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Laurent Bédé – Digital ou numérique ?

L’académie française est formelle, le mot – digital – désigne ce qui appartient aux doigts et les académiciens nous invitent à utiliser – numérique – à la place dans un contexte informatique. Je ne vais pas m’improviser défenseur de la langue française car évidemment, l’anglicisme – digital – ayant sournoisement intoxiqué la plupart des esprits, le combat est perdu avant d’avoir été mené.Cela dit, je ne résiste pas à l’envie de creuser le sillon.

Laurent Bédé, Directeur BI et Nouveaux usages, secteur du luxe 

Reprenons : si digital est ce qui appartient aux doigts alors les natifs du digital se distingueraient de leurs aînés par des phalanges au bout des mains tels des amphibiens mutants sortant d’une marre primordiale.

Cette génération serait ainsi équipée pour mener la transformation des doigts, jusqu’à une rupture pour finir par une révolution, le bras tendu et le poing fermé en proclamant de nouveaux doigts de l’homme !

Pouce !

Au-delà de l’ironie, reste que malgré l’imposture, le succès du mot ‘digital’ pourrait s’expliquer justement parce qu’il crée involontairement ce lien intime entre le tangible et l’intangible.
Numérique – trop conceptuel et abstrait nous effraie et on lui préfère l’idée que l’on pourrait le réduire à l’interaction de ses doigts avec un écran tactile.
L’emploi du mot digital à outrance serait donc l’expression de notre cécité intellectuelle, une réponse inconsciente à notre peur des abstractions.

Le digital est le numérique que l’on peut toucher

Selon cette idée, la transformation digitale se cantonne aux interfaces homme machines et n’est qu’un petit sous ensemble visible et donc rassurant de la révolution numérique.
À trop promouvoir le digital, nous focalisons notre attention sur le doigt du sage qui nous montre la vérité.

Encore faut-il que les organisations ne se cachent pas derrière leur petit doigt en faisant l’hypothèse hasardeuse que les peintres s’occupent aussi des fondations. La révolution numérique mérite une gouvernance d’entreprise qui mobilise et synchronise tous les acteurs qui doivent lui obéir au doigt et à l’oeil.

Ne prenons pas le risque de nous priver de l’immense potentiel du numérique en continuant à ne compter que sur nos doigts.

Il appartient donc notamment aux professionnels du numérique, les informaticiens, de participer proactivement à cette transformation en s’appuyant sur les fondamentaux de leurs expertises: infrastructures, réseaux, sécurité, performance, cloud, intégration, conduite de projets, optimisation des coûts, veille technologique et expérimentations.

Croisons les doigts !

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