Depuis sa création en 1999, le salon Laval Virtual a grandi en même temps que s’étendaient les champs des possibles de la réalité virtuelle. La création d’une Cité de la réalité virtuelle sera pour cette ville de la Mayenne, l’apogée.
« Cette année, la tendance est aux “smart glass” et je pense que, l’an prochain, les premiers outils de manipulation des “big data”, destinés à faciliter leur exploitation, commenceront à apparaître sur le salon », confiait, en avril dernier, Laurent Chrétien, le directeur de Laval Virtual, lors des 16e Rencontres internationales des Technologies et Usages du virtuel. Les sociétés françaises Laster Technologies et Optinvent y présentaient notamment leurs prototypes de lunettes connectées, commercialisées depuis cet été auprès des professionnels.
Créée en 1999, cette manifestation, avec ses 128 exposants (dont 10 % sont Japonais) et ses 15 000 visiteurs en 2014, s’érige sans conteste comme le plus grand salon européen de la réalité virtuelle. « En 1995, François d’Aubert, tout juste élu maire de Laval, était également secrétaire d’Etat au Budget et à la Recherche, raconte Guy Le Bras, son vice-président. J’étais alors directeur de cabinet à la mairie. Il a voulu créer une osmose avec ses fonctions locales et a commencé à réfléchir aux avancées technologiques intéressantes pour le département. » Après le lancement de Laval Virtual, l’étape suivante a été la création d’un écosystème venant compléter la Laval Mayenne Technopole et son pôle Réalité virtuelle, créé en 1997. « Pour attirer les entreprises et les start-up, nous avons fondé en 2000 le centre de réalité virtuelle Ingenierium, raconte-t-il. L’Ecole nationale supérieure d’Arts et Métiers ParisTech y a installé son laboratoire. »
L’Ingenierium est animé par l’association Clarté, un centre de recherche, d’études et de transfert technologique spécialisé dans la réalité virtuelle et la réalité augmentée, né en parallèle de la Technopole. Clarté s’appuie sur la plate-forme technologique de l’Ingenierium et sur ses propres solutions pour mettre à disposition des entreprises son expertise, ainsi que les environnements de travail permettant une visualisation immersive, des interactions 3D et un travail collaboratif à distance. La structure a déployé deux autres centres, à Nantes (Loire-Atlantique) et au Mans (Sarthe), et accompagne de grands groupes comme Nexter Systems ou Saint-Gobain dans leurs travaux de recherche sur la réalité virtuelle.
Clarté assiste aussi les TPE/PME. « Notre rôle consiste à les sensibiliser à l’usage de ces technologies et à leur montrer leur intérêt pour le développement de leurs activités », explique Jean-Louis Dautin, son directeur. C’est ainsi que le groupe Alliance Industrielle Métallurgie (AIM), spécialisé dans la transformation et l’assemblage de métaux, avec 300 salariés et un chiffre d’affaires de 34,5 millions d’euros, et sa filiale AIMM, installés à Changé, près de Laval, y ont fait appel.
En 2004, AIM a créé AIMS, suite à la reprise de l’activité production de Stechmo, et regroupé les différentes entités d’AIMS sur la zone industrielle des Touches. Huit ans plus tard, le groupe a choisi de fusionner ces deux filiales. « Les interactions de process entre leurs usines étaient de plus en plus nombreuses », raconte Hugues Douillet, directeur technique et développement d’AIMM. Dans cette optique, l’usine de 12 000 mètres carrés de Changé a été agrandie de 8 000 mètres carrés. Une refonte complète des flux a eu lieu avec des transferts d’équipements, des modifications de poste de travail… Grâce à la visualisation 3D en taille réelle, AIM a notamment évité une erreur de construction. « L’architecte avait dessiné l’extension en fonction du mur coupe-feu, au lieu de suivre la charpente du bâtiment existant. Par chance, la structure métallique n’était pas encore fabriquée », se souvient Hugues Douillet. La modélisation 3D a représenté environ 1 % des 4 millions d’euros investis.
Le centre de démonstration Lives (Lifelike Immersive Virtual Experience Space), situé sur le 3DS Campus de Dassault Systèmes à Vélizy-Villacoublay (Yvelines), est équipé des technologies de réalité virtuelle les plus récentes. Un immense systèmes de projection sur trois faces (mur frontal, mur latéral, sol) immerge l’utilisateur au coeur des produits virtuels et leur permet de se déplacer dans cet environnement. |
Vers une démocratisation de la réalité virtuelle
Encore réservée voilà quelques années à des secteurs comme l’aéronautique, l’automobile ou d’autres industries manufacturières, la réalité virtuelle investit de nouveaux marchés. David Nahon, directeur de l’Immersive Virtuality Lab de Dassault Systèmes, le confirme : « Nos équipes Industrie en charge de l’énergie, un important marché de diversification pour 3DS, analysent activement les technologies de réalité virtuelle. Former le personnel à s’orienter et à prendre les décisions appropriées sur une plate-forme offshore ou dans une centrale nucléaire, est un enjeu considérable. »
3DS s’intéresse également aux domaines de la culture, de la santé, de la grande distribution ou encore de la banque. Dassault Systèmes a récemment annoncé la création du premier cœur humain virtuel simulé en 3D, développé en collaboration avec une équipe pluridisciplinaire notamment composée de spécialistes du cœur engagés dans la lutte contre les maladies cardio-vasculaires. Appelé Living Heart, ce projet représente une avancée dans le diagnostic, le traitement et la prévention des maladies cardiaques au moyen de modèles virtuels 3D personnalisés. David Nahon est membre du comité de pilotage du Plan industriel Réalité augmentée et chargé de mission sur les orientations stratégiques de l’Association française de réalité virtuelle, augmentée, mixte et d’interaction 3D (AFRV), associée à la création du groupe French Augmented Reality.
Parmi les leaders français, l’éditeur de logiciels TechViz, né en 2004, propose des solutions de visualisation immersives et stéréoscopiques pour plus de 150 applications 3D professionnelles. Sa technologie de prototypage virtuel évite aux entreprises le recours à la création coûteuse de maquettes à taille réelle. Leader mondial, la société compte plus de 300 clients, dont 90 % à l’international, dans l’auto- mobile, l’aéronautique, le BTP, le nucléaire, la recherche et l’éducation. « Dans les autres secteurs, les usages de la réalité virtuelle sont encore embryonnaires », estime Alexis Vartanian, co-fondateur et directeur technique de Techviz. En juin 2013, la société a inauguré un espace immersif à quatre faces, un espace immersif (Cave) de 50 mètres carrés au sein de son siège social parisien, visant à promouvoir son application. De nombreuses démonstrations de « Cave » étaient d’ailleurs visibles sur Laval Virtual cette année.
Une Cité de la réalité virtuelle en projet
Lancé à l’automne 2011, le projet de Cité de la réalité virtuelle, a pour ambition de conforter la place de leader européen, acquise par Laval Agglomération. Près de 8 000 mètres carrés de surface sur trois niveaux sont prévus : des espaces grand public en rez-de-chaussée ; une cantine numérique, des laboratoires mutualisés et des salles de projet à l’étage et la pépinière d’entreprises au dernier niveau… A l’origine, la Cité devait être construite dans la ZAC du quartier Ferrié, qui couvre une partie de l’ancien terrain militaire, à l’entrée nord-ouest de l’agglomération, et ouvrir en 2015. Mais les échéances politiques de mars dernier ont changé la donne. François Zocchetto, nouveau maire de Laval et président de Laval Agglomération, est favorable à son installation dans la Technopole. « Le lieu de l’implantation est remis en cause et le démarrage des travaux gelé en attendant une décision définitive », confie Didier Maignan, responsable du service communication de la mairie. Le déménagement du salon Laval Virtual, qui grossit d’année en année, semble lui aussi compromis…