et le stress des clôtures qui rythmaient jusqu’ici la vie des services comptables, à une fréquence de plus en plus rapprochée. Des solutions technologiques existent désormais pour leur permettre de lisser leur charge de travail sur une saisonnalité plus longue, et effacer les cernes de leurs collaborateurs, continuellement penchés sur des listes de chiffres interminables à pointer, comparer, consolider et réconcilier.
En bénéficiant de l’automatisation des processus les moins porteurs de valeur ajoutée, les professionnels de la fonction comptable et financière peuvent enfin se dédier au rôle d’expert du chiffre, à même d’accompagner les opérationnels dans leurs problématiques financières, et déployer leur savoir technique sur des sujets stratégiques ou spécifiques. De nos jours, la complexité des normes et les exigences croissantes de conformité conduisent à une montée en gamme de la fonction comptable vers des tâches plus valorisantes et porteuses de sens et de reconnaissance.
Déjà, les départements administratifs et financiers qui ont le mieux négocié leur virage digital ressemblent de plus en plus à des open space de start-up. A l’ère des big data et du zéro papier, les métiers comptables se parent d’une attractivité nouvelle et de solides arguments pour des générations soucieuses de préserver le sacro-saint équilibre entre un travail stimulant et leur épanouissement personnel.