Le Conseil National des Professions de l’Automobile (CNPA), principale organisation patronale du secteur en France, a officialisé la création de son nouveau métier mardi dernier afin d’agréger ses start-up et faire entendre leur voix auprès des acteurs publics et privés.
Le CNPA, représentant 135 000 entreprises et 410 000 emplois en France, a annoncé ce mardi la création d’un 19è métier dédié aux entrepreneurs de la mobilité. Au total, une cinquantaine de start-up sera fédérée autour de “l’Alliance des mobilités” et présidée par Julien Honnart, fondateur de Klaxit, start-up spécialisée dans le covoiturage du quotidien.
“Ce n’est pas un effet de mode mais une vraie tendance de fond […] justifie Xavier Horent, délégué général du CNPA. Les start-up ont besoin d’entreprises traditionnelles pour se développer et les entreprises ont besoin de start-up pour accélérer leur innovation”. Favoriser la collaboration entre start-up et acteurs historiques du secteur est un moyen pour le CNPA de se mettre à la page de l’innovation et mieux représenter ses intérêts auprès de la filière automobile et pouvoirs publics.
Quatre commissions prioritaires ont été nommées pour piloter l’Alliance des mobilités : affaires publiques et communication, connexion territoires et métiers, événementiel et labellisation. Plusieurs “verticales” seront également en charge d’organiser l’écosystème autour de la micro-mobilité, les deux roues motorisées, l’auto-partage, le covoiturage, les mobilités des biens, l’aftermarket et la mobilité connectée.
L’intérêt que porte le syndicat professionnel des entrepreneurs de la mobilité pour les start-up ne date pas d’aujourd’hui. En 2017, le CNPA a lancé son propre accélérateur de la mobilité à Station F. Créé en partenariat avec un incubateur dédié aux nouvelles mobilités Via ID, le Moove Lab a accueilli dernièrement sa quatrième promotion de jeunes pousses, permettant au CNPA d’étudier plus de 400 candidatures.
C’est justement à la suite de la création du Moovelab que Movibia, acteur européen de l’entretien de véhicules multi-marques, a décidé de rejoindre le CNPA. Pour Bénédicte Barbry, Directrice des Relations Extérieures, Affaires Publiques et Développement Durable de Movibia, “il a fallu une dizaine d’années d’échange avec le CNPA, qui travaillait encore en silos” pour y arriver. Selon elle, le CNPA n’est plus une “fédération poussiéreuse de l’ancien monde” et aujourd’hui, l’Alliance des mobilités va permettre d’accélérer la dynamique d’une filière “à la croisée des enjeux technologiques, écologiques, économiques et d’usage”.
Un enjeu de visibilité et de dialogue
L’objectif premier de l’Alliance est de fédérer les start-up de la mobilité afin de mieux les représenter auprès de la filière automobile et des pouvoirs publics. Un enjeu de visibilité qui nécessite un dialogue et un partage d’idées avec les entreprises traditionnelles du CNPA. “On avait des écosystèmes juxtaposés les uns aux autres” précise Alexis Fréjean, fondateur de Vroomly, la start-up qui compare les garages auto en ligne. Il s’occupera de “faire le bridge entre les acteurs historiques de la mobilité et les start-up” pour l’Alliance.
Selon Julien Honnart, c’est surtout lié à une ambition de mettre le doigt sur la complexité qui caractérise l’écosystème de la mobilité. Pour cela, Fabrice Catagliore, le co-fondateur de Fidcar (spécialiste de l’e-reputation automobile) en charge de la partie événementiel de l’Alliance a ajouté qu’elle va participer au salon de l’Automobile à Lyon en septembre et le salon Equip Auto en octobre.
La mobilité sera présente au salon VivaTech 2019
Le salon VivaTech 2019, qui se tiendra du 16 au 18 mai prochain, prévoit encore une grande affluence ; l’année dernière elle comptait plus de 100.000 visiteurs et 9000 start-up françaises et étrangères. Pour sa quatrième édition, l’Europe, les femmes et la “Tech for good” seront mises à l’honneur mais de nombreuses autres thématiques auront leur espace dédié comme la mobilité. Au programme de la “Mobility Tech” : Arval (BNP Paribas Group) viendra présenter son véhicule électrique, Citroën son sa solution de mobilité urbaine 100% électrique “Ami-One”, Hyper Poland son Hyperloop… et bien d’autres !
Autre enjeu de taille : “faire grandir la filière française et européenne” notamment face à la concurrence des GAFAM. Et cela se joue sur le terrain des données, en coopération avec les pouvoirs publics. “Les ministères en face de nous restent très cloisonnés vis à vis de la data” regrette Xavier Horent. Il n’existe pas de ministère pilote qui va permettre de transversaliser cette pratique”. Ainsi, pour “devenir les champions du Mobility-as-a-Service”, Xavier Honnart entend ”faire comprendre les enjeux“ autour de la data.
“Un agenda de solutions” ancré au territoire
Le dernier objectif fait référence à ‘l’optimisation des ressources et la mobilité du quotidien”, d’après Julien Honnart. Autrement dit, tendre vers l’équilibre entre scalabilité et ancrage local des solutions déployées. Un projet qui se concrétisera par l’instauration d’un dialogue avec les autorités locales pour accentuer le travail sur les mobilités du quotidien dans le cadre de la mise en application du projet de loi d’orientation des mobilités (LOM).
“La crise des gilets jaunes a fait émerger le sujet de la précarité de la mobilité” explique Xavier Horent avant de justifier que “ce projet de transformation est difficile car il y a des réalités économiques court-termistes”. Selon lui, il n’y a donc pas de transformation possible sans prise en compte de ce problème de réalité économique et territoriale. La disruption ne pourrait donc être dissociée de la notion d’intérêt général et des logiques territoriales.
Grâce au forum de discussion qu’elle mettra en place, l’Alliance des mobilités va appuyer sur la diversité des acteurs qu’elle connecte ensemble pour faire valoir sa légitimité et son expertise sur le terrain. Et au delà de sa crédibilité acquise par le biais de ses adhérents traditionnels, le CNPA mise sur le concret : notamment en proposant un amendement dans le cadre de la loi LOM destiné à favoriser l’auto-partage en boucle et le covoiturage au sein des entreprises.
C’est d’ailleurs en ce sens que Julien Honnart a souhaité clôturer la conférence de presse en paraphrasant Emmanuel Macron lors de son discours aux gilets jaunes en novembre dernier avec le terme d’“agenda de solutions”. Un moyen d’insister sur sa volonté de dépasser le stade de l’idéation et bouger concrètement les lignes de la mobilité.