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Le Design Thinking, la fabrique de l’innovation

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Annie Combelles, Présidente Fondatrice inspearit

Parfaitement informé, le consommateur est désormais en position de force. À l’ère du marketing, où l’on pouvait lui imposer un produit, succède celle de l’expérience, où l’on doit obtenir son adhésion. Dès lors, c’est la conception même des produits et des services qui s’en trouve bouleversée, car il faut anticiper les besoins plutôt qu’espérer les susciter. Méthode d’innovation dynamique et collaborative fondée sur l’empathie avec l’utilisateur, le Design Thinking apparaît comme une réponse particulièrement adaptée à ce contexte.

Développé durant les années 1980, le Design Thinking n’est pas un concept nouveau, mais on le redécouvre aujourd’hui car la boîte à outils qu’il propose offre une forme de Requirements Management qui s’accorde parfaitement aux exigences actuelles : aller vite, rester au contact des tendances du marché, et surtout penser usage plutôt que spécifications. À la différence de la co-création, qui peut impliquer une communauté entière d’utilisateurs, le Design Thinking s’appuie sur des ateliers d’une dizaine de personnes. Il permet de les outiller, de les animer, d’en extraire des « user stories » et de les traduire en éléments tangibles pour les développeurs. Il existe diverses méthodologies, mais toutes activent systématiquement trois leviers : la désirabilité (l’entreprise s’efface derrière son client), la faisabilité (un prototypage, même rudimentaire, intervient très tôt dans le processus) et la viabilité (la dimension économique est d’emblée prise en compte).

Des travaux menés il y a quelques années à l’Université de Londres ont démontré l’efficacité de rassembler autour de la table des personnes ayant des profils, des compétences, mais aussi des niveaux de maturité différents. La fraîcheur du questionnement des novices pousse les experts à sortir de leurs schémas habituels. La confrontation des expériences et des émotions fait émerger des interrogations et des suggestions, contribue à séparer l’indispensable du superflu, ou met en évidence ce qui ne peut être tenu pour acquis. Le Design Thinking initie et fait fructifier cette dynamique en réunissant utilisateurs, entrepreneurs, partenaires, experts internes, universitaires… Souvent constitué sur la base du volontariat, le groupe de travail doit être composé de personnes motivées et convaincues par la démarche qui, réunies, en porteront de façon équilibrée les trois dimensions.

Le Design Thinking n’exige pas de prérequis particuliers, sinon une certaine disposition culturelle de l’organisation. Celle-ci doit en effet être prête à accueillir des propositions et des observations de la part de personnes extérieures, qui « ne sont pas du métier », et avoir assez d’humilité pour en reconnaître la valeur. Les difficultés sont rares au sein des ateliers eux-mêmes, car les participants sont souvent friands de ces échanges de vue. En revanche, elles peuvent se manifester au niveau du middle management, qui peut vivre le processus et ses conclusions comme un désaveu, une perte de pouvoir ou une source de frustration. Le Design Thinking contribue notamment à abattre la cloison entre MOE et MOA, remettant parfois en cause des modes de fonctionnement établis de longue date. Le dispositif fonctionne par conséquent d’autant mieux que l’organisation est plate et que le système de management encourage la collaboration.

Véritable fabrique de l’innovation, le Design Thinking requiert toutefois un accompagnement pour organiser, animer et valoriser les ateliers d’une part, et faciliter l’acceptation de leurs résultats en interne d’autre part, sans quoi il risque de ne pas porter pleinement ses fruits. Malgré son intuitivité et sa simplicité apparente, la démarche exige en effet vigilance et méthode si l’on veut éviter que les ateliers ne se transforment en exercice stérile.

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