Pionnier sur le marché des robots agricoles en environnement extérieur, Naïo Technologies veut croître à l’international après une levée de fonds de 2 millions d’euros fin 2017. Objectif : rester leader !
| Cet article fait partie du dossier « Agriculture : des hommes et des champs connectés »
La levée de fonds réalisée en fin d’année dernière* par Naïo Technologies devrait permettre aux deux cofondateurs de la start-up créée en 2011, Gaëtan Séverac et Aymeric Barthès, de séduire au-delà de nos frontières.
Spécialisée dans la robotique agricole, Naïo Technologies (1,5 million d’euros de chiffre d’affaires en 2017, 26 collaborateurs), propose une gamme de robots – Oz, Dino, le robot chenillard et Ted** – facilitant le travail des agriculteurs et des maraîchers grâce à un désherbage mécanique autonome. La start-up utilise des technologies permettant de limiter l’impact environnemental et de gagner en productivité. Elle dispose aujourd’hui de plus de 80 systèmes autonomes en exploitation dans le monde.
Son robot chenillard, destiné au désherbage des vignes en assurant l’entretien au sol sur le rang et dans l’inter-rang, a reçu l’un des cinq « Prix à l’innovation » du VITeff, le salon international des technologies des vins effervescents, qui s’est tenu à Épernay (Marne) en octobre dernier. Naïo Technologies marque ainsi sa présence dans le domaine vinicole. L’arrivée de Nicolas Hériard-Dubreuil, directeur général d’Oeneo (Diam bouchages, Tonnellerie Seguin Moreau, Vivelys…) au board de l’entreprise en tant qu’investisseur à hauteur de 1,5 % du capital, en est un autre signe : le groupe viti-vinicole compte mettre à la disposition de la start-up l’ensemble de ses connaissances dans le monde de la vigne ainsi que ses réseaux internationaux.
L’enjeu : faire évoluer les robots dans un environnement complexe
Par ailleurs, Naïo Technologies entend renforcer la confiance des agriculteurs dans la robotique, notamment en enrichissant ses robots de connaissances GPS. « Le partenariat avec Pro Drones Investments, qui détient la société Microdrones, est stratégique pour nous, a expliqué à Reuters Aymeric Barthès, directeur de Naïo Technologies. Nous allons pouvoir opérer des survols au-dessus des cultures pour élaborer des cartes GPS que nous intégrerons dans les robots et lever ainsi un frein à la vente. […] Tout comme les voitures autonomes, la robotique agricole n‘est pas encore entrée dans les mœurs. Notre enjeu, c‘est d’être prêt le jour où elle se démocratisera et de conserver notre position de leader mondial. »
Car ce manque de confiance est encore un obstacle au déploiement généralisé de la robotique agricole (lire encadré). « La robotique existe bien entendu depuis longtemps dans l’agriculture, notamment avec les robots de traite. Nous encourageons désormais un essor des robots de champs, détaille Aymeric Barthès. Les concernant, l’enjeu est de les faire évoluer dans un environnement complexe, c’est-à-dire non fermé. Il ne faut pas qu’ils aillent sur la route, par exemple. Il y a des problématiques autour des risques pour les biens et personnes. »
Vers le smart farming
Les technologies – capteurs, imagerie satellites ou robotique – se développent dans tous les secteurs de l’agriculture. « Les objets connectés se démocratisent, on se dirige inévitablement vers l’AgTech, ou ce qu’on appelle aussi le smart farming. C’est une bonne chose car cela pourrait contribuer à résoudre les problèmes des agriculteurs en termes de main d’œuvre ou de production », estime Aymeric Barthès, qui prédit le développement de fermes verticales, dont la première étape à sa construction est la robotique.
Naïo Techonologies conçoit et assemble ses robots à Toulouse (Haute-Garonne), sous-traite la réalisation des pièces métalliques à l‘entreprise de tôlerie industrielle Goubier (Tarn-et-Garonne) et des cartes électroniques à deux sociétés du Tarn et de Loire-Atlantique. Ses robots sont commercialisés en France et en Europe, notamment en Suisse, en Allemagne et au Danemark. Et, depuis peu, en Martinique et en Nouvelle-Zélande. Son objectif pour cette année est de doubler son chiffre d’affaires à partir de la vente de 70 robots et de s’attaquer plus sérieusement à l’international.
* auprès des capital-risqueurs Capagro et Demeter Ventures (800 000 euros chacun), de la plateforme de financement participatif toulousaine Wiseed (200 000 euros). Deux nouveaux actionnaires les ont rejoints à hauteur de 100 000 euros chacun, le groupe viti-vinicole Oeneo, détenu en partie par la famille Hériard-Dubreuil, et la société américaine Pro Drones Investments. Il s’agit de la quatrième levée de fonds de la start-up.
** Oz est dédié au désherbage mécanique des cultures maraichères ; Dino, au désherbage industriel des salades ; le robot chenillard et le dernier-né Ted, au désherbage des vignes.
Structurer la filière agricole
Soucieux de collaborer avec l’ensemble des acteurs du monde agricole pour évoluer plus vite, Aymeric Barthès et Gaëtan Séverac – les deux cofondateurs de Naïo Techonologies – ont créé en novembre 2016 le Forum international de la robotique agricole (Fira). « La première édition, organisée dans un lycée agricole, a rassemblé environ 250 personnes. Un an plus tard, en novembre dernier, nous avons doublé le nombre de visiteurs, qui s’élevait à près de 500 participants », se réjouit Aymeric Barthès.
Grâce à cet événement et aux échanges qu’il provoque, Aymeric Barthès et Gaëtan Séverac entendent structurer la filière et poser des normes et des standards pour la robotique agricole, « au même titre que ce qui est fait pour le véhicule autonome », notamment en termes d’assurance. « L’enjeu actuel dans la robotique agricole est de prouver que la technologie est fiable sans surveillance, souligne Aymeric Barthès. Car aujourd’hui dans les tracteurs autonomes, il y a toujours quelqu’un à bord pour contrôler ce qui est fait. Or, la robotique est là pour faire gagner du temps à l’agriculteur. »
La troisième édition, qui se tiendra fin 2018, sera axée sur les agriculteurs. « Nous voulons leur permettre d’exprimer leurs besoins sur le sujet », annonce Aymeric Barthès. Le Fira a aussi vocation à s’internationaliser davantage. « Nous voulons toucher plus de monde car il s’agit d’un sujet mondial », ajoute le cofondateur en recherche de partenaires. Aymeric Barthès ambitionne une gestion du salon par une entité séparée, et non plus uniquement par Naïo Techonologies.